Les martyrs égyptiens de Libye ont une cathédrale qui porte leur nom

L’église dédiée au 21 martyrs chrétiens égyptiens assassinés par les terroristes islamiques au bord de la mer près de Syrte, en Libye, en février 2015, a été inaugurée le 15 février 2018. Elle se trouve dans le village d’Al-Our, près de la ville de Samalout, dans la province de Minya, d’où provenaient 13 des 21 chrétiens assassinés.

Le 15 février 2015, sur la côte libyenne, les membres du groupe Etat islamique (Daech) avaient décapité dans une mise en scène macabre 20 jeunes coptes égyptiens et un Africain et avaient enregistré et publié ce crime en vidéo sous le titre de «Message signé avec le sang, destiné à la nation de la Croix«.

L’Etat a secouru les familles des victimes des terroristes

Le soir même, l’Egypte répondait par des frappes aériennes visant les agglomérations où se cachaient les djihadistes auteurs du massacre, et au lendemain de la diffusion de la vidéo, le président égyptien Abdel-Fattah Al-Sissi se rendait à la cathédrale Saint-Marc du Caire, siège du patriarcat copte orthodoxe, pour y présenter ses condoléances au pape Tawadros II. Le président al-Sissi avait immédiatement fait construire, aux frais de l’Etat, «l’Eglise des Martyrs». Sept jours de deuil national avaient été décrétés.

 

Inauguration de l’Eglise des martyrs coptes à Al-Our, près de Samalout, en Haute-Egypte | © DR

Depuis, les familles des victimes ont reçu un dédommagement et bénéficient d’une pension mensuelle correspondant au salaire que touchaient ces jeunes ouvriers partis travailler en Libye pour nourrir leur famille. Trois ans après ce massacre, le gouverneur de Minya, des autorités locales ainsi que des familles des victimes ont assisté le 15 février à la messe présidée par l’évêque de Samalout.

«Cathédrale des Martyrs de la foi»

Au cours de cette semaine, les familles des défunts se rappellent leurs martyrs dans une douleur mêlée à la joie. Ils ont maintenant une cathédrale au nom de leurs enfants, appelée la «Cathédrale des Martyrs de la foi» (chrétienne).

Les 21 coptes égyptiens avaient été enlevés en Libye en janvier 2015. La vidéo de leur décapitation fut mise en ligne sur les sites djihadistes le 15 février. Quelques jours après le massacre, le pape copte orthodoxe Tawadros II, chef spirituel des coptes d’Egypte, décidait d’inscrire les 21 martyrs décapités par Daech au Synaxarium, le livre sacré des martyrs de l’Eglise copte orthodoxe, tout au long de son histoire.

L’église a été construite dans la petite bourgade d’Al-Our, en Haute-Egypte, village natal de la majorité des martyrs, à environ 245 kilomètres au sud de la capitale égyptienne Le Caire. Les autels de ce mémorial ont été bénis par Amba Bovnotious, évêque de Samalout, puis la première messe y a été célébrée le lendemain, le jeudi 15 février, en présence du gouverneur de la ville. La célébration des messes hebdomadaires a commencé vendredi 16 février, jour du weekend égyptien.

Dans l’attente des dépouilles

D’autre part, les familles des défunts attendent toujours les résultats des analyses de leur ADN, opérées par les autorités égyptiennes il y a environ 3 mois, au lendemain de la découverte des dépouilles, dans une grotte à Syrte, en Libye, pour pouvoir recevoir les dépouilles de leurs enfants, qui seront très probablement ensevelis dans des vitrines au rez-de-chaussée de la nouvelle cathédrale.

L‘Eglise des Martyrs de la foi a été construite par la branche de l’ingénierie des Forces armées égyptiennes et aux frais du gouvernement sur une superficie de 4000 m2, coûtant ainsi 10 millions de livres égyptiennes (environ 457’000 euros). Elle est composée de deux étages, un rez-de-chaussée, où seront exposées les dépouilles des martyrs dans des étoffes en velours, selon la tradition copte. Elle comprendra également une bibliothèque, une salle de réception et d’autres salles de services sociaux, alors que l’église se trouve dans l’étage supérieur. LL

Témoignages

«Nos frères sont au paradis. Nous nous félicitons pour cela et prions pour eux«. Emad Soliman, frère du défunt Magued Soliman

«C’est fou le nombre de fidèles qui sont venus pour l’inauguration de la cathédrale. Il dépasse de loin le nombre de ceux qui étaient venus il y a trois ans pour les funérailles des martyrs. Il y avait aussi des musulmans».  Makine Zaki, père du défunt Milad Zaki

«J’ai marché avec ma famille deux kilomètres dans le froid à 5h du matin pour être présent à la première messe de la nouvelle cathédrale. Je sens que mon frère est toujours avec nous et qu’il ne nous a jamais quittés«. Makati Nagati, frère du défunt Luka Nagati et cousin du défunt Essam Baddar.

«Je suis très heureux de voir un édifice en leur nom, mais je sens forte la douleur de la séparation. En un seul coup, on cherche nos jeunes et ils ne sont plus là«. Anonyme, à la sortie de la messe.

«C’est un jour de fête. Tout le monde est joyeux et les femmes lancent des cris de joie«. Kaddis Adel, ami de plusieurs défunts.

«J’ai hâte de voir revenir les dépouilles de nos martyrs pour que l’on puisse les vénérer dans la nouvelle cathédrale«. Amir Nadi, cousin du défunt Tawadros Farag.

«Mon fils est parti travailler en Libye pour améliorer ses conditions financières, afin qu’il puisse couvrir les frais de la création de sa nouvelle famille et de son nouveau foyer. Mais il a été tué parce qu’il était copte«. Nached Wilson, père du défunt Samuel Nached.

«L’Etat a maintenu ses promesses: il a pris soin des familles des défunts et a construit la cathédrale. Nous laisserons la vengeance à la justice«. Baddar Samir Isaac, père du défunt Essam Baddar.

Mgr Kyrillos William, évêque copte-catholique d’Assiout, en Haute-Egypte | © Jacques Berset

Toute la communauté copte vénère ses martyrs

L’inauguration de cette église est hautement symbolique pour la communauté copte qui vénère ses martyrs, explique Mgr Kyrillos William Samaan, évêque copte catholique d’Assiout, en Haute-Egypte. «Ce sont pour nous aussi des martyrs: ils ont refusé d’abjurer leur foi, et sont morts en récitant le Kyrie eleison, ›Seigneur, prends pitié’, avec le nom de Jésus sur les lèvres, jusqu’à leur dernier souffle», a confié l’évêque copte-catholique d

Le chef du plus grand diocèse copte catholique d’Egypte affirme que depuis la chute du gouvernement islamiste de Mohamed Morsi, la situation des chrétiens en Egypte s’est beaucoup améliorée, même si les coptes restent fréquemment la cible de fanatiques islamistes. (cath.ch/ll/be)

 

Cathédrale des Martyrs de la foi, en hommage aux victimes des terroristes de Daech | DR
17 février 2018 | 17:28
par Jacques Berset
Temps de lecture: env. 4 min.
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