«Les réformes économiques ne font que commencer», prévient le pape
Le pape François explique que les réformes économiques engagées depuis 2013 au Vatican ne sont pas terminées, dans une lettre aux employés du secrétariat pour l’Économie, datée du 24 novembre 2023 et publiée sur le site du secrétariat le 12 décembre. Soulignant que le Saint-Siège «enregistre chaque année un déficit important», le pape demande des efforts.
Hasard du calendrier, la publication de la lettre du pape François adressée à la quarantaine d’employés que compte le secrétariat pour l’Économie intervient alors que se termine cette semaine le procès de l’affaire financière dite de ‘l’immeuble de Londres’. Ce procès tentaculaire porte notamment sur la perte de dizaines de millions d’euros subie par le Saint-Siège suite à l’investissement par la secrétairerie d’État dans un immeuble à Londres à partir de 2014. Le verdict du procès dans lequel comparaît notamment un cardinal est attendu d’ici la fin de la semaine.
Dans sa lettre, le pape François salue le travail accompli depuis la création en 2014 du secrétariat pour l’Économie, sorte de ministère des Finances du Vatican. La réforme, demandée par les cardinaux qui ont élu le pape François en 2013, a permis de doter le Saint-Siège «des outils nécessaires pour garantir que son patrimoine est orienté vers la mission, en évitant les risques de retomber dans les erreurs du passé que nous connaissons tous», écrit-il.
Des réformes à poursuivre
Mais les réformes lancées notamment par le cardinal George Pell, premier préfet de cette entité et à qui le pape rend de nouveau hommage, ne sont pas terminées, insiste le pontife. Il envoie en ce sens une série de messages aux employés de ce secrétariat.
D’abord, le pontife leur demande de faire preuve de «prudence» et de «loyauté». Leur service nécessite de répondre à la «vigilance et la culture de la légalité et de la transparence», des valeurs à associer «au devoir et au courage de dénoncer tout ce qui n’est pas conforme».
Et le pape d’insister: «[Vous devez] avoir la loyauté de dire ‘non’ quand ce qu’on vous présente ou ce que vous trouvez dans les contrôles trahit la mission, quand l’intérêt individuel de certains l’emporte sur l’intérêt collectif, quand les règles sont violées ou contournées artificiellement pour poursuivre des fins étrangères à celles du Saint-Siège et de l’Église, et que les choix n’ont rien à voir ou peu à voir avec la mission ou lui nuisent».
«Un déficit important»
«Je sais que le Saint-Siège accuse chaque année un déficit important», explique ensuite le pape. Il appelle donc son secrétariat à faire le nécessaire pour assainir les finances. «Chacun doit être prêt, assure-t-il, à renoncer à son intérêt particulier au profit de l’intérêt commun, même si cela implique des changements et des adaptations».
Depuis plusieurs années, des efforts sont déjà opérés dans la plupart des dicastères pour réduire les budgets et maîtriser les dépenses. En 2021, le déficit du Saint-Siège n’était que de 3 millions d’euros, pour un budget total de 1,1 milliard. Mais le Vatican se sépare chaque année d’une partie de son patrimoine, pour 20 à 25 millions d’euros, estimait l’AFP l’an passé.
Dans sa lettre, le pape appelle à veiller particulièrement aux recrutements externes, alors que le secrétariat pour l’Économie vient d’inaugurer un portail sur lequel il est possible de postuler en ligne – historiquement, le recrutement au Vatican passait directement par les différents organismes de la Curie romaine.
Dans le sillage de la nouvelle constitution de la Curie romaine, Praedicate Evangelium, il invite par ailleurs à la mobilité interne, en plaidant pour que ceux qui travaillent déjà au Saint-Siège aient la «possibilité de se renouveler».
Vigilance sur les appels d’offres
Le pape rappelle aussi aux membres du secrétariat pour l’Économie l’exigence de respecter et de faire respecter les règles en matière «d’appels d’offres». «Il vous appartient de les mettre à jour et de les interpréter pour faire ressortir ce qui est éthique et fonctionnel pour la mission, au meilleur prix possible, de manière à préserver le patrimoine pour l’avenir sans renoncer à la mission d’aujourd’hui», explique-t-il.
Enfin, le pape demande que les investissements du Saint-Siège soient réalisés de «manière éthique» et qu’ils n’aient pas pour but «ni la spéculation ni l’accumulation».
Depuis plusieurs années, des efforts sont menés par le Saint-Siège pour ‘nettoyer’ les portefeuilles financiers afin que l’argent de l’Église soit investi dans des fonds respectant les principes de la doctrine sociale de l’Église. «Nous l’avons fait, mais c’est un travail qui ne se termine jamais», confiait récemment un haut cadre du Vatican, qui reconnaissait que le Saint-Siège avait pu gérer des valeurs qui étaient en «totale contradiction» avec ce que le pape prêche. (cath.ch/imedia/hl/bh)