Liban: Chefs religieux sunnites et chiites contre le terrorisme islamique
Tuer des civils innocents est un acte «barbare» interdit par l’islam
Beyrouth, 22 mai 2003 (Apic) Les chefs religieux sunnites et chiites du Liban montent aux barricades contre le terrorisme islamique. Le Premier ministre libanais Rafic Hariri a également mis en garde contre «certains courants fanatiques et suspects qui tentent de propager leurs idées (.. ) en vue de diviser les rangs islamiques».
L’ouléma chiite Mohammed Hussein Fadlallah, guide spirituel du Hezbollah, a émis une fatwa (décret religieux) classant parmi les crimes interdits par la doctrine islamique les attentats à l’explosif visant des civils, à l’instar de ceux perpétrés à Casablanca au Maroc. Il a également sévèrement condamné les récents attentats de Ryad, en Arabie Saoudite, soulignant que de tels actes portent préjudice à l’image de l’islam dans le monde. Il a qualifié ces attentats visant notamment des femmes et des enfants, d’attaques «barbares» interdites par l’islam: «tuer des civils (…) sans qu’une agression ou une guerre ne le justifie est interdit par la doctrine».
Sayyed Mohammed Hussein Fadlallah – lui-même la cible d’une tentative d’assassinat orchestrée par la CIA en 1985 – souligne que «la mentalité qui dicte le comportement de ceux qui ont commandité ces attentats a eu un impact négatif sur la situation musulmane dans son ensemble. (.)»
Une mentalité obtuse qui fait du tort à l’islam
«Il s’agit là d’une mentalité obtuse», poursuit Fadlallah, cité jeudi par le quotidien libanais «L’Orient-Le Jour». «Ceux qui se livrent à de tels actes s’imaginent que leur action constitue le meilleur moyen de briser la réalité actuelle. Mais rien ne justifie ces actions, qui ne sont qu’une agression directe contre des innocents. Ils tuent délibérément des personnes dont le seul tort est d’être d’une nationalité déterminée ou de se trouver dans certains endroits.»
Le guide spirituel du Hezbollah souligne que la gravité de tels actes réside dans le fait qu’ils ternissent l’image de l’islam dans le monde et présentent l’islam comme une religion qui incite au meurtre et à l’effusion de sang. «Ces actions encouragent, d’autre part, les dominateurs à poursuivre leur guerre dans les pays musulmans sous prétexte de combattre le terrorisme.»
Sayyed Fadlallah, toujours cité par le quotidien francophone de Beyrouth, affirme par ailleurs que «ce sont les «Etats-Unis qui sont responsables de la propagation de ce phénomène dans le monde arabe et musulman, d’autant qu’ils l’ont soutenu au début, sans compter qu’ils apportent un soutien inconditionnel à Israël et que, dans le même temps, ils maintiennent une pression continue sur les Arabes et les musulmans». L’ouléma chiite justifie par contre les opérations-suicide palestiniennes «totalement légitimes du fait qu’elles visent non pas à tuer des innocents, mais à ébranler la sécurité d’Israël».
De son côté, le Premier ministre libanais Rafic Hariri a dénoncé le radicalisme islamique, qui s’est manifesté notamment au sein de groupuscules sunnites du nord du pays, en recevant mercredi une délégation de cheikhs et d’ulémas du Akkar, de Denniyé et de Menié. Les dignitaires sunnites se sont plaints du fait que certaines régions du Liban-Nord ont une réputation de terrorisme imméritée.
Les chefs religieux sunnites ont dit s’employer à éradiquer les courants de pensée extrémistes sous la supervision de l’institution sunnite de Dar el-Fatwa. Ils assurent qu’ils enseignent aux jeunes l’islam modéré. Et de déplorer que certains événements survenus au Liban-Nord – des incidents armés qui ont fait plusieurs morts – ont donné une image déformée de la situation dans la région.
Enseigner aux jeunes l’islam modéré
Le chef du gouvernement a pour sa part relevé que si une petite minorité d’extrémistes se sont laissés entraîner dans des opérations violentes, «cela ne signifie pas que nos régions sont devenues terroristes, mais nous devons tous nous opposer à de tels actes car ils sont anti- islamiques et nuisent aussi bien aux musulmans qu’à la nation tout entière.» Et Rafic Hariri d’annoncer que sera considéré comme suspect quiconque cherche à se dissocier de Dar el-Fatwa et que le gouvernement libanais donnera son appui à toutes les institutions qui y sont rattachées afin de «combler les brèches que tentent d’exploiter les courants fanatiques». (apic/orj/be)