Un enfant migrant sur le toit de "La Bête", nom donné au train qui traverse le Mexique de la frontière du Guatemala à celle des Etats-Unis (Photo: JC Gerez)
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Les évêques américains condamnent les politiques d'immigration qui séparent les familles

Les évêques catholiques américains ont condamné la politique d’immigration de l’administration Trump qui sépare les familles à la frontière entre les États-Unis et le Mexique. Réunis en assemblée, à Fort Lauderdale, en Floride, les prélats ont approuvé l’idée d’envoyer une délégation à la frontière pour inspecter les centres de détention où les enfants sont gardés.

En sa qualité de président de la Conférence des évêques catholiques des États-Unis, le cardinal Daniel DiNardo a évoqué les développements récents ‘très troublants’ dans le domaine de l’immigration, rapporte l’hebdomadaire National Catholic Reporter.

Cette réaction intervient après la décision annoncée le 11 juin par le procureur général Jeff Sessions qui limite sévèrement la capacité des demandeurs d’asile à entrer aux États-Unis en invoquant le fait qu’ils fuient la violence domestique ou la violence liée aux gangs. Cette mesure fait suite à la politique de «tolérance zéro» du ministère de la Justice, introduite au début du mois de mai, pour les immigrants qui entrent illégalement aux États-Unis et qui permet de séparer les enfants de leur famille.

640 familles séparées en quinze jours

Selon Mgr Jose Gomez, archevêque de Los Angeles, à cause de cette «tolérance zéro», 640 familles ont été séparées entre le 3 et le 17 mai, avec 55 à 65 enfants chaque jour.

L’asile est un instrument pour préserver le droit à la vie. La récente décision du procureur général suscite de vives inquiétudes parce qu’elle prive potentiellement l’asile de nombreuses femmes qui ne bénéficient pas d’une protection adéquate. Ces femmes vulnérables seront désormais confrontées aux dangers extrêmes de la violence domestique dans leur pays d’origine, a souligné le cardinal DiNardo.

L’archevêque de Galvestone-Houston a rappelé en outre le devoir de l’Etat de veiller à ce que les familles restent intactes et que les enfants ne soient pas exposés à des dommages et traumatismes irréparables. «Séparer les bébés de leur mère n’est pas la solution et c’est immoral.»

L’endurcissement du cœur des Américains

Pour le cardinal Joseph Tobin, de Newark, les derniers développements sont le signe de la «sclérose du cœur» qui a commencé dans le pays, qui touche tous les aspects de la vie. Il a proposé l’idée de l’envoi d’une délégation d’évêques à la frontière «en signe de notre préoccupation pastorale et de protestation contre cet endurcissement du cœur américain».

Le cardinal Sean O’Malley, de Boston, qui n’a pa assisté à l’assemblée, a déploré dans un communiqué que «les États-Unis utilisent maintenant ouvertement les enfants comme pions pour appliquer une politique d’immigration hostile».

Marches de protestations

Dans le cadre de la campagne ‘Partager le voyage’, lancée par le pape François et Caritas Internationalis en septembre dernier, l’archevêque Paul Coakley, président du Catholic Relief Services, a invité ses confrères à se joindre aux pèlerinages et marches citoyennes de solidarité avec les migrants et les réfugiés. L’objectif de la campagne est d’amasser 40’000 km à pied – ou l’équivalent d’un tour du monde – avant le 13 novembre, fête de sainte Françoise Cabrini, vénérée aux Etats-Unis «comme la mère des immigrés».

Polémique autour de l’interprétation de la Bible

La polémique a encore enflée après les déclarations, le 14 juin, du procureur général Jeff Sessions qui a fait référence à la Bible pour justifier sa politique, dans un discours aux agents de la loi à Fort Wayne, dans l’Indiana. Le procureur a évoqué le chapitre 13 de la lettre de saint Paul aux Romains qui dit «d’obéir aux lois du gouvernement parce que Dieu a ordonné le gouvernement pour ses desseins.»

Cette récupération a été vivement dénoncée par les théologiens. «Toute l’histoire des Écritures hébraïques est l’histoire d’un peuple qui a été exilé et persécuté. Les Israélites sont errants, apatrides et sans abri, et pourtant ils comprennent qu’ils sont appelés par Dieu à accueillir ceux qui sont des étrangers parmi eux. Les Écritures appellent tout le monde, même ceux qui sont eux-mêmes des migrants, à accueillir les plus vulnérables», a ainsi expliqué Joseph Capizzi, professeur de théologie morale et l’éthique à l’Université catholique d’Amérique. «Essentiellement, Paul encourage ceux qui suivent le Christ à avoir une disposition au respect envers les membres de l’autorité politique. Ce qui n’autorise en aucun cas un soutien général pour toutes les lois qui sont faites par les autorités politiques.» (cath.ch/ncr/cna/mp)

Un enfant migrant sur le toit de «La Bête», nom donné au train qui traverse le Mexique de la frontière du Guatemala à celle des Etats-Unis
17 juin 2018 | 10:50
par Maurice Page
Temps de lecture: env. 3 min.
Donald Trump (117), Etats-Unis (506), Mexique (144), Migrants (345), Réfugiés (419)
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