Liban: Après le décès du président Hafez el-Assad, espoir chez les maronites du Liban

«Une nouvelle aube peut chasser la vieille méfiance»

Beyrouth, 15 juin 2000 (APIC) Un nouvel espoir, quoique mitigé, est perceptible chez les maronites du Liban, au lendemain du défilé de personnalités libanaises de tous bords à Qerdaha, le village natal de Hafez el-Assad où le président syrien a été inhumé mardi. Nombre de maronites considèrent que leur pays vit dans un système de souveraineté limitée. Suite aux Accords de Taëf mettant un terme à la guerre civile, l’influence de Damas sur le gouvernement libanais a suscité chez eux une profonde hostilité.

«Une nouvelle aube peut chasser la vieille méfiance», estime jeudi «The Daily Star» à Beyrouth. Mais le quotidien libanais estime toutefois que l’amélioration des relations entre les maronites chrétiens libanais et les Syriens – présents sur sol libanais avec 35’000 soldats – «n’est cependant pas imminente». Car depuis plus de deux décennies, le contentieux est lourd et les sentiments à l’égard des Syriens sont très mitigés, quand ils ne sont pas hostiles.

Un nombre impressionnant de personnalités libanaises ont pourtant envoyé des télégrammes de condoléances à Bachar el-Assad, successeur désigné du président syrien défunt. Dans son message au nouvel homme fort de Damas, Mgr Boulos Matar, archevêque maronite de Beyrouth, a notamment estimé que son père Hafez el-Assad a mené «la lutte la plus noble en vue de préserver la dignité des Arabes, de leur restituer leurs droits et de garantir aux générations futures un avenir prospère».

Selon «The Daily Star», il ne faut pas s’attendre à des ouvertures immédiates mais les déclarations empreintes de sympathie émises depuis Bkerké par le patriarcat maronite à l’occasion de la mort du président syrien «suggèrent la volonté de tourner la page». Le patriarche maronite Nasrallah Boutros Sfeir a ainsi fait dimanche un éloge appuyé du président disparu. Il pensait même se rendre aux funérailles, mais y a finalement renoncé. Une délégation maronite libanaise de haut rang s’est par contre rendue en Syrie. Le journal considère comme significatif le flot de condoléances que le clergé maronite a envoyé à Bachar el-Assad, lui exprimant sa confiance dans sa capacité à diriger la Syrie.

Des courants chrétiens se sentent marginalisés

Les relations entre nombre de responsables maronites et les autorités syriennes ne sont en effet pas au beau fixe depuis des années. Ces dernières années, les discrètes médiations de l’Eglise tendant à un rapprochement avec les leaders chrétiens hostiles au régime issu des Accords de Taëf ont connu l’échec. Ces Accords prévoyaient à terme le retrait total des troupes syriennes du Liban et un gouvernement représentatif de toutes les sensibilités libanaises. Des courants politiques chrétiens estiment que le régime mis en place sous l’égide syrienne vise à les marginaliser totalement.

Dans le passé, des responsables politiques chrétiens pro-syriens, comme le député Elie Ferzli ou le ministre de l’agriculture Souleimane Franjieh, ont tenté en vain de convaincre le cardinal Sfeir de visiter la Syrie et de rapprocher les points de vue. Le nouvel homme fort de Damas apparaît aux yeux de nombre de chrétiens maronites comme moins impliqué que son père dans le contentieux libanais.

Deux leaders maronites qui réclament depuis longtemps le départ des troupes syriennes du Liban, l’ancien président Amine Gemayel et l’ancien chef de l’armée, le général Michel Aoun ­ tous deux en exil en France – ont également signalé ces jours derniers une ouverture en direction de la nouvelle direction syrienne. L’ancien ambassadeur du Liban à Washington, Simon Karam, proche du patriarche maronite, estime pour sa part qu’il est trop tôt pour prédire des changements dans les relations libano-syriennes. D’autres sources proches de Bkerké restent sceptiques, même si la jeunesse et la réputation de modernité de Bachar el-Assad plaident en sa faveur. (apic/orj/ds/be)

15 juin 2000 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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