Ils ont été «tronqués» et le chef de l’Etat est «profondément meurtri» par leur interprétation

Sénégal: Propos attribués au président Abdoulaye Wade contre les chrétiens de son pays

Dakar, 16 décembre 2009 (Apic) Le président du Sénégal, Abdoulaye Wade, a déclenché une vive polémique la semaine dernière dans le pays, en regrettant publiquement «le manque de reconnaissance» des chrétiens sénégalais à son égard. Il avait tenu ces propos lors de la pose de la première pierre d’une grande mosquée de la confrérie des mourides à Dakar. Ses propos auraient été «tronqués», selon le gouvernement sénégalais.

D’après le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement sénégalais Moustapha Guirassy, les propos attribués au président Abdoulaye Wade ont été «tronqués». Le chef de l’Etat sénégalais se sent «meurtri et indigné» par la «mauvaise interprétation» qui en ont été faites.

«Manque de reconnaissance» de l’Eglise du Sénégal à l’endroit du président ?

Des journaux sénégalais ont rapporté la semaine dernière, que le samedi 5 décembre, lors de la cérémonie de pose de la première pierre de la grande mosquée de la confrérie des mourides – à laquelle il appartient – le président s’est plaint du «manque de reconnaissance» de l’Eglise du Sénégal à son endroit.

«Ce que j’ai fait pour les chrétiens, ils ne l’ont pas dit. Je pouvais ne pas le faire, car j’ai pris cet argent de ma propre poche. Ce n’est pas l’argent du pays. Je l’ai fait, car c’est la vie qui est ainsi. De la manière que j’aide ceux-ci (les chrétiens) c’est de la même manière que j’aide les autres (confessions)», avait indiqué le président Wade, dans sa déclaration en woloff, sa langue, selon ces médias.

Ces propos avaient suscité de vives réactions de ses adversaires politiques, de la société civile, et d’un membre de l’Eglise catholique. L’Organisation nationale des droits de l’homme (ONDH) avait exprimé ses «vives préoccupations» face à ces propos, appelant les hommes politiques sénégalais, à faire attention à leurs déclaration. Elle avait appelé aussi «la préservation de la cohésion sociale, au respect des convictions religieuses».

La réaction virulente de l’abbé André Latyr Ndiaye

La réaction la plus virulente a été celle d’un membre du clergé catholique, l’abbé André Latyr Ndiaye, curé de la paroisse de Gorée. Dans une lettre ouverte au vitriol, adressée au président Abdoulaye Wade, et publiée samedi 12 décembre 2009 dans plusieurs quotidiens sénégalais, il a indiqué que les chrétiens du Sénégal n’ont «aucune dette de reconnaissance envers personne, si non qu’à Dieu seul». «L’orgueil pue dans les chaumières des paysans comme dans les palais des rois», a-t-il poursuivi, ajoutant que «le bien ne fait pas de bruit et le bruit ne fait pas de bien».

Dans un souci de «clarification et de transparence», Moustapha Guirassy a organisé une conférence de presse au cours de laquelle, il a fait visionner et écouter l’élément sonore des propos incriminés, prononcés en woloff, l’une des langues nationales du pays. Ces propos, tels que diffusés par les radios locales, sont juste un bout de phrase où le président dit : «les chrétiens eux, ne disent rien. Ce que j’ai fait pour eux, c’est de ma poche que je l’ai pris, car il en est ainsi au Sénégal».

Au Sénégal, «les chrétiens ne font pas de bruit et sont disciplinés»

Or, la traduction dans la presse de cette déclaration fait état de «l’indignation» du président Wade face à «l’ingratitude» des chrétiens à son égard, en dépit des largesses qu’il leur a accordées. «Il y a toute une fausse interprétation entre cette déclaration et son interprétation», a souligné le ministre de la Communication. Et d’affirmer que «le président Wade n’a jamais parlé d’indignation ou d’ingratitude des chrétiens». Selon lui, «c’est parce que justement les chrétiens ne font pas de bruit, et qu’ils sont disciplinés» que le président les a cité en exemple.

Tout en réaffirmant «l’engagement du président Abdoulaye Wade dans la voie du dialogue interreligieux et entre les confréries dans le pays», Moustapha Guirassy, a appelé les journalistes sénégalais à se ressaisir». «Il est essentiel de préserver ce que nous avons de si fondamental et de précieux et qui constitue le patrimoine spirituel du Sénégal», a-t-il fait remarquer, en parlant de l’exemple du Sénégal en matière de cohabitation pacifique entre les différentes religions. Au nom du gouvernement, il a exhorté les responsables des médias, les leaders d’opinion et les hommes politiques du pays à «refermer cette brèche» qui constitue une menace pour la cohésion nationale. (apic/ibc/be)

16 décembre 2009 | 15:36
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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