Israël doit quitter les territoires occupés, déclare à
L’Intifada est entré dans sa troisième année (181289)
Genève le théologien juif de la libération, Marc Ellis
Genève, 18décembre(APIC) Le soulèvement de la population palestinienne
dans les territoires occupés, l’Intifada, est entré dans sa troisième année, puisqu’il a commencé le 9 décembre 1987. Tous les juifs ne sont pas
d’accord avec la manière dont le gouvernement d’Israël réprime ce mouvement, Tant dans le pays qu’à l’extérieur, on trouve des voix très critiques. L’une d’elles appartient au théologien juif Marc H. Ellis, professeur
d’étude de la religion, de la culture et de la société à l’Ecole de théologie Maryknoll dans l’Etat de New York. De passage récemment à Genève, il a
présenté son livre «Théologie juive de la libération» au Conseil oecuménique des Eglises (COE). Selon lui, l’occupation des territoires palestiniens
continuera aussi longtemps qu’Israël ne sera pas forcé à se retirer.
Le théologien nord-américain pose la question cardinale: «Le peuple juif
en Israël et les juifs dans le monde peuvent-ils être libérés sans que le
peuple palestinien soit libéré?» Et de répondre qu’il est en faveur d’un
Etat palestinien. «Car, relève-t-il, l’humiliation que les Israéliens infligent quotidiennement aux Palestiniens, (expropriation des terres, torture, assassinat et rupture des familles), trahit la tradition éthique des
juifs – et des chrétiens».
Selon les chiffres publiés ces jours par Betselem, un centre d’information israélien pour les droits de l’homme dans les territoires occupés,
l’Intifada a déjà coûté la vie à 616 Palestiniens, dont 131 de moins de 16
ans; de plus, 72 personnes, dont 30 bébés, sont morts après avoir inhalé
des gaz lacrymogènes. Du côté israélien, 19 personnes sont mortes, parmi
elles, 10 soldats. Le nombre de blessés est inconnu. En deux ans, 40’000
Palestiniens ont été arrêtés. 13’000 se trouvent encore et toujours en prison.
Marc H. Ellis explique ainsi le devenir d’une théologie juive de la libération. La théologie rabbinique, élaborée pendant des siècles, traitait
la souffrance du peuple juif sous Hitler comme toute autre souffrance. A
l’origine, rappelle-t-il, tant le judaïsme orthodoxe que le judaïsme réformé et le judaïsme sécularisé radical étaient fondamentalement opposés à la
fondation d’un Etat d’Israël. Ce n’est que depuis 20 ans que le judaïsme
orthodoxe s’est rallié.
A la même époque, poursuit le théologien, est apparue la théologie de
l’holocauste, qui affirme: «Après 1939-45, nous ne pouvons plus compter sur
les chrétiens pour une autre survie; nous avons failli disparaître. Donc le
peuple juif doit avoir un pouvoir temporel. Selon les théologiens de l’holocauste, toute affirmation doit être valable en présence d’un enfant qui
brûle».
Peu à peu, regrette Marc Ellis, la théologie de l’holocauste est devenue
la justification de la prise de pouvoir par les juifs, elle a oublié ses
origines et sa dimension critique. «Et aujourd’hui, accuse-t-il, Israël humilie un peuple – les Palestiniens – de la même manière qu’il a été humilié».
La seule manière de sortir de cette contradiction, aux yeux du théologien de la libération, est la solidarité. «Si nous sommes solidaires avec
les Palestiniens, nous devons faire face au fait que nous avons abusé de
notre pouvoir». Au Moyen-Orient, ajoute-t-il, «il n’y a qu’un partenaire
qui nous permettra de sortir du sentiment de l’isolement, d’abandon, de cynisme: c’est le peuple palestinien».
Et Marc Ellis de conclure: «Les Palestiniens sont aussi intimement liés
à notre histoire que les juifs sont liés à l’histoire de la chrétienté».
(apic/spi/pr)