Les évêques américains face à la politique anti-migrants de Trump
Quelque 320 évêques venus de tous les États-Unis sont rassemblés du 10-13 novembre 2025 à Baltimore pour leur assemblée plénière annuelle d’automne, au cours de la quelle ils vont élire le successeur de l’actuel président de la Conférence épiscopale catholique des Etats-Unis (USCCB), Mgr Timothy P. Broglio, âgé de 73 ans, actuel évêque aux armées. Ils désigneront également leur nouveau vice-président pour succéder à Mgr William Lori (74 ans).
Après l’élection de Léon XVI, premier pape originaire des États-Unis, le rôle à la tête de la Conférence épiscopale américaine revêt une importance particulière. Les évêques devraient aborder la question de la politique anti-migrants de Trump et de son vice-président J. D. Vance, fervent catholique converti, et s’interroger sur les exigences de l’Évangile dans l’accueil et le traitement des migrants. Autre sujet d’inquiétude chez certains évêques, la suspension dès l’arrivée de Trump à la Maison-Blanche de l’aide internationale accordée à l’agence Usaid, qui finançait de nombreuses ONG catholiques avant sa fermeture.
Une liste de 10 candidats
Les évêques réunis à Baltimore (Etat du Maryland) choisiront les candidats pour les deux postes parmi une liste de 10 évêques proposés par leurs confrères. Le président et le vice-président sortants quitteront leurs fonctions à l’expiration de leur mandat de trois ans.
Pour être élu, l’évêque doit obtenir la majorité des voix des évêques votants. Une fois le président choisi parmi les 10 candidats, le vice-président sera élu parmi les neuf candidats restants. Selon les médias américains, une dizaine de candidats issus de différents camps politiques et ecclésiastiques sont en lice.
Parmi eux figurent notamment l’actuel secrétaire général de la Conférence épiscopale et archevêque d’Oklahoma City, Mgr Paul Coakley (70 ans), ainsi que Mgr Daniel Flores (64 ans), évêque de Brownsville, au Texas, responsable du processus synodal aux États-Unis. Parmi les autres noms figurant sur la liste des candidats, on trouve notamment ceux de l’évêque Robert Barron (65 ans, Winona-Rochester), Kevin Rhoades (67 ans, Fort Wayne) et l’archevêque Charles Thompson (64 ans, Indianapolis).
Quelle attitude face à la politique anti-migrants de Trump ?
Lors de cette assemblée d’automne, on attend également avec impatience de connaître la position des évêques américains concernant la politique anti-migrants et d’expulsion massive du président Trump, ainsi que sur les questions actuelles de politique sanitaire qui affectent les plus pauvres. L’épiscopat états-unien est notoirement divisé sur sa posture face à Donald Trump.
La chasse aux migrants – visant même ceux dont les papiers sont en règle et sans casier judiciaire et menée par les agents fédéraux de l’immigration (policiers de l’ICE, l’Immigration and Customs Enforcement) -, inquiètent de larges pans de l’Église catholique.
Les évêques ont fait part au pape de leurs préoccupations
La présidence de la Conférence épiscopale américaine – lui-même d’ascendance italienne (sa famille vient de Borgofranco d’Ivrea, dans la région du Piémont) – a fait part de ses vives préoccupations au pape Léon XIV en octobre dernier. «Même si on nous critique, il faut répondre aux demandes de l’Évangile» et aux besoins des migrants, aujourd’hui terrifiés par les vagues d’arrestations. Mgr Broglio a interpellé ses fidèles, et les a invités à respecter la dignité humaine «à tout instant de la vie, pas uniquement à sa conception ou sa fin naturelle».
Chez les migrants, la peur règne
A Vatican News, le président de l’USCCB déclare que «même ceux qui se trouvent dans le pays avec tous leurs papiers en règle ont peur. C’est vraiment épouvantable. On ne peut pas vivre jour après jour dans une situation où l’on se demande si on sera là demain ou ce qu’il va se passer pour mes enfants ou ma famille (…) Nous avons cependant déjà protesté, et de nombreuses fois, pour que soit respectée la dignité humaine au moins dans les écoles, dans les églises et dans les structures de santé publique. Parce qu’évidemment, il s’agit de cela. Il faut aussi rappeler que la dignité de la personne humaine commence à la conception de la vie et s’achève à la fin naturelle de la vie, mais il faut aussi la respecter à tout moment de la vie entre les deux. On ne peut pas choisir qu’on va la respecter à ce moment-là et pas à un autre. Il faut respecter la personne humaine tout le temps. Et je crois qu’il faut inviter les gens à réfléchir à cela».
Le message de l’Eglise souvent inaudible
Mgr Timothy P. Broglio déplore qu’aux Etats-Unis, «les gens, même ceux qui se disent catholiques pratiquants, accordent beaucoup plus de confiance aux messages émanant des partis politiques que de nous, les successeurs des apôtres. Et ça me gêne beaucoup parce que quand je parle, vraiment, je n’ai pas d’intérêt politique. Mon intérêt, c’est l’Évangile et je dois y être fidèle parce qu’à la fin de ma vie, je dois répondre à l’envoi que j’ai reçu (…) D’ailleurs, quand des gens me disent ›Vous êtes en train de faire la politique’ et je leur demande toujours ce que, eux, ils s’apprêtent à répondre quand le Seigneur les interrogera sur l’Évangile selon saint Matthieu, le chapitre 25. ›Qu’est-ce que vous allez répondre?’ Parce qu’Il a déjà dit que c’est ça la matière de l’examen final. Ce n’est pas un examen académique, mais c’est l’examen de la vie. Et moi, il est de ma responsabilité de préparer les gens à ce moment».
A plusieurs reprises, Léon XIV s’est exprimé sur le sujet, comme le 4 novembre où, répondant aux questions des journalistes, le pape américain a commenté le chapitre 25 de l’Évangile selon saint Matthieu: «À la fin des temps, il nous sera demandé: comment avez-vous accueilli l’étranger ? L’avez-vous accueilli ou pas ? Il y a dans ces paroles matière à une profonde réflexion (sur la situation actuelle aux États-Unis ndlr). Nombreux sont ceux qui, ayant vécu des années sans jamais causer de problèmes, sont profondément affectés par la situation actuelle». (cath.ch/usccb/cna/vaticannews/be)





