La loi «antiburqa» très peu appliquée
L’interdiction de se dissimuler le visage, entrée en vigueur le 1er janvier 2025, n’a mené qu’à très peu de contraventions, selon une enquête du Matin Dimanche. À Zurich, une intervention parlementaire cherche à savoir si les exceptions liées aux masques hygiéniques servent à contourner la loi.
Trois contraventions enregistrées à Genève, aucune dans le canton de Vaud, des retours plutôt flous d’autres cantons. L’enquête du Matin Dimanche sur le bilan de la nouvelle législation, publiée le 20 juillet 2025, arrive à la conclusion qu’elle n’a eu que peu d’effets concrets.
L’initiative lancée par les milieux conservateurs en Suisse a été largement soutenue par l’UDC et par certains membres d’autres partis. Elle a été approuvée par le peuple le 7 mars 2021. La campagne avait suscité une vaste polémique, certains accusant les initiants de vouloir stigmatiser les musulmans, d’où le surnom de «loi antiburqa». Si le voile intégral islamique est effectivement visé, il en est de même pour toute personne qui se dissimulerait le visage, notamment lors d’une manifestation. Sont exemptées les personnes portant des masques pour des questions d’hygiène. Les chiffres rapportés par les police ne permettent pas de savoir si les contraventions concernaient des femmes musulmanes ou des personnes encagoulées.
Stigmatisation de l’islam ou préservation des valeurs chrétiennes?
Les opposants à l’initiative avaient argumenté de l’inutilité de légiférer sur des phénomènes perçus comme marginaux. Mais les partisans ont mis en avant l’aspect de principe. «Aussi bien la majorité de la population que celle des cantons a voté en faveur de cette initiative pour préserver nos valeurs judéo-chrétiennes», explique notamment Jacqueline de Quattro (PLR/VD), qui a soutenu le texte. «Ce que ces chiffres montrent, c’est que l’UDC et ses alliés ont réussi à en faire des tonnes avec une initiative dont on savait dès le départ qu’elle ne résoudrait rien», réagit de son côté Jean Tschopp (PS/VD).
Effet dissuasif?
Deux cantons suisses, le Tessin et Saint-Gall ont passé leur propre législation à ce sujet, respectivement en 2016 et 2019. Saint-Gall indique n’avoir jamais infligé aucune amende dans ce domaine. Les chiffres du Tessin pourraient indiquer un effet dissuasif. Au sud des Alpes, 60 contraventions ont été délivrées entre 2016 et 2020. Mais depuis cette date, le Département des institutions n’a plus reçu d’informations de la part des polices municipales en rapport à cela.
Le canton de Zurich enregistrait quatre amendes en avril. Mais les chiffres actualisés sont indisponibles, une intervention parlementaire étant en cours sur le sujet. Les deux élus UDC qui l’ont déposée veulent savoir comment l’interdiction de se dissimuler le visage est appliquée, et si certaines personnes utilisent des masques d’hygiène pour la contourner. (cath.ch/matindimanche/arch/rz)