Brésil: Le théologien de la libération Leonardo Boff fête samedi ses 75 ans

Lassé de la confrontation avec Rome, il avait quitté le sacerdoce en 1992

Petropolis, 13 décembre 2013 (Apic) Petit-fils d’immigrés italiens, né en 1938 à Concordia, dans l’Etat de Santa Catarina, au Sud du Brésil, Leonardo Boff est une figure de proue de la théologie de la libération latino-américaine. Il fête son 75e anniversaire samedi 14 décembre 2013 dans sa ville de Petropolis, près de Rio de Janeiro. Ses quelque 60 ouvrages ont été traduits dans de nombreuses langues.

Théologien sanctionné par Rome, Leonardo Boff, qui a quitté l’ordre des Franciscains et s’est marié, a reçu en 2001 le Prix Nobel alternatif à Stockholm.

Quittant son ordre religieux en 1992, il expliquait dans une lettre ouverte «aux compagnons et compagnes de notre marche commune vers l’espérance» qu’il n’abandonnait pas, mais changeait de tranchée. «J’abandonne le ministère sacerdotal, mais je reste dans l’Eglise. Je m’éloigne de l’ordre des Franciscains mais pas du songe, tendre et fraternel, de saint François d’Assise. Je continue et je serai toujours un théologien dans la matrice catholique et œcuménique (…) Je sors pour maintenir ma liberté de travail qui a été grandement entravée. Ce travail est la raison de ma lutte depuis vingt-cinq ans».

Avec le pape François, le ton change radicalement

A l’occasion de la visite du pape François au Brésil en juillet dernier, le théologien de la libération et de l’écologie, dans une interview accordée à l’Apic, a fait l’éloge du nouvel évêque de Rome. Leonardo Boff a dit considérer le pape François, un Latino-américain comme lui, comme un homme «libre d’esprit», à qui il attribue certaines vertus de François d’Assise. Et de souligner son «splendide sauvetage de la raison cordiale». Pour Boff, le nouveau pontife est «une figure fascinante qui atteint le cœur des chrétiens et d’autres personnes».

Le pape présente une «vision humaniste de la politique, de l’économie, de l’éradication de la pauvreté. Il a critiqué durement le système financier… il a défini la démocratie comme ‘humilité sociale’, il a revendiqué le droit des jeunes à être écoutés», énumère Boff. Et de souligner l’apport du pontife sur la question de l’éthique, «fondée sur la dignité transcendante de la personne», exprimée ainsi dans un «discours récurrent».

Encadré

Biographie

Leonardo Boff naît en 1938 dans une famille de onze enfants à Concordia, dans l’Etat de Santa Catarina, au Sud du Brésil. Ses grands-parents, «réfugiés économiques» comme des dizaines de milliers de leurs compatriotes d’Italie du Nord, émigrent du Tyrol du Sud vers le Nouveau Monde. La mère de Leonardo a été toute sa vie analphabète. A vingt ans, Leonardo Boff entre dans l’ordre des Franciscains. Après ses études au Brésil puis en Allemagne – il obtient son doctorat en théologie systématique à Munich et y rencontre Joseph Ratzinger, qui deviendra préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, puis le pape Benoît XVI. Après son ordination sacerdotale, il rentre au Brésil en 1970. Il enseigne alors à l’Institut théologique franciscain de Petropolis, près de Rio de Janeiro, et devient l’un des principaux théologiens de la libération du tiers monde.

Auteur d’une soixantaine d’ouvrages, il fut conseiller de la Conférence nationale des évêques du Brésil (CNBB). Il est ensuite interdit de prédication et d’enseignement dans les Facultés catholiques par la Congrégation romaine pour la doctrine de la foi dans les années 1980 suite, notamment, à la publication de son ouvrage «Eglise: charisme et pouvoir» (1981). Rome lui reprochait plus particulièrement d’être trop proche du marxisme. Il quitte alors le sacerdoce et les Franciscains, se marie avec Marcia Monteiro da Silva Miranda, et s’engage à Petropolis dans le Service d’organisation populaire d’aide aux mères et aux enfants des rues.

A partir des années 1990, Leonardo Boff s’intéressera de plus en plus aux questions écologiques, dans un esprit franciscain, et dans la perspective d’une critique radicale du système capitaliste. Il publiera alors son livre «Dignitas Terrae. Ecologie: cri de la Terre, cri des pauvres», en 1995, et de nombreux autres essais philosophiques, éthiques et théologiques. Interviewé par l’Apic, lors de son passage à Fribourg en octobre 2008, le théologien brésilien soulignait qu’il se situait totalement dans la tradition spirituelle de saint François, le «poverello» d’Assise. (apic/be)

13 décembre 2013 | 15:33
par webmaster@kath.ch
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