Le «bébé médicament» au centre de graves questions éthiques
Rome: L’enfant n’est pas une réserve potentielle de matériel biologique, prévient Mgr Laffitte
Rome, 9 février 2011 (Apic) Après l’annonce de la naissance, en France, du premier «bébé médicament» visant à soigner l’un de ses aînés, le secrétaire du Conseil pontifical pour la famille a estimé mercredi 9 février qu’un enfant ne peut être considéré comme «une réserve potentielle de matériel biologique».
Questionné par l’agence de presse I.MEDIA à Rome le 9 février 2011, Mgr Jean Laffitte déplore la sélection qui pousse à choisir «l’embryon le plus parfait» et s’interroge sur l’impact psychologique de cette démarche scientifique sur les enfants choisis pour être des «bébés médicaments».
«Un enfant n’est pas une réserve potentielle de matériel biologique», explique l’ancien vice-président de l’Académie pontificale pour la vie. «Je ne vois pas pourquoi on pourrait disposer du corps d’un petit enfant qui n’a pas l’âge de raison pour prélever sur lui un matériau biologique en vue de le donner pour une cause thérapeutique», poursuit Mgr Laffitte avant de s’interroger sur les conséquences à venir d’une telle démarche scientifique.
«Si cette technique se développe, prévient ainsi le prélat français, on peut imaginer qu’il y aura deux classes d’hommes, des hommes nés libres de tout engagement vis-à-vis de la société, et ceux qui seront nés en vue d’un but d’aide aux autres, qui leur aura été imposé et mis sur les épaules». «Si on a un jour des centaines milliers de ’bébés médicaments’, demande-t-il alors, que se passera-t-il lorsque l’utilisation du matériau donné par ces enfants ne parviendra pas à ses fins ?»
Un poids lourd à porter
«Sur le plan personnel et de la formation de son identité psychologique, on met sur les épaules de cet enfant un poids qu’il ne pourra peut-être pas supporter lorsqu’il sera adulte», prévient encore Mgr Laffitte. Pour le prélat français, cet enfant ne pourra pas supporter l’idée d’avoir été mis au monde dans un but utilitaire.
Le secrétaire du Conseil pontifical pour la famille note par ailleurs que la production d’un bébé destiné dès le départ à devenir un «bébé médicament» suppose l’utilisation de techniques qui visent à la destruction d’autres embryons. A ses yeux, le procédé de sélection des «bébés médicaments» se fait par une sélection qui est encore plus terrible et plus grave que dans le cas des fécondations où il y a toujours 3 ou 4 embryons au moins qui ne sont pas utilisés car, dans ce cas, «on est toujours tenté d’attendre l’embryon le plus parfait».
S’il juge que le but de cette réussite scientifique est «louable», Mgr Jean Laffitte estime enfin qu’elle ne peut se faire «à ce prix-là».
Le 8 février, l’hôpital Antoine Béclère de Clamart, près de Paris, a annoncé avoir donné naissance, quelques semaines plus tôt, au premier «bébé médicament». L’enfant issu de la conception in vitro d’un embryon sélectionné après un double diagnostic préimplantatoire, un embryon non porteur de maladie génétique, devient un donneur compatible pour soigner un frère ou une soeur aînés.
Autorisé par la loi de bioéthique de 2004, à titre expérimental, le «bébé médicament» nécessite un double tri d’embryons. Il faut d’abord éliminer les embryons porteurs de l’affection dont souffre le grand frère ou la grande soeur à soigner. Ensuite, dans le stock d’embryons sains, un deuxième tri est effectué qui permet de ne garder que des embryons compatibles pour la greffe envisagée. (apic/imedia/ami/be)