Julienne de Cornillon, la sainte favorite de Liège, fêtée le 7 août
Le 7 août dernier, les Liégeois ont fêté au sanctuaire de sainte Julienne de Cornillon à Liège, l’une de leurs saintes favorites: Julienne de Cornillon, à qui l’on doit l’institution de la fête du Saint-Sacrement ou Fête-Dieu, qui fut introduite en Europe au XIIIe siècle, d’abord en 1246 dans le diocèse de Liège, en Belgique.
CathoBel, le site de l’Eglise catholique francophone de Belgique, nous fait mieux connaître l’histoire – plutôt mouvementée – de cette religieuse augustinienne.
Julienne de Cornillon, née en 1192 à Retinne, village près de Fléron, dans l’arrondissement de Liège, est une sainte de l’Eglise catholique célébrée le 5 avril, et plus spécifiquement en Belgique le 7 août. Julienne ainsi que sa sœur Agnès ne sont pas choyées longtemps par leurs parents, qui meurent alors que Julienne n’a que 5 ans. Les deux filles sont confiées aux soins des sœurs augustiniennes du couvent-léproserie du Mont-Cornillon. Julienne apprend vite à lire le latin grâce aux différents offices qui rythment la vie de cette communauté.
A l’école de saint Augustin et de saint Bernard
Devenue elle aussi moniale augustinienne, elle acquiert une culture considérable, au point de lire les œuvres des Pères de l’Eglise en latin, en particulier saint Augustin, et saint Bernard.
Outre sa vive intelligence, Julienne fait preuve d’une propension particulière pour la contemplation. Elle possède un sens profond de la présence du Christ, dont elle fait l’expérience en vivant de façon particulièrement intense le sacrement de l’Eucharistie et s’arrêtant souvent pour méditer sur les paroles de Jésus: «Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde» (Mt 28, 20).
La lune échancrée
A l’âge de seize ans, elle eut une première vision, qui se répéta ensuite plusieurs fois dans ses adorations eucharistiques. La vision présentait la lune dans toute sa splendeur, dont le diamètre était traversé par une bande noire.
En novembre 2010, lors d’une audience générale, Benoît XVI évoqua cet épisode ô combien symbolique de la vie de Julienne:
«Le Seigneur lui fit comprendre la signification de ce qui lui était apparu. La lune symbolisait la vie de l’Eglise sur terre, la ligne opaque représentait en revanche l’absence d’une fête liturgique, pour l’institution de laquelle il était demandé à Julienne de se prodiguer de façon efficace: c’est-à-dire une fête dans laquelle les croyants pouvaient adorer l’Eucharistie pour faire croître leur foi, avancer dans la pratique des vertus et réparer les offenses au Très Saint Sacrement».
L’Église catholique manque à ses yeux d’une fête dédiée à l’eucharistie
Grâce à l’aide d’Ève, une jeune fille avec qui elle se lie d’amitié, Julienne arrivera à comprendre après plusieurs années que cette fraction manquante représente l’absence d’une fête dans l’Église catholique, dédiée à l’eucharistie.
A la suite de cette image obsédante de lune échancrée, elle entreprend de composer un Office célébrant la présence du Christ dans l’Eucharistie. Julienne va alors se battre toute sa vie pour célébrer une nouvelle fête dédiée au Saint Sacrement.
Des épreuves à surmonter
«Le Seigneur demande souvent aux saints de surmonter des épreuves, pour que leur foi soit accrue», assura Benoît XVI, lors de cette même audience générale. «Cela arriva également à Julienne, qui dut subir la dure opposition de certains membres du clergé et du supérieur même dont dépendait son monastère».
Nommée prieure de Cornillon en 1222, Julienne est suspectée de fraude et de détourner l’argent du couvent-léproserie pour célébrer et promouvoir sa fête. Suite au saccage de sa maison, elle fuit Cornillon avec d’autres sœurs pour se réfugier dans diverses congrégations religieuses.
L’évêque de Liège de l’époque est favorable à l’idée défendue par Julienne
L’évêque de Liège de l’époque, Robert de Thourotte, est plutôt favorable à l’idée de fête défendue par Julienne et fait donc sa propre enquête sur la fraude. Il découvre alors l’agitateur à l’origine de cette action et instaure la règle de saint Augustin pour restaurer le calme dans la communauté du Mont-Cornillon.
Robert de Thourotte va même jusqu’à écrire un décret pour célébrer une messe avec des oraisons spécifiques, le jeudi après la fête de la Trinité. Malheureusement, il meurt avant la première célébration, ce qui fait tomber son décret dans l’oubli. D’autant plus que le nouvel évêque, Henri de Gueldre, se préoccupe davantage de faire la guerre que de s’occuper des malades avec la léproserie.
Le pape Urbain IV, ancien archidiacre de Liège
Apprenant cela, Hugues de Saint-Cher, légat du pape et favorable à l’idée de cette fête, décide de publier un édit pour rendre celle-ci obligatoire sous sa juridiction. Le pape Urbain IV, ancien archidiacre de Liège, est aussi séduit par cette fête. Il publie après la mort de Julienne une bulle pontificale pour rendre cette fête universelle et envoie le texte de la bulle à Ève, qui avait continué le combat de sainte Julienne après sa mort.
La fête souhaitée par Julienne de Cornillon en est aujourd’hui à sa… 779e édition !
À la fin de sa vie, sainte Julienne va fuir de monastère en couvent, formant une communauté de femmes autour d’elle, légitimant sa place dans l’Église. Très appréciée de ses sœurs cisterciennes, elle meurt en 1258 à Fosses-la-Ville mais est ensuite inhumée à l’Abbaye cistercienne de Villers-la-Ville, dans l’autel des saints.
La vie spirituelle de sainte Julienne de Cornillon
De la vie spirituelle de sainte Julienne de Cornillon, on peut retirer quatre fondements essentiels: le renoncement au confort du corps pour une union mystique avec le Christ, le renoncement du travail pour se tourner vers la prière, la science infuse car elle a une conscience directe des mystères de la foi, le refus d’un rôle subalterne pour jouer un rôle actif dans l’Église.
La fête souhaitée par Julienne de Cornillon est encore célébrée aujourd’hui: il s’agit de la Fête-Dieu, aussi appelée Fête du Saint-Sacrement. En juin dernier, Liège célébrait sa… 779e Fête-Dieu !
Le sanctuaire de sainte Julienne est animé par une communauté de sœurs clarisses
Aujourd’hui, le sanctuaire de sainte Julienne de Cornillon à Liège est animé par une communauté de sœurs clarisses qui assurent offices, adoration perpétuelle et messe. Il comprend également un atelier de fabrication d’hosties, un lieu d’hébergement pour pèlerins, une salle d’accueil et un béguinage contemporain hébergeant une quinzaine de personnes. Par le développement de ce béguinage, Liège a renoué avec une très ancienne pratique: la Cité ardente est en effet un des berceaux des béguinages, attestés dès 1173 et initiés par le prêtre liégeois Lambert le Bègue.
Ce site est ouvert au public chaque jour, offrant un cadre paisible pour la prière, la méditation ou la découverte du riche passé religieux de Liège. (cath.ch/cathobel/be)