Les parlementaires français doivent statuer sur "le droit à l'aide à mourir" | © Bret Kavanaugh/ Unsplash
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Les responsables de culte en France s’inquiètent de la loi sur la fin de vie

La Conférence des responsables de culte en France (CRCF) – catholique, protestant, orthodoxe, juif, musulman et bouddhiste – a publié une lettre ouverte sur «les graves dérives» qu’implique un «droit à l’aide à mourir». Les dignitaires mettent en garde contre une «rupture anthropologique».

«Derrière une apparente volonté de compassion et d’encadrement, ce texte opère un basculement radical, avertit la CRCF le 15 mai 2025. Il introduit légalement la possibilité d’administrer la mort – par suicide assisté ou euthanasie – en bouleversant profondément les fondements de l’éthique médicale et sociale.»

La proposition de loi sur le «droit à l’aide à mourir» est actuellement en cours d’examen à l’Assemblée nationale française. Les débats ont débuté le lundi 12 mai 2025 et devraient se poursuivre jusqu’au 27 mai, avec un vote solennel prévu le 29 mai.

La terminologie choisie – «aide à mourir» – masque la nature véritable de l’acte: l’administration volontaire d’un produit létal, notent les responsables religieux. Ce vocabulaire euphémisant, que la Haute Autorité de Santé elle-même qualifie de source de confusion éthique, dénature les mots pour désamorcer la gravité morale de l’acte. Qualifier une mort administrée de «naturelle» est une contrevérité qui vise à anesthésier les consciences et affaiblir le débat public.

Le serment d’Hippocrate en question

Pour la CRFC, l’intégration de l’aide à mourir dans le Code de la santé publique constitue un dévoiement de la médecine. Elle heurterait frontalement le serment d’Hippocrate et le principe fondamental du soin, qui vise à soulager, sans jamais tuer.

Le texte actuel permet à un seul médecin d’autoriser un acte létal, sans procédure collégiale, ni évaluation psychiatrique. La Haute Autorité de Santé, dans ses avis successifs, insiste pourtant sur la nécessité absolue d’un discernement partagé, pluridisciplinaire, long et encadré. Le délai d’instruction de 15 jours suivi, le cas échéant, d’un délai de réflexion de seulement 48 heures – voire moins – va à l’encontre de tous les standards internationaux. Cette précipitation est indigne d’une décision irréversible et de la gravité de l’enjeu, s’offusque la CRCF.

Risque d’une «culpabilité toxique»

L’instauration de ce «droit» risque d’exercer une pression sourde mais réelle sur les personnes âgées, malades ou en situation de handicap. La seule existence d’une telle option peut induire chez des patients une culpabilité toxique – celle «d’être un fardeau». Dans les pays où l’euthanasie a été légalisée, les demandes ne cessent d’augmenter, et on observe une baisse inquiétante de l’investissement dans les soins palliatifs.

Rupture anthropologique

La loi proposée consacre l’autonomie individuelle au détriment des liens familiaux et sociaux, dénoncent les responsables de culte. «Elle érige l’autodétermination individuelle en absolu en écartant toute information ou consultation de proches, de l’équipe soignante, et tout accompagnement spirituel ou psychologique. Ce faisant, elle ne tient aucun compte de la dimension relationnelle et interdépendante de l’existence humaine. Ce choix solitaire risque fort d’occasionner des traumatismes et de blessures durables, notamment dans le cas d’une découverte a posteriori du décès d’un proche aidé au suicide ou euthanasié.»

Devant cette possible rupture anthropologique, la CRCF appelle les parlementaires à faire preuve de discernement. «Légaliser la mort administrée ne sera pas un progrès, mais une régression éthique, sociale et médicale», avertit la Conférence. (cath.ch/com/rz)

Les parlementaires français doivent statuer sur «le droit à l'aide à mourir» | © Bret Kavanaugh/ Unsplash
15 mai 2025 | 16:17
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 2  min.
Euthanasie (99), France (544), politique (172), Suicide assisté (78)
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