Inde: La moitié des forêts ont été déboisées (280289)
«Embrassez les arbres», le mouvement écologique Chipko lutte et dénonce
Nouvelle Delhi, 28février(APIC) L’Inde a fêté en 1987 ses 40 ans d’indépendance. Ce pays avait de nombreuses raisons de fêter cet événement: il
a en effet affirmé et renforcé sa position internationale, cependant que
sur le plan national, il a accompli d’importants progrès. Connu dans les
années 70 encore pour ses terribles famines, le pays produit aujourd’hui la
totalité de ses denrées alimentaires. Dans les domaines de la formation et
de la santé, notamment, les progrès sont également importants. Mais ceux-ci
ne sont pas sans revers puisque de 1947 à 1977, la moitié de toutes les
forêts de ce vaste pays aux dimensions continentales a été déboisée.
C’est une véritable catastrophe écologique: le climat se dessèche, le
sol s’érode, l’oxygène se fait plus rare. Dans les montagnes de l’Uttar
Pradesh, particulièrement, les villageois et plus encore les villageoises
subissent un alourdissement de leur travail: les femmes, chargées entre
autres de ramener du bois de feu, de la nourriture pour le bétail et de
l’eau, doivent parfois se déplacer jusqu’à 10 heures par jour pour ramener
ce qu’il faut; les forêts, base de la vie des montagnards, ne sont plus
près des villages.
Face à cette situation, le mouvement populaire «Chipko andolan» (qui
veut dire «Embrassez les arbres»), s’est créé en 1973, inspiré par les
méthodes et la philosophie de Gandhi, ainsi que par la culture des populations concernées – pratique du «Satyagraha», non-violent, et référence à la
pensée de «Sarvodaya» (le bien pour tous). Les autorités indiennes hésitent
à sévir contre des mouvements qui agissent à partir de ces bases, aussi le
mouvement Chipko a-t-il remporté certains succès.
Elles enlacent les arbres…
Une de ses actions préfèrées est de se rendre à un emplacement ou un
marchand de bois a acquis de l’Etat le droit d’abattre tout un secteur de
forêt. Les femmes se précipitent vers les arbres, les enlacent, se pressent
contre les troncs, s’engagent à tout faire pour les sauver. Elles invitent
les bûcherons à les abattre elles, plutôt que les arbres. Elles n’acceptent
pas qu’on les déplace, se défendent comme de belles diablesses si on tente
de le faire. Les enfants jouent du tambour, se précipitent sur les ouvriers
et leur arrachent les haches; ils chantent un chant louant la «guerre sainte» contre les «cruels destructeurs de la forêt». Finalement, bûcherons et
marchands de bois battent en retraite. Il est rare qu’ils reviennent avec
la police.
Le mouvement Chipko est animé par des travailleurs sociaux mais repose
avant tout sur l’action des femmes des villages de montagnes. Il groupe environ 50.000 membres. Son but premier est d’empêcher qu’on continue d’abattre des arbres de façon irresponsable mais ne s’oppose pas à une exploitation écologiquement raisonnable des forêts. Par ailleurs, il a planté plus
de 100.000 arbres en 1978. Ces deux mesures doivent permettre de freiner
l’érosion et de conserver la forêt comme réservoir régulateur de l’eau et
comme source d’ogygène.
Le mouvement Chipko est notamment animé par Vananda Shiva, physicienne
de formation qui a rejoint les rangs du mouvement «Embrassez les arbre».
Brillante dialecticienne, elle écrit actuellement des articles et voyage
dans le monde entier pour présenter son mouvement. (apic/cvg/pr)