Générosité des narcotrafiquants ? L’Eglise refuse ces aumônes

Mexique: Les évêques démentent que l’Eglise touche de l’argent des barons de la drogue

Mexique, 11 avril 2008 (Apic) Les trafiquants de drogue mexicains sont réputés pour leur générosité envers l’Eglise catholique, et l’attitude de certains prélats vis-à-vis de ce commerce délictueux serait parfois ambiguë. Une déclaration du président de la Conférence épiscopale mexicaine, révélant que de l’argent de la drogue irait à des oeuvres de l’Eglise, a suscité une vive polémique dans la presse mexicaine.

Le président de la Conférence épiscopale mexicaine (CEM), Mgr Carlos Aguiar Retes, a en effet déclaré vendredi dernier que les trafiquants de drogues donnent effectivement de l’argent pour des oeuvres sociales, des infrastructures routière, l’électricité et même pour construire des chapelles voire des églises dans leurs communautés, qui sont souvent très pauvres. Mais l’évêque de Texcoco a souligné sans ambiguïté que l’Eglise condamnait le narcotrafic et refusait les aumônes des trafiquants.

Suite à des polémiques dans la presse mexicaine, plusieurs évêques ont démenti que l’Eglise mexicaine ait touché de l’argent des barons de la drogue. Mgr Aguiar a déclaré à la presse que nombre de ces trafiquants sont bien reçus dans leurs lieux d’origine, parce qu’ils y ont apporté des services dont bénéficie la population. Ils font même construire des chapelles consacrées au saint patron du lieu ou au saint pour lequel ils ont une grande dévotion.

C’est pour cette raison que les habitants les considèrent souvent comme des bienfaiteurs généreux qui aident à améliorer la situation des gens pauvres. En certaines occasions, ils cherchent l’appui spirituel de prêtres sous le secret de la confession et veulent se racheter et changer de vie.

Les médias accusés de faire une mauvaise interprétation

Mais le président de la Conférence épiscopale mexicaine n’a jamais dit, contrairement à ce qui a été rapporté par certains médias, que l’Eglise catholique recevait de l’argent des trafiquants, précise sur le site internet de la CEM l’évêque auxiliaire de Guadalajara, Mgr José Leopoldo Gonzalez Gonzalez, secrétaire général de la Conférence épiscopale mexicaine. Et de souligner qu’on ne peut déduire des déclarations de Mgr Carlos Aguiar que l’Eglise tolère les actions et la conduite des trafiquants de drogue. Au contraire, affirme-t-il, «l’Eglise condamne et continuera à le faire parce que c’est un attentat contre la vie et contre le bien du Mexique».

Mgr Aguiar, qui n’a jamais eu de sympathie pour les trafiquants de drogue, appartient au secteur modéré et «centriste» de l’Eglise mexicaine, selon les observateurs. Mais ses paroles ont été reprises par ceux qui lui veulent du mal et faire croire qu’il appuyerait les mafias de la drogue, a déclaré à l’agence de presse IPS le sociologue des religions Bernardo Barranco. Le porte-parole de l’archevêché de Mexico a également déclaré que «l’argent sale ne se lave pas avec des oeuvres soi-disant caritatives».

Le président de la CEM a dit que dans les zones rurales et pauvres, «où le gouvernement n’a pas de moyens pour agir, les narcotrafiquants réalisent des oeuvres très significatives pour la communauté», en ajoutant qu’il ne justifiait pas de telles actions, «mais je dis simplement ce qui est une évidence». En 2005, l’évêque d’Aguascalientes à l’époque, Mgr Ramon Godinez Flores, avait reconnu que certains dons reçus par l’Eglise pourraient venir du trafic de drogue. Mais dans la mesure où cet argent est utilisé pour des bonnes oeuvres, avait-il relevé, «il est purifié». (apic/cns/ips/com/be)

11 avril 2008 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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