Le procès dit 'de l'immeuble de Londres' a commencé en 2021 | © Vatican Media
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Immeuble de Londres : le promoteur de justice contre-attaque

De « fausses questions qui ne servent qu’à dire que l’ensemble de ce procès est illégitime » : c’est ainsi que le promoteur de justice Alessandro Diddi a qualifié certains reproches de la défense lors de la 84e audience du procès de l’affaire dite ›de l’immeuble de Londres’, le 11 décembre 2023. Défendant son réquisitoire en répondant pour la dernière fois aux principaux griefs présentés par les avocats des dix accusés, il a déploré que la défense n’ait souvent « eu d’autre argument que des attaques ad hominem contre la fonction du promoteur ».

À quelques jours du verdict, prévu entre le 13 et le 16 décembre, le promoteur a tenté de contrer un des arguments les plus entendus dans la salle polyfonctionnelle des Musées du Vatican pendant les plaidoiries : le non-respect de la Convention européenne des droits de l’homme – que le petit État n’a dans les faits pas ratifié formellement. « Une hérésie juridique », s’est-il exclamé, insistant sur le fait qu’il n’y a « jamais eu la moindre obstruction à la procédure contradictoire » ou aux principes du juste procès de la part de son Bureau. « Ce sont de faux problèmes », a-t-il insisté.

Le promoteur a de la même manière récusé toutes les accusations de « rétroactivité » du droit, formulées par la défense en raison de la publication par le pape de huit rescrits – quatre publics et quatre « secrets » – depuis le lancement de son enquête. Ces rescrits avaient pour but de réglementer « des activités par ailleurs non réglementées », a-t-il expliqué.

Alessandro Diddi a de plus reproché à la défense de trop souvent « interpréter les faits à la lumière de la loi italienne ». Le Code pénal du Vatican s’appuie certes, depuis 1929, sur l’antique code du Royaume d’Italie (qui date de 1889), mais a depuis connu de nombreuses modifications, comme en atteste l’édition de 2020 du Codice Penale Vaticano par la Librairie éditrice vaticane. Plusieurs défenseurs des parties civiles, qui se sont exprimés en seconde partie d’audience, ont aussi rappelé que le droit canonique restait la source du Code pénal du Vatican et devait donc être pris en considération.

Des preuves ignorées par la défense

Une autre attaque systématiquement formulée par les avocats de la défense est que le promoteur de justice aurait examiné uniquement les preuves qui soutiennent sa thèse et aurait écarté les autres. Ce blâme, leur a-t-il répondu, se retourne contre eux. Le promoteur considère en effet que de nombreux éléments présents dans la version écrite de l’acte d’accusation ont été « complètement ignorés par les défenses ».

Ainsi, l’accusation se serait trop concentrée sur le cas de Mgr Alberto Perlasca. L’ancien responsable des finances de la secrétairerie d’État, aujourd’hui témoin et partie civile, « n’est pas la pierre angulaire de notre accusation », a insisté Alessandro Diddi, affirmant même qu’en tant que témoin, il n’a eu « aucune incidence » sur le volet de l’enquête qui concerne l’immeuble de Londres.

De même, la pertinence des témoignages de Francesca Immacolata Chaouqui et de Genoveffa Ciferri, qui semblent avoir influencé la rédaction d’un mémoire de défense de Mgr Perlasca, serait « nulle », selon le promoteur.

Alessandro Diddi a enfin raconté comment le cardinal Becciu était « entré » dans son enquête. « C’est Becciu qui, alors qu’il n’y avait pas encore la moindre trace de sa personne, a tout fait pour entrer dans le procès en défendant l’opération de Londres », a-t-il expliqué, affirmant qu’il avait même orchestré une « campagne de presse » contre son Bureau entre 2019 et 2020.

Une lettre de soutien du cardinal Parolin

L’audience de plus de neuf heures a permis en outre d’écouter une dernière fois les avocats des parties civiles : l’Administration du patrimoine du siège apostolique (APSA) – la banque publique du Vatican –, l’Institut pour les œuvres de religion (IOR) – la banque privée –, l’Autorité de surveillance et d’information financière (ASIF) – l’entité anti-blanchiment –, la secrétairerie d’État et Mgr Alberto Perlasca.

À la fin de l’audience, une lettre du cardinal Pietro Parolin signée le 7 novembre dernier a été lue par le promoteur de justice appliqué Gianluca Perone. Le secrétaire d’État, qui avait été un temps annoncé comme témoin avant d’être enlevé de la liste, confirme la « demande de poursuite et de répression de toutes les infractions pour lesquelles une action est entreprise à la demande d’une partie et pour lesquelles la secrétairerie d’État est une partie lésée ».

Ce 12 décembre, les défenses des dix accusés se prononceront une dernière fois, avant un verdict prévu entre le 13 et le 16 septembre. Le procès aura duré près de deux ans et demi, soit la plus longue procédure de l’histoire contemporaine de la justice vaticane. (cath.ch/imedia/cd/mp)

Le procès dit 'de l'immeuble de Londres' a commencé en 2021 | © Vatican Media
12 décembre 2023 | 10:57
par I.MEDIA
Temps de lecture : env. 3  min.
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