Jean Winiger: «Après Zundel, je ne crois pas plus en Dieu, mais mieux»

«Tu as été trop vite sur cette phrase et tu me l’as fait hyper triste, ça ne va pas… et fais attention à l’intonation. Cette phrase, tu peux la dire en marchant». Attablés au milieu de la chapelle de l’Espace Maurice Zundel, entre la scène et l’autel, Lorianne Cherpillod et Jean Winiger passent en revue le filage de la pièce «Vers la joie d’exister», écrite par l’acteur sur Maurice Zundel.

Lorianne Cherpillod, actrice et metteuse en scène, dirige Jean Winiger dans ce ‘seul en scène’ que l’acteur a écrit sur Maurice Zundel à l’occasion des 50 ans de la mort du prêtre, en 1975. Jean Winiger acquiesce sans broncher aux remarques de la metteuse en scène et prend des notes. C’est leur sixième collaboration, le duo se connaît très bien. Lorianne Cherpillod a notamment travaillé avec Jean Winiger sur la pièce consacrée à Charles de Foucauld.

Le Fribourgeois à la voix rauque si caractéristique joue son rôle: celui d’un auteur et acteur à qui l’on a demandé d’écrire sur Maurice Zundel, mais qui n’y arrive pas. Le personnage prend donc des thèmes sur lesquels il interroge le prêtre: la science, l’intelligence artificielle, l’amour, la sexualité, le deuil, Dieu. Jean Winiger y a ajouté des éléments de la biographie de Zundel. «J’y ai mis de moi-même dans cette pièce», confie l’acteur.

«Le texte est très dense, il doit être joué d’une manière sensible et vraie», relève la metteuse en scène. Le travail sur la pièce a débuté en mars 2025, avec des sessions de lecture de deux ou trois jours. «Depuis début août, nous travaillons tous les jours», indique-t-elle.

Par moment, Jean Winiger incarne le prêtre. «Ses textes répondent aux questions existentielles que tout le monde se pose, y compris les jeunes. Zundel a utilisé les éléments de son temps pour y mettre de la spiritualité. Il faut que les jeunes entendent cette parole!» Le public aura l’occasion d’entendre Maurice Zundel, un acteur lisant des extraits de ses textes.

Un petit miracle

«Ce projet est arrivé comme un petit miracle», confie Jean Winiger qui ne connaissait rien de la vie du prêtre. Au moment où Maurice Zundel «entre dans sa vie», il est bouleversé car il vient de perdre une amie de longue date qui a fait recours au suicide assisté. Lors d’un dîner, un ami lui offre S’émerveiller (Ed. Cabedita), co-écrit par l’abbé Marc Donzé et le pasteur Virgile Rochat. L’abbé, spécialiste de Zundel, qui se souvient de la pièce que Jean Winiger a jouée sur Charles de Foucauld demande au Fribourgeois d’écrire une pièce.

L’acteur fribourgeois «dévore» l’ouvrage, le lit à haute voix – «Il faut que ça résonne!» – et se lance dans le travail d’écriture en juillet 2024, deux mois à peine après avoir reçu le livre. «Moi, ça me prend ou je ne fais pas!», lance l’acteur, entier. Il rédige quatre versions successives, qui ramènent le texte de 150 à 27 pages. Une amie critique le texte, que Jean Winiger retravaille encore. La sixième version est finalement approuvée par le comité de l’Association Maurice Zundel théâtre, créée pour l’occasion et chapeautée par la Fondation Maurice Zundel.

Jean Winiger complète son travail par des ouvrages que lui conseille l’abbé Donzé. Il parcourt également les tomes de l’anthologie que Marc Donzé a consacrée au prêtre neuchâtelois. L’acteur de 80 ans fait remarquer qu’il aurait pu croiser Maurice Zundel. «J’étais moniteur de colonies de vacances de la paroisse du Sacré-Cœur en 1963, alors que Maurice Zundel y était vicaire.»

Un peu plus d’un an après s’être lancé dans le projet, Jean Winiger assure «sentir» le message de Maurice Zundel. «Je peux traduire pour des amis en rogne contre l’éducation religieuse qu’ils ont reçue et contre ce Dieu qu’on leur a appris». A l’époque, déplore-t-il, lui et ses contemporains ont été «tenus» par un asservissement des consciences. «Il était impossible d’éclore vers Dieu.»

«Dieu nous libère, martèle l’acteur, à l’inverse de ce que l’on peut penser et qu’il soit là ou non, on peut dialoguer avec Jésus. Il est devenu un ami pour moi», clame l’acteur fribourgeois. A l’issue de ses études au collège St Michel de Fribourg, il a songé un temps à la vie religieuse. Un dominicain avisé l’a renvoyé à sa première vocation de comédien. «Après tout, l’acteur, comme le prêtre, parle au nom de …» Après plus d’un an de ce dialogue avec Maurice Zundel, Jean Winiger l’affirme: «je ne crois pas plus en Dieu, mais mieux» (cath.ch/bh)

«Vers la joie d’exister»: les 29, 30 août à 20h et 31 août à 17h, à l’Espace Maurice Zundel.
Bd de Grancy, 19 – 1006 Lausanne.
Entrée libre, chapeau à la sortie.
Réservations: association@maurice-zundel.ch
En tournée en 2025: Lausanne, Romont, Fribourg, Pully, Bex, Vevey.
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