Les Arméniens évacuent le monastère de Dadivank, que les Azerbaïdjanais appellent un "temple albanais" © Jacques Berset
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Le Vatican accusé d’être sous l’influence de l’argent de l'Azerbaïdjan

Le Vatican a reçu des fonds importants de l’Azerbaïdjan pour restaurer des lieux saints à Rome et en Europe. Les liens financiers croissants entre le Vatican et l’Azerbaïdjan font grincer des dents, l’Azerbaïdjan visant à utiliser ses richesses pétrolières pour détourner les critiques concernant ses violations des droits humains et de la liberté religieuse, note l’agence états-unienne Religion News Service (RNS). 

Selon le «Projet de journalisme d’investigation Italie (IRPI)», l’Azerbaïdjan a dépensé environ 640’000 euros pour restaurer des catacombes appartenant au Vatican (dont récemment les catacombes de Saint-Calixte), des chefs-d’œuvre des musées du Vatican et de nombreux livres et manuscrits de la bibliothèque du Vatican. L’Azerbaïdjan a également financé la restauration d’un bas-relief ornant la basilique Saint-Pierre.

L’argent de la Fondation Heydar Aliyev

«La Fondation Heydar Aliyev a achevé les travaux de restauration du bas-relief ›Rencontre entre le pape Léon Ier le Grand et Atilla, empereur des Huns’ à la Basilique Saint-Pierre de Rome. Le projet a été mis en œuvre dans le cadre d’un accord signé en février 2019 entre la Fondation et la Basilique Saint-Pierre », rapporte l’Agence de presse d’Etat d’Azerbaïdjan (AZERTAC), citant la Fondation Gaydar Aliev, du nom de l’ancien président de la République d’Azerbaïdjan.

Des militants arméniens continuent de tirer la sonnette d’alarme concernant les liens financiers croissants entre le Vatican et l’Azerbaïdjan. Ils affirment que cette relation s’inscrit dans le cadre d’une stratégie d’influence de l’Azerbaïdjan. «Ils utilisent leurs dons et leur argent au Vatican pour blanchir ce qu’ils ont fait, pour blanchir la destruction du patrimoine arménien, pour blanchir le nettoyage ethnique qu’ils ont commis», a déclaré Stephan Pechdimaldji, un stratège en communication arméno-américain.  

Accusé de détourner le regard sur les violations de la liberté religieuse

Pechdimaldji a déclaré que de nombreux Arméniens, y compris ceux de la diaspora, ressentent de la «déception» face à l’acceptation par le Vatican des dons de l’Azerbaïdjan. «Ils font ce que d’autres pays ont fait: fermer les yeux à cause des ressources de l’Azerbaïdjan», a-t-il lancé, en rappelant le destin des Arméniens du Haut Karabakh, victimes d’une épuration ethnique totale.


Le monastère de Gandzasar, près de Martakert, au Haut-Karabakh – lieu historique de l’Eglise apostolique arménienne | © Jacques Berset

En 2023, l’Azerbaïdjan a lancé une offensive militaire et pris le contrôle du Haut Karabakh, région montagneuse située sur le territoire azerbaïdjanais mais peuplée depuis de siècles par une population arménienne et azérie. Bakou a déplacé de force en quelque jours plus de 100’000 Arméniens et a détruit un certain nombre de sites chrétiens, notamment des églises et des cimetières. Les autorités azerbaïdjanaises ont fait croire que certains sites chrétiens arméniens, tels que le monastère de Gandzasar, étaient des exemples du «patrimoine albanais du Caucase» et ont accusé l’Arménie de falsifier les inscriptions historiques. Ces allégations ont été contestées tant par les représentants arméniens que par ceux de l’UNESCO.

L’UNESCO a fermé les yeux sur la destruction du patrimoine arménien

Des voix arméniennes déplorent par ailleurs que l’UNESCO ait fermé les yeux sur la destruction du patrimoine arménien au Nakhitchevan en 2005 et au Haut-Karabakh (Artsakh pour les Arméniens) en 2020.

Alors que la déclaration signée le 8 août 2025 par le président de la République d’Azerbaïdjan et le Premier ministre de la République d’Arménie sur la «Route Trump pour la Paix et la Prospérité internationale», qui doit relier l’Azerbaïdjan à son exclave du Nakhitchevan via la région de Syunik, au sud de l’Arménie, est saluée un peu partout, elle est loin de faire l’unanimité en Arménie. Les Arméniens rappellent que les autorités azerbaïdjanaises ont procédé à la destruction systématique des monastères, églises et cimetières arméniens de la région du Nakhitchevan, surtout la destruction du cimetière de Jugha (Julfa) et de ses 10’000 khatchkars médiévaux en 2005. (cath.ch/rns/be)

Les Arméniens évacuent le monastère de Dadivank, que les Azerbaïdjanais appellent un «temple albanais» © Jacques Berset
10 août 2025 | 12:25
par Jacques Berset
Temps de lecture : env. 3  min.
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