Le pape François salue les fidèles  | © Bernard Hallet.
Vatican

Le pape n'est plus le «Vicaire de Jésus-Christ»

Dans son édition 2020, l’»Annuario Pontifio», l’annuaire du Vatican publié chaque année avec toutes les informations sur la hiérarchie de l’Eglise catholique, laisse tomber la désignation du pape comme «Vicaire de Jésus-Christ». Cette mention est reléguée comme «titre historique» dans une note de bas de page. Pour le cardinal Gerhard Ludwig Müller, il s’agit là de rien moins qu’une «barbarie théologique».

Jusqu’à présent, cette page consacrée au pape, qui précède les sections sur le collège des cardinaux, les évêques du monde et les dicastères du Vatican, était publiée sous la mention «Vicaire de Jésus-Christ», rappelle l’hebdomadaire catholique allemand Tagespost. Suivaient ensuite ses autres titres: Successeur du Prince des Apôtres, Souverain Pontife de l’Église universelle, Primat d’Italie, Archevêque et Métropolite de la Province romaine, Souverain de l’État de la Cité du Vatican, Serviteur des Serviteurs de Dieu. Dans l’édition 2020 figure seulement à leur place le nom «Jorge Mario Bergoglio». Les titres du pape sont relégués dans une note historique en bas de page.

«Une barbarie théologique saluée par les hypocrites»

Les utilisateurs de l’Annuaire pontifical ont immédiatement compris qu’un tel changement n’avait pu se produire qu’à l’instigation de François lui-même désireux d’éviter une mauvaise compréhension de sa fonction.

Si certains y ont vu un geste d’humilité, le cardinal Gerhard Ludwig Müller, ancien préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, dénonce, dans le Tagespost, une «barbarie théologique». En effet selon lui, le titre de «Vicaire de Jésus-Christ» a clairement une signification dogmatique. Il découle directement des évangiles, dans lesquels Jésus a donné à Pierre l’autorité dans l’Eglise. «Ce n’est qu’avec beaucoup d’humour et d’ironie que l’on peut supporter le dilettantisme théologique des statisticiens», déplore le prélat, même si «ce changement devrait à nouveau être salué par les intéressés pleins d’hypocrisie comme un signe de grande humilité».

Ne pas mélanger le dogme et l’histoire

Les définitions de la nature de la primauté papale sont déclassées comme de simples «titres historiques» sous les données biographiques de l’actuel titulaire du ministère de Pierre, se désole le cardinal Müller.

Ils sont également mélangés à des titres qui n’ont qu’une simple signification historique, comme «Souverain de l’Etat du Vatican». Quant à la désignation «Serviteur des Serviteurs de Dieu», qui remonte à Grégoire le Grand (590-604) , elle a voulu exprimer historiquement le caractère de service de l’office apostolique contre les prétentions au pouvoir du «Patriarche œcuménique de Constantinople». «Car celui qui voudra être le premier parmi vous sera le serviteur de tous» selon la parole de Jésus (Mc 10,43).

Même le titre d’évêque de Rome n’a pas de signification dogmatique. Jésus n’a pas nommé Simon-Pierre évêque de Rome, mais il l’a désigné mais comme chef des apôtres. C’est le fait qu’il a ensuite subi le martyre à Rome, qui a transféré sa primauté à l’Eglise romaine. L’évêque de l’Eglise de Rome fondée par Pierre et Paul est également le successeur de saint Pierre, explique le cardinal Müller.

La primauté du pape selon Vatican II

Un regard sur les textes du Concile Vatican II concernant la doctrine sur le pape en tant que pasteur suprême de l’Eglise aurait sauvé les rédacteurs de l’»Annuario Pontificio» 2020, relève le prélat allemand. Lumen Gentium 18 parle des «évêques, successeurs des Apôtres qui, avec le successeur de Pierre, vicaire du Christ, et chef visible de toute l’Eglise, ont charge de diriger la maison du Dieu vivant.»

C’est de la barbarie théologique que de dévaloriser ces titres du pape comme un simple lest historique. S’ils ont en effet grandi historiquement, ils évoquent des éléments essentiels de la primauté pétrinienne, qui remonte à l’institution du Christ. Il s’agit donc d’une loi divine et non seulement humano-ecclésiale, affirme le cardinal. Avant de conclure: «Les catholiques ont le droit, enraciné dans la foi divine et catholique, de comprendre la papauté en général et aujourd’hui le pontificat du pape François à la lumière du Concile Vatican II». (cath.ch/mp)  

Le pape François salue les fidèles | © Bernard Hallet.
3 avril 2020 | 15:23
par Maurice Page
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