Le cardinal Marc Ouellet a été préfet du dicastère pour les Evêques de 2010 à 2023  | © Catholic Church of England/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0
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Le cardinal Ouellet doit payer plus de 100’000 euros à une religieuse

Le tribunal judiciaire de Lorient (Bretagne) a condamné le 3 avril 2024 en première instance le cardinal Marc Ouellet, préfet émérite du dicastère pour les Évêques, à payer plus de 100’000 euros de dommages et intérêts à Sœur Marie Ferréol. L’ancienne membre des dominicaines du Saint-Esprit de Pontcallec (Morbihan) avait porté plainte après avoir été renvoyée de sa congrégation en 2020.

Le renvoi définitif de la vie religieuse de Sœur Marie Ferréol – née Sabine Baudin de la Valette –, à l’issue d’une enquête canonique diligentée par le cardinal québécois Marc Ouellet, avait créé la polémique. En décembre 2021, le pape François avait d’ailleurs pris la plume pour clarifier un certain nombre d’éléments concernant cet institut traditionaliste fondé à Pontcallec en 1943, qui compte aujourd’hui une centaine de sœurs et qui dirige cinq établissements scolaires hors-contrat en France. Le pape écrivait avoir suivi de «très près» la situation de l’institut.

Plus de 200’000 euros à payer

Sabine Baudin de la Valette avait intenté une action en justice, sa défense dénonçant un renvoi «sans motif, sans possibilité de se défendre, dans des conditions dures et vexatoires», après 34 ans de vie consacrée. Plus de trois ans après son renvoi, le tribunal breton a statué, dans un jugement consulté par l’agence I.MEDIA. Le cardinal Ouellet, la communauté de Pontcallec et les deux visiteurs apostoliques, le bénédictin Jean-Charles Nault et la cistercienne Maylis Desjobert, sont condamnés à payer à la sœur 182’400 euros au titre de son préjudice matériel, 10’000 euros au titre de son préjudice moral, et 10’000 euros au titre des frais du procès. Selon la décision de justice, le cardinal Ouellet devra assumer la majorité de ces montants, soit plus de 100’000 euros.

Problème d’impartialité?

Les juges français reprochent notamment au cardinal «un abus de droit», estimant qu’il aurait pu agir sans mandat spécial du pape, dans un domaine qui ne relevait pas de sa compétence. Le cardinal était à l’époque préfet du dicastère pour les Évêques – poste qu’il a quitté en janvier 2023 – et n’avait pas juridiction sur les instituts religieux.

Le tribunal met aussi en cause son «absence d’impartialité», en sa qualité «d’ami proche d’une des sœurs de l’institut des dominicaines du Saint Esprit, Sœur Marie de l’Assomption [Emilie d’Arvieux], dont les positions étaient notoirement opposées à celles de Mme Baudin de la Valette».

Enfin, le tribunal relève le manque de fondement des motifs exprimés par le prélat pour justifier «la lourdeur des sanctions prononcées, au surplus sans respect du droit canonique et des droits fondamentaux de la personne».

Une décision contestée par les dominicaines du Saint-Esprit

Dans un communiqué publié par les dominicaines du Saint-Esprit, les religieuses assurent que le cardinal Ouellet avait bien été mandaté «spécialement par le Saint-Père» et que la décision du renvoi a «été prise par le Souverain pontife à la suite de la visite apostolique» menée par les visiteurs apostoliques. Condamnée elle aussi, pour «non-respect de la procédure de renvoi» et «non-respect du devoir de secours», la communauté annonce faire appel de cette décision de justice.

«Cette procédure d’appel va permettre de mettre en lumière les nombreuses erreurs de fait et de droit commises par le premier juge dans un contexte très médiatisé par Sabine Baudin de la Valette», écrivent les religieuses. De son côté, la défense de Sabine Baudin de la Valette, maître Adeline Le Gouvello, salue «un pas important pour la vérité et, espérons-le, pour l’Église elle-même, afin que, dans la gestion des abus, soient aussi pris en compte les abus de pouvoir». (cath.ch/imedia/ak/hl/rz)

Le cardinal Marc Ouellet a été préfet du dicastère pour les Evêques de 2010 à 2023 | © Catholic Church of England/Flickr/CC BY-NC-ND 2.0
4 avril 2024 | 10:46
par I.MEDIA
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