Notre-Dame de Lausanne: un don du pape Grégoire XVI refait surface
Si la restauration de la basilique Notre-Dame de Lausanne a redonné tout son éclat au lieu, un autre objet va attirer les regards durant les cérémonies d’inauguration: le pontifical offert par Grégoire XVI à l’église en 1835 que va porter Mgr Charles Morerod les 6 et 7 septembre 2025. L’ensemble de vêtements liturgiques a, lui aussi, été restauré après avoir été découvert… dans le clocher de la basilique.
Sarah Besson-Coppotelli, directrice des musées de Moudon et historienne de l’art est à l’origine de la découverte fortuite de ce trésor. Elle a les yeux qui brillent lorsqu’elle raconte l’histoire de ce pontifical oublié. Mandatée en 2022 pour mettre de l’ordre dans les archives de la paroisse en parallèle du chantier, elle épluche les classeurs qui répertorient, entre autres, le trésor* de la basilique. «Tout était inventorié avec des photos: ciboires, calices, reliques, et aussi des tableaux, mais je n’ai pas trouvé de textile», se souvient celle qui est actuellement la responsable du patrimoine de la paroisse Notre-Dame.
Un pontifical à l’abandon

La basilique est alors en plein chantier de restauration. Sur le conseil du sacristain, elle monte au clocher fouiller dans les affaires qui y ont été déménagées, suite aux travaux de transformation entamés à la sacristie. Elle déniche, mal accrochés sur des cintres, et à l’abandon, les pièces très abimées d’un pontifical. «Il y avait une chappe, une dalmatique, une tunique, une chasuble, l’étole et un manipule», indique la spécialiste du textile. En étudiant attentivement les vêtements, elle repère les armoiries pontificales brodées sur les vêtements et découvre qu’il s’agit du fameux pontifical offert par Grégoire XVI en 1835 à l’église nouvellement construite.
Sarah Besson-Copotelli trouve également une soixantaine de vêtements liturgiques. «Un tiers étaient des chappes de la fin du XVIIIe siècle. Certaines, estime-t-elle, remontent à une période comprise entre 1780 et 1820. Tout est cousu à la main et rehaussé de fil d’argent.» La spécialiste mentionne une chasuble créée par Jean-Charles de Castelbajac pour les JMJ de Paris, en 1997. Ces vêtements liturgiques, insiste-t-elle, ont une valeur patrimoniale plus que financière pour l’Eglise. A travers leur facture, leurs ornements, ils racontent une époque particulière de l’Eglise catholique.»
Constat d’état
Sitôt découverts, les vêtements sont entreposés dans une salle de la paroisse. Sarah Besson-Copotelli les pose à plat sur des draps pour établir un constat d’état pour les faire sécher. Elle inventorie l’ensemble des vêtements et les éléments du pontifical, les photographie et évalue les interventions les plus urgentes à effectuer. «Il s’agissait de les mettre à l’abri de l’humidité et de stopper la dégradation du tissu.»

L’historienne de l’art parvient à convaincre le Conseil de paroisse de faire restaurer le pontifical, «un vêtement unique dans le diocèse!» Elle fait appel à Piero Montelli, restaurateur expert et grand spécialiste italien des parements anciens. En décembre 2023, elle lui confie le pontifical dont il parvient à remplacer le tissu usé. Il accomplit un miracle. Il recrée les deux manipules manquants à partir de celle retrouvée dans le clocher.
La vie culturelle de l’Eglise vous intéresse? Abonnez-vous à cath.ch!
Les autres vêtements liturgiques ont été stockés, pour une partie à la sacristie, en attendant de trouver les fonds qui permettront leur restauration, précise l’historienne de l’art. «Les autres pièces ont été déposées chez une spécialiste en attente de leur restauration», ajoute-t-elle.
De la soie au fil d’argent
Le restaurateur recrée aussi le pectoral. Deux ans d’un travail méticuleux ont été nécessaires. «Le plus gros de l’ouvrage a été la restauration des dentelles au fil d’argent», précise Sarah Besson Coppotelli. En juin 2025, l’historienne de l’art rentre de Vérone avec le pontifical restauré. Budget: 10’000 euros. «C’est un très bon prix quand on songe aux 800 francs que coûte un mètre de soie au fil d’argent». Le restaurateur a réussi à s’en procurer auprès d’une communauté religieuse qui en disposait encore et qui lui a cédé pour un montant raisonnable.
Cette restauration inattendue a nécessité le lancement d’une nouvelle collecte qui a permis de financer, outre le pontifical, un guide sur l’histoire de la basilique richement illustré, édité par la paroisse en collaboration avec la Société suisse d’histoire de l’art. La récolte de fonds a aussi permis de financer une messe composée spécialement pour la célébration de la consécration du nouvel autel.
C’est donc un pontifical riche d’une belle histoire dont sera revêtu Mgr Charles Morerod lors des célébrations de bénédiction et la messe prévues les 6 et 7 septembre. «Au-delà de sa beauté, ce pontifical reflète le geste d’un pape attentif à la construction d’une église et de sa communauté en terre protestante», conclut Sarah Besson-Coppotelli. (cath.ch/bh)
*Le trésor d’une église, basilique ou cathédrale est composé de la paramentique – les vêtements liturgiques et parements d’autel –, de la vaisselle liturgiques – coupes, ciboires, calices – et des reliques.
Un chantier de huit ans
L’inauguration de ce week-end clôt un chantier de huit ans au cours duquel le narthex, la nef centrale, 29 vitraux et 2’000 tuyaux d’orgue ont été restaurés grâce à 32 corps de métier. La collecte a permis de lever 6 millions de francs.
Programme:
-Le 6 septembre: Cérémonie officielle en présence des autorités suivie d’un apéritif.
-Le 7 septembre: Messe pontificale et consécration du nouvel autel par Mgr Charles Morerod. Messe pour choeur, orchestre et orgue composée pour l’occasion, suivie d’un apéritif.
-Le 26 septembre: Messe en si de J.S. Bach, Chœur de la basilique.