Le cardinal Ambongo demande aux Africains à s'engager pour leur continent | © François-Régis Salefran/Wikimedia/ CC BY-SA 4.0
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«Les Africains doivent se réveiller»: cardinal Fridolin Ambongo

«La balle est dans notre camp!» Dans un long entretien accordé à Vatican News, le cardinal congolais Ambongo appelle les Africains à se libérer des «puissances qui la maintiennent dans les conflits et la pauvreté» et à œuvrer pour le bien commun et non pour leur enrichissement personnel.

Avec Vatican news

La logique actuelle de notre monde assène que «qui veut la paix, prépare la guerre». Les puissants ne mesurent pas toujours les conséquences de cette pensée, déplore Mgr Fridolin Ambongo, président du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM). «La vraie paix ne se consolide pas avec les armes», lance-t-il à la suite du message de paix adressé par le pape Léon XIV à Noël et à ses appels constant à œuvrer en faveur d’une paix «désarmée et désarmante».

Revenant sur les conflits qui ensanglantent son continent, son pays notamment, la République populaire du Congo (RDC), l’archevêque de Kinshasa insiste. Les guerres causent la mort et la destruction, mènent à la misère et conduisent de nombreux jeunes à rêver d’un ailleurs paradisiaque. Or «très souvent cette envie de partir se termine par des drames dans la Méditerranée», souligne-t-il.

Se montrant néanmoins confiant, le cardinal congolais assure qu’un meilleur avenir est possible en Afrique, pour peu que chacun agisse en ce sens. «Nous ne devons pas désespérer; ayons confiance en nos capacités de transformer, d’améliorer notre avenir. Tout dépend de nous-mêmes.»

Un appel à la résistance

Le cardinal se fait encore plus explicite, appelant à défendre les intérêts de l’Afrique face aux «envahisseurs qui viennent la piller, la vider», ces «bandits» qui laissent derrière eux, au bord de la route, des gens blessés et abandonnés, comme dans la parabole du bon Samaritain (Luc 10, 30).

Cette position du cardinal congolais intervient au moment où une polémique oppose l’Église et le gouvernement de son pays, au sujet de l’Accord de partenariat stratégique, signé le 4 décembre 2025, entre la RDC et les États-Unis. Il y est notamment question des exploitations minières.

Les minéraux de la misère

Le pape François, rappelle l’archevêque de Kinshasa, n’a pas mâché ses mots lors de son voyage de 2023 en République démocratique du Congo. «Retirez vos mains de la République démocratique du Congo, retirez vos mains de l’Afrique! Cessez d’étouffer l’Afrique», avait-il lancé aux puissants.

Deux ans plus tard rien n’a changé, estime le cardinal. L’Afrique, et en particulier la RDC, «est souvent considérée comme le continent le plus riche en ressources minérales, avec des réserves massives de cobalt, de diamants, de cuivre, de fer, de platine, et d’or. De ce fait, elle est vue comme le réservoir de toutes les puissances mondiales qui s’en servent à leur profit.»

Le recul de la démocratie

Interpellant la conscience des Africains, le cardinal les invite à aimer leur terre, à œuvrer pour la faire respecter, en s’opposant à son bradage, avec parfois la complicité de leurs responsables politiques. «On se sert parfois de nos dirigeants pour accéder aux ressources et les retombées de ces minerais restent entre les mains de ceux qui sont au pouvoir et qui traitent avec les grandes compagnies, les grandes puissances extérieures. Face à de telles situations, les Africains doivent se réveiller!»

À l’exception de quelques pays, le prélat estime, en effet, que la démocratie et le mieux-vivre ensemble reculent en Afrique, que seule prime la volonté des puissants et leur recherche de richesse. Cette logique gagne l’ensemble du continent, met en garde Mgr Fridolin Ambongo.

«Une fois obtenue, cette richesse est utilisée pour soi-même, pour la famille, et les proches. Alors que la majorité de la population est abandonnée à elle-même. C’est (…)  une illégalité, une injustice qui constitue l’une des causes principales des nombreux conflits d’aujourd’hui en Afrique.»

Et d’ajouter: «Tant que le système, la redistribution des richesses au niveau du continent africain se fera dans l’illégalité sans créer des conditions de vie potable pour nos populations, il y aura des coups d’État. (…) Il est temps qu’on conçoive en Afrique que le pouvoir est un service à rendre aux populations.» (cath.ch/vn/lb)

Le cardinal Ambongo demande aux Africains à s'engager pour leur continent | © François-Régis Salefran/Wikimedia/ CC BY-SA 4.0
31 décembre 2025 | 16:24
par Lucienne Bittar
Temps de lecture : env. 3  min.
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