L'église orthodoxe russe de la Sainte-Trinité, à Phuket, en Thaïlande |www.orthodox.or.th
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L’Église orthodoxe en Thaïlande mêle Russes et Ukrainiens

Depuis le début de la guerre en Ukraine, la petite Église orthodoxe de Thaïlande, a ouvert ses portes à des familles ukrainiennes ayant fui le conflit, mais aussi à des touristes russes coincés en Thaïlande, sans vol de retour ni carte de crédit. Leur cohabitation se passe bien.

L’Église orthodoxe en Thaïlande ne fait pas de différence entre les gens. Ukrainiens et Russes ne forment qu’une seule grande communauté orthodoxe, ont indiqué ses responsables à Eglises d’Asie.

L’église orthodoxe de la Sainte-Trinité, au nord de l’île de Phuket, est un beau bâtiment aux murs vert pomme surmontés de trois dômes dorés, que les Thaïlandais des environs appellent «la mosquée». Depuis le début du conflit en Ukraine, l’archimandrite Oleg Cherepanin, chef de l’Église orthodoxe en Thaïlande, a ouvert les portes de ses lieux de culte aux familles ukrainiennes touchées par le conflit, ainsi qu’aux touristes russes bloqués dans le pays.

«On préfère ne pas rentrer en Ukraine pour le moment»

Derrière l’église, des chambres et des bureaux accueillent plusieurs familles ukrainiennes, originaires de Kiev et de Kharkiv, dont les logements ont disparu dans des bombardements. «Sans appartement, sans travail, avec la guerre qui fait rage, on préfère ne pas rentrer pour le moment», explique une mère de famille. «Ici, au moins, les enfants sont en sécurité.» 

Dans la chambre voisine, réside Nikita, un touriste russe originaire d’Irkousk: «Mon billet de retour a été annulé du jour au lendemain», raconte-t-il. «Mais la compagnie aérienne ne m’a pas remboursé, et je n’ai pas assez d’argent pour en acheter un nouveau. Au début, je pensais que l’ambassade allait m’aider, mais ils m’ont conseillé de plutôt me tourner vers l’Église.»

L’église orthodoxe de la Sainte-Trinité, à Phuket, en Thaïlande accueille Russes et Ukrainiens | www.orthodox.or.th

Les sanctions européennes à l’égard de plusieurs banques russes, déconnectées du système de paiement international, ont empiré la situation des touristes russes, désormais incapables de payer pour leurs chambres d’hôtel ou leurs besoins de première nécessité. Hébergé depuis un mois, Nikita, qui n’était jusqu’ici pas spécialement pratiquant, effectue des menus travaux d’électricité ou de jardinage autour de l’église et ne rate aucune des célébrations religieuses quotidiennes.

Un prêtre ukrainien, le Père Roman, du diocèse de Kiev, est aussi hébergé par l’Église en attendant une amélioration de la situation: «J’espère pouvoir rentrer au plus vite auprès de mes paroissiens, ils ont besoin d’espoir.»

Partage de la Divine liturgie

Le dimanche, une cinquantaine de personnes sont présentes pour la Divine liturgie. Les deux prêtres, russe et ukrainien, chantent et célèbrent ensemble. Les fidèles, Russes en majorité, mais aussi Ukrainiens, Kazakhs et Ouzbèques, prient pour leurs proches, leurs familles et pour l’arrêt de la guerre… ou même pour la santé de Vladimir Poutine.

Le parti pris dans la communauté est d’éviter de discuter de la guerre qui fait rage: »C’est trop douloureux, ça ne sert à rien d’en débattre, cela risque de diviser la communauté», estime le Père Oleg. «En tant que croyants, nous devons aider, pas débattre.» Des collectes d’argent et de denrées non-périssables sont effectuées et envoyées chaque semaine en Ukraine de la part de la communauté russe de Phuket, via le réseau de contacts personnels des paroissiens.

«Nous sommes tous frères et soeurs»

Après la liturgie, un petit groupe se rassemble pour déjeuner dans l’appartement du Père Oleg. La guerre n’est évoquée qu’à contrecœur: «On a du mal à comprendre comment c’est possible», se désole Janna Sviritoka, directrice d’une agence immobilière. »Mon assistante est ukrainienne, j’ai plein d’amis ukrainiens ici, nous sommes comme frères et sœurs. Beaucoup de Russes ont des racines en Ukraine.»

Le Père Oleg est lui-même d’origine à la fois ukrainienne et bélarusse. Aujourd’hui de nombreux membres du clergé russe sont en réalité d’origine ukrainienne. Les membres du chœur, résidents à Bangkok, sont aussi tous Ukrainiens.

L’Église orthodoxe en Thaïlande est récente. Fondée en 2007, elle compte déjà cinq églises principales, à Bangkok, Phuket, Kho Phagnan et Pattaya, pour répondre aux besoins grandissants de l’importante communauté russe dans le pays.  (cath.ch/eda/mp)

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21 avril 2022 | 10:38
par Maurice Page
Temps de lecture: env. 3 min.
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