Egypte: Nouvelle loi contre le trafic des êtres humains

Insuffisante pour combattre les mariages «temporaires» des filles mineures

Le Caire, 16 mai 2010 (Apic) Le parlement égyptien a récemment voté une nouvelle loi faisant du trafic d’êtres humains un crime passible d’amende et de prison ferme. Il veut mettre un terme au phénomène des mariages «temporaires» de filles mineures à de riches et vieux hommes venant des pays du Golfe.

Au terme de cette nouvelle loi, «les individus ou groupes d’individus qui se livrent au trafic d’êtres humains seront condamnés à des peines d’emprisonnement à perpétuité et à des amendes allant de 50’000 à 200’000 livres égyptiennes» (de quelque 10’000 à 40’000 CHF).

De riches et vieux hommes des pays du Golfe s’achètent des filles mineures

Selon le texte exposant les motifs de cette nouvelle législation, le gouvernement est «responsable» de la protection des victimes du trafic humain. De ce fait, il doit leur offrir assistance médicale, sociale et éducative nécessaire pour qu’elles puissent à nouveau faire partie de la société. Un fonds spécial sera créé pour offrir l’assistance financière nécessaire aux citoyens, victimes du trafic d’êtres humains.

En Egypte, a déclaré à l’Agence de presse de l’ONU «IRIN» (Réseau d’information régionale intégrée), les mariages «temporaires» de filles mineures à de riches et vieux hommes des pays du Golfe font partie des habitudes culturelles et sociales du pays. «Les lois, à elles seules, ne peuvent pas mettre fin à une maladie sociale comme cette pratique», a estimé Ahmed Seif el-Islam, avocat et défenseur des droits humains. Pour ce juriste, il faut plutôt s’attaquer aux racines du mal, afin de résoudre le problème.

L’Egypte, victime de cette forme de tourisme sexuel

Les cas de mariages temporaires font souvent les gros titres des média égyptiens pour souligner le problème que pose le tourisme sexuel dans le pays. Dans les zones rurales défavorisées et les bidonvilles du Caire, des parents marient leurs filles mineures à des hommes riches des pays arabes du Golfe, souvent plus âgés de 30 ou 40 ans, pour de l’argent.

Le mariage ne dure que quelques mois et coûte 3’000 dollars au touriste arabe. Pour ces familles, marier leurs filles pour de l’argent leur permet de se mettre provisoirement à l’abri la pauvreté. Selon l’Agence centrale pour la mobilisation publique et les statistiques (CAPMAS), l’Egypte, avec ses 80 millions d’habitants, compte plus de 23% de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté. Cette extrême pauvreté explique la montée du phénomène des mariages temporaires, car les parents des filles mariées ont besoin d’argent. «Ils voient leurs filles comme un marché qui peut leur rapporter de l’argent».

«Au lieu d’offrir une protection à leurs filles, les parents les forcent à se marier de cette façon», a déploré Farkhunda Hassan, secrétaire générale du Conseil national de la femme, une agence affiliée au gouvernement. En plus de cette pratique courante et répandue, l’Egypte est considérée, par les services américains de l’immigration, comme un pays à la fois, de départ, de transit et de destination des femmes et des enfants victimes du trafic d’êtres humains pour le travail forcé et l’exploitation sexuelle.

Face à la gravité du trafic humain, l’ONU y a dépêché, le mois dernier, son Rapporteur spécial sur le trafic d’êtres humains, Joy Ngozi Ezeilo. A l’issue de cette mission, elle a demandé au gouvernement de prendre des mesures «plus dures» pour combattre ce fléau qui fait partie d’une liste de maux sociaux. «Il y a une tendance en augmentation de l’exploitation sexuelle et économique des filles mineures à travers le mariage saisonnier/temporaire, la servitude domestique, d’autres formes d’exploitation sexuelle et de prostitution», a-t-elle fait remarquer. (apic/ibc/be)

16 mai 2010 | 15:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
Partagez!