Israël: Libéré, Mordechai Vanunu qualifie ses conditions de détention de cruelles et barbares

«J’ai souffert durant 18 ans parce j’étais chrétien, et pas juif»

Jérusalem, 21 avril 2004 (Apic) Mordechai Vanunu été libéré mercredi de la prison israélienne d’Ashkelon après 18 ans de prison. Qualifié de traître par une partie des Israéliens et de héros par d’autres pour avoir dévoilé le programme nucléaire secret israélien, l’ancien technicien du réacteur nucléaire de Dimona a qualifié ses conditions de détention de «cruelles et barbares». Il a déclaré avoir souffert durant 18 ans parce qu’il était chrétien, et pas juif. Vanunu a été baptisé dans l’Eglise anglicane.

«A tous ceux qui m’appellent un traître, je leur dis que je suis fier et heureux d’avoir fait ce que j’ai fait. Je suis prêt maintenant à commencer ma vie!», rapporte mercredi le quotidien israélien «Ha’aretz».

Son premier arrêt après sa libération de la prison d’ Ashkelon a été la cathédrale anglicane de St-George à Jérusalem, où il a été reçu à bras ouverts par l’évêque anglican Riah Abu El-Assal et d’autres membres du clergé, dont certains venus d’Angleterre, des Etats-Unis et d’Australie. A l’intérieur de l’église, Vanunu a reçu la communion. «C’est un chrétien anglican et il a exprimé son désir de remercier Dieu pour sa libération après sa sortie de prison et il l’a fait comme son premier acte d’homme libre», a déclaré l’évêque Abu El-Assal.

Le gouvernement israélien a toutefois imposé d’importantes restrictions à Mordechai Vanunu. L’homme qui avait révélé les détails du programme nucléaire israélien est sorti de prison le 21 avril, mais il n’aura pas le droit de quitter le pays, où il est considéré comme un traître et méprisé en raison de sa conversion au christianisme, rapporte l’agence de presse oecuménique ENI. Après sa libération, Mordechai Vanunu a déclaré avoir été traité durement, et avoir été placé en isolement total pendant 12 ans sur les 18 passés derrière les barreaux, parce qu’il avait abandonné le judaïsme pour devenir chrétien.

Baptisé dans l’Eglise anglicane en Australie

«Je veux dire à ceux qui me traitent de traître, a-t-il dit, que j’ai souffert ici pendant 18 ans parce que je suis chrétien. J’ai été baptisé comme chrétien. Si j’avais été un croyant juif, je n’aurais pas eu à endurer toute cette souffrance, cet isolement, juste parce que je suis un chrétien.» Mordechai Vanunu a été condamné pour trahison pour avoir donné des informations au journal britannique «Sunday Times» en 1986.

Mais l’homme qui avait raconté qu’Israël avait fabriqué plus de 200 bombes atomiques sur le site de Dimona ne sera pas pour autant un homme libre. Les autorités israéliennes ont décidé d’interdire à Mordechai Vanunu, un ancien technicien travaillant dans la centrale de recherche nucléaire ultrasecrète de Dimona, au sud du désert du Néguev, de quitter le pays pendant une année ou d’avoir des contacts avec des résidents étrangers sans autorisation préalable.

Eradiquer les armes de destruction massive du Moyen-Orient

Le Ministère de la justice israélien a affirmé dans une déclaration publiée le mardi 20 avril qu’il «existe un fort degré de probabilité que Mordechai Vanunu désire divulguer d’autres secrets, secrets qui n’ont pas été publiés auparavant». Alors que Mordechai Vanunu est salué par ses supporters à l’étranger comme «celui qui a tiré la sonnette d’alarme», celui qui voulait éradiquer les armes de destruction massive, son image est perçue de façon totalement différente dans son pays.

Les Israéliens, qui ont grandi entourés de pays arabes, ont une très grande confiance en l’armée pour la protection de leurs vies, et ils ne seront pas nombreux à protester contre les mesures prises concernant l’ancien technicien de la centrale de recherche nucléaire. Mordechai Vanunu a été désavoué par son père, un rabbin, après sa conversion au christianisme, alors qu’il vivait en Australie. Il était en effet parti en Australie après avoir quitté son poste à la centrale de recherche nucléaire et il avait été baptisé par Dave Smith, un prêtre anglican, à Sydney. Les deux étaient devenus très amis après avoir discuté de l’oeuvre du philosophe danois existentialiste chrétien du 19e siècle, Soren Kierkegaard. Le prêtre anglican lui a écrit tous les mois depuis son incarcération et il est parmi ceux qui se sont rendus en Israël pour rencontrer son vieil ami. (apic/eni/haar/be)

21 avril 2004 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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