La doctrine de la petite Thérèse a longtemps été «réduite»
Rome: Polémique autour d’un ouvrage sur Thérèse de Lisieux
Rome, 12 décembre 2012 (Apic) Un ouvrage paru récemment sur la vraie doctrine de sainte Thérèse de Lisieux (1873-1897) a soulevé la polémique dans la presse italienne. Ses écrits auraient été manipulés à sa mort par ses sœurs de chair et en religion. Interpellé par l’agence I.MEDIA, le Père carme François-Marie Léthel reconnaît que la doctrine de la sainte a été «réduite» pendant longtemps.
Dans un ouvrage paru à la mi-novembre en Italie, Gianni Gennari, ancien prêtre romain désormais journaliste, fait le point sur le chemin parcouru entre la mort de sainte Thérèse de Lisieux et la publication de ses Œuvres complètes en 1992. Il met l’accent sur les difficultés rencontrées pour dégager sa vraie doctrine, à cause des très nombreuses modifications apportées à ses écrits par ses propres sœurs.
Ne pas réduire Thérèse à «l’enfance spirituelle»
Dans «Thérèse de Lisieux, le charme de la sainteté – Les secrets d’une doctriné retrouvée» (Editions Lindau), Gianni Gennari raconte les «évènements dramatiques» qu’a dû affronter le Père André Combes, chercheur en histoire de la théologie, pour dévoiler la véritable doctrine de Thérèse Martin, réduite par ses propres consœurs à une spiritualité de «l’enfance spirituelle» uniquement.
Les sœurs du couvent de Lisieux voulaient faire de Thérèse la réalisation parfaite de ce que leur avait enseigné le Père spirituel de la famille Martin, le jésuite Almire Pichon, qui n’était pas celui de la sainte. L’image présentée par sa famille a même réussi à convaincre plusieurs souverains pontifes, avant que toute la lumière ne soit faite sur ses écrits.
Si cet aspect est le plus connu de la doctrine de Thérèse de Lisieux, canonisée en 1925 par Pie XI (1922-1939) et proclamée docteur de l’Eglise en 1997 par Jean Paul II, Gianni Gennari souligne que l’enfance spirituelle thérésienne a longtemps été mal interprétée.
Une polémique «exagérée»
La presse italienne a parlé de ’Théréleaks’, en référence aux ’Vatileaks’ qui ont récemment secoué le Vatican. Plus circonspect, le Père Léthel, professeur de théologie spirituelle au Teresianum de Rome et secrétaire de l’Académie pontificale de théologie, y voit une polémique sans doute «exagérée».
«Il est bien connu que les sœurs de la sainte, mues sans aucun doute par de bonnes intentions, ont apporté des modifications considérables à ses nombreux écrits», explique le carme français. Ce qui explique pourquoi l’Histoire d’une âme n’a été publiée qu’en 1956, et qu’il a fallu attendre 1992 pour la publication des Œuvres complètes, grâce au travail critique de spécialistes de la sainte et particulièrement du Père carme François de Sainte-Marie. Les Œuvres complètes regroupent les trois manuscrits autobiographiques de l’Histoire d’une âme, la correspondance de Thérèse, ses poésies et des petites pièces de théâtre.
Le Père Léthel évoque une spiritualité très vaste. Thérèse est certes enfant spirituel. Mais elle est aussi «épouse, mère et sœur», souligne-t-il, et ’experte’ en «amour sponsal, maternel, filial et fraternel». A ses yeux, Thérèse épouse et mère prédomine, et non pas l’enfant.
Une interprétation complexe
L’interprétation des écrits de la sainte est un sujet complexe. Réduire sa doctrine a quelque chose «d’infantilisant», poursuit le Père Léthel. Cela confine à l’idéologie, celle d’infantiliser les chrétiens et surtout «les religieuses dans leurs couvents».
L’ouvrage «Thérèse de Lisieux, le charme de la sainteté – Les secrets d’une doctriné retrouvée» sera présenté le 19 décembre prochain à Rome, par le cardinal Francesco Coccopalmerio, président du Conseil pontifical pour les textes législatifs. Ce travail historique retrace les nombreux obstacles rencontrés avant de parvenir à la publication des véritables écrits de l’une des saintes les plus importantes de l’Eglise catholique. (apic/imedia/mm/ggc)