Les lépreux obtiennent un dédommagement historique de l’Etat

Japon: Le Japon condamné pour sa politique à l’égard des lépreux

Tokyo, 11 mai 2001 (APIC) Plus d’une centaine d’anciens patients de léproseries publiques ont remporté vendredi une victoire historique contre l’Etat japonais, condamné à les dédommager pour les avoir enfermés dans des colonies isolées et avoir opéré des stérilisations et avortements sur certains.

La cour de Kumamoto au sud du Japon a reconnu les droits de 127 anciens patients qui demandaient chacun 115 millions de yens (935.000 USD) au gouvernement, même si elle a réduit les indemnisations versées, indique l’Agence France presse.

«Finalement, nous allons pouvoir être des êtres humains normaux», a commenté Yoshizo Tsutsumi, 70 ans, qui a passé une bonne partie de sa vie dans un sanatorium. Des applaudissements et des larmes ont salué le verdict dans l’enceinte du tribunal où des centaines de victimes, pour la plupart septuagénaires et octogénaires, étaient rassemblés.

Le tribunal qui statuait en première instance a ordonné au gouvernement de verser un total de 1,82 milliard de yens aux plaignants, soit en moyenne 14,33 millions de yens par personne. Ce jugement, le premier sur un total de trois plaintes déposées par plus de 700 patients, a permis aussi de lever le voile sur la douleur des anciens patients de léproserie qui ont souffert d’une discrimination systématique de la part de l’Etat nippon jusqu’à une période récente.

«En 1960 au plus tard, il était devenu évident que la loi stipulant l’isolement des patients était inconstitutionnelle», a remarqué le président du tribunal Masahi Sugiyama. «Le gouvernement de l’époque aurait dû abandonner sa politique d’isolement mais il a négligé de le faire jusqu’à l’abolition en 1996 de la Loi sur la prévention de la lèpre», a-t-il déploré. La lèpre a été reconnue au niveau international avant 1960 comme une maladie résultant de la transmission d’un virus très rare mais non contagieux. Des médicaments étaient en circulation dès les années 40 qui autorisaient une réintégration des lépreux dans la société.

Politique d’isolement

Cependant, le gouvernement japonais a maintenu sa politique d’isolement datant du début du siècle et conservé pendant plusieurs décennies une loi de 1953 autorisant la stérilisation des malades et des avortement forcés des femmes emprisonnées dans les sanatoriums nippons.

Selon des estimations officielles, 1’400 cas de stérilisations et 3’000 avortements ont été menés dans les centres répartis dans l’archipel. Beaucoup de patients des sanatoriums ne revirent jamais leurs familles, qui vivaient dans la peur d’être elles-mêmes mise à l’écart de la société et les restes de plus de 20’000 anciens lépreux ont été conservés. En 1955, le Japon allait renforcer sa politique d’isolement, en déplaçant 15’000 patients, soit plus de 91% des lépreux japonais dans plusieurs dizaines de léproseries, où certains étaient contraints à travailler.

Le gouvernement nie ses responsabilités affirmant que les mesures étaient basées sur les connaissances médicales disponibles à l’époque mais n’a pas encore décidé s’il fera appel du jugement de la Cour de Kumamoto. Le ministère de la Santé qui était en charge de la politique face à la lèpre a qualifié le verdict de «très sévère». On estime à 4’400 le nombre de personnes encore hébergées par 15 centres de traitement dans l’archipel. (apic/af/pr)

11 mai 2001 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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