Londres: les ex-dirigeants de l’AIF auraient suivi la volonté du pape
Dans le procès dit ‘de l’immeuble de Londres’, les avocats de René Brülhart et Tommaso Di Ruzza, ex-dirigeants de l’autorité anti-blanchiment d’argent du Vatican (AIF) ont affirmé le 5 octobre 2023 que leurs clients avaient opté pour une solution «purement alignée sur la volonté supérieure» – celle du pape François.
Les deux avocats, les premiers des dix accusés à présenter leur plaidoirie, ont réclamé leur acquittement. Le Suisse René Brülhart et l’Italien Tommaso Di Ruzza, ancien dirigeant de l’Autorité d’information financière (AIF, aujourd’hui ASIF), sont tous les deux accusés d’abus de pouvoir par le promoteur de justice, qui réclame pour le premier trois ans et huit mois de réclusion et 10’329 euros d’amende, et, pour le second, quatre ans et quatre mois de réclusion et 9’600 euros d’amende.
Il est reproché aux deux hommes d’avoir autorisé l’Institut des œuvres de religion (IOR), la banque privée du Vatican, d’accorder un prêt de 150 millions à la secrétairerie d’État – qui joue, entre autres, un rôle d’administration centrale du petit État. Le promoteur de justice affirme que les dirigeants, pendant les mois de négociation n’ont pas agi avec «indépendance et autonomie» comme l’exigent les statuts de leur organisation et qu’ils n’ont pas signalé la tentative d’extorsion menée par le courtier Gianluigi Torzi contre le Saint-Siège à son bureau.
La défense des deux hommes a justifié leur action: selon l’avocat de René Brülhart, c’est en faisant référence à la «volonté supérieure» – le pape – que le substitut, le 16 mars 2019, a fait part à son client de la «ferme volonté» de la secrétairerie d’État de «conclure la transaction avec le Dr Torzi dans les plus brefs délais».
L’idée de procéder non pas à l’initiative judiciaire mais à la conclusion des tractations avec Torzi avec un éventuel accord, est une idée qui vient du souverain et cela, une fois de plus, Peña Parra (Mgr Edgar Peña Parra, le substitut de la secrétairerie d’État), nous le dit», a confirmé l’avocat de Tommaso Di Ruzza. Conseillé par des avocats anglais, le Saint-Siège aurait alors considéré que la voie extrajudiciaire était «la plus économique», a poursuivi l’avocat de l’Italien.
Alors que le promoteur de justice estime aussi que René Brülhart avait un conflit d’intérêt parce qu’il travaillait pour la secrétairerie d’État comme consultant en même temps qu’à l’AIF, l’avocat de ce dernier a répondu que laConstitution apostolique Pastor Bonus, qui régissait jusqu’en 2022 le fonctionnement de la Curie romaine, encourageait la collaboration entre les dicastères.
Les avocats des deux hommes ont ensuite souligné que leurs clients n’avaient pas de relation avec l’accusé Gianluigi Torzi, et donc aucun motif pour faciliter son extorsion. Ils ont enfin affirmé que l’autorisation du prêt de l’IOR auquel ils avaient consenti était techniquement conforme aux normes de l’AIF. Ils ont considéré que c’est l’IOR qui n’avait pas fait le travail en refusant d’accorder ce prêt.
L’un des avocats de Tommaso Di Ruzza a également souligné l’innocence de ce dernier en ce qui concerne un autre chef d’accusation le concernant, celui de violation du secret professionnel. Un témoignage survenu lors du procès, a-t-il insisté, prouve son innocence sur ce point.
La prochaine audience a lieu ce 6 octobre, avec la plaidoirie des défenseurs de Cecilia Marogna, l’unique femme accusée dans ce procès. (cath.ch/imedia/ic/cd/gr)