Mgr Touvet nommé évêque coadjuteur du diocèse de Fréjus-Toulon

Suite à la visite apostolique demandée par Rome dans le diocèse de Fréjus-Toulon, le pape François a nommé Mgr François Touvet évêque coadjuteur de ce diocèse le 21 novembre 2023. De façon inédite, il aura pour charge de gouverner certains domaines importants – administration, clergé et communautés religieuses – du diocèse du sud de la France. L’évêque en poste reste Mgr Dominique Rey, qui garde seulement une partie de gouvernement sur la vie pastorale.

D’après le droit de l’Église, l’évêque coadjuteur est nommé au côté de l’évêque diocésain avec droit immédiat de succession en cas de démission ou de décès de l’évêque titulaire. Dans ce cas précis, le pape donne à Mgr Touvet «les pouvoirs spéciaux du gouvernement diocésain dans les domaines de l’administration, de la gestion du clergé, de la formation des séminaristes et des prêtres, de l’accompagnement des instituts de vie consacrée, des sociétés de vie apostolique et des associations de fidèles» peut-on lire dans un communiqué des évêques de France. 

Mgr Dominique Rey, à la tête du diocèse du Var depuis 2000, est donc écarté de ces secteurs. Cette décision fait suite à une reprise en main du Vatican, avec la suspension des ordinations sacerdotales prévues en juin 2022 et une visite apostolique lancée en février 2023 dans ce diocèse. Pierre d’achoppement entre Rome et Mgr Rey: le discernement des vocations sacerdotales et religieuses. 

Le profil du coadjuteur

L’évêque coadjuteur mis en place, Mgr Touvet, était jusqu’à présent évêque du diocèse de Châlons. Né le 13 mai 1965 à Paris, il a été ordonné prêtre le 28 juin 1992 à Dijon, après avoir été formé aux séminaires de Paray-le-Monial, de Besançon, puis de Lyon.  

Au sein du diocèse dijonnais, de 1992 à 2010, le jeune prêtre a servi comme vicaire paroissial, curé de doyennés – regroupement de plusieurs paroisses – vicaire épiscopal de la zone Nord, ou encore vicaire général. Il s’est aussi beaucoup engagé dans la pastorale des jeunes, notamment comme conseiller religieux des Scouts d’Europe et aumônier des Scouts unitaires de France et aumônier diocésain du Mouvement eucharistique des jeunes (MEJ). Titulaire du brevet d’aptitude aux fonctions de directeur (BAFD), il a assuré la direction de centres de vacances pour enfants et adolescents sur le bateau de navigation fluviale Gaudium et sol. 

Mgr Touvet a intégré le diocèse aux Armées françaises de 2011 à 2015, comme aumônier du 61ème Régiment d’Artillerie de Chaumont, et aumônier de la Compagnie de Gendarmerie départementale de Langres. Dans le diocèse de Langres, il a aussi servi en paroisse et a assisté l’évêque comme vicaire épiscopal et vicaire général, entre 2010 et 2015. 

Nommé évêque de Châlons le 23 décembre 2015 par le pape François, Mgr Touvet a reçu l’ordination épiscopale le 28 février 2016. Au niveau national, au sein de la Conférence des évêques de France, il a été président par interim de l’Association française des Œuvres pontificales missionnaires. Il est encore président du Conseil pour la communication. Plus récemment il s’est occupé de la dissolution de la Communauté du Verbe de Vie ordonnée par Rome .

Mgr Touvet s’est particulièrement engagé auprès des servants d’autel. Son parcours spirituel est lui-même marqué par sa mission d’ «enfant de chœur». «J’ai commencé à 5 ans et j’ai été servant d’autel jusqu’à mes 18 ans, sans interruption», confiait-il ainsi à I.MEDIA. Et de raconter sa première messe et la naissance de sa vocation: «C’était une messe de minuit, j’étais en aube. La seule chose qu’on m’avait demandé de faire était de déposer l’enfant Jésus dans la crèche. Ensuite, il paraît que je me suis endormi pour le reste de la messe. Mais c’est après cet événement que j’ai dit à mes parents que je voulais être prêtre pour porter Jésus». 

Un diocèse en crise

Le diocèse de Fréjus-Toulon s’est retrouvé plongé dans la tourmente après l’annonce, le 2 juin 2022, de la suspension des quatre ordinations diaconales et six ordinations sacerdotales qui auraient dû être célébrées le 26 juin suivant à Toulon, par décision du dicastère pour les Évêques. Le 26 juin, Mgr Rey reconnaissait notamment des «erreurs de discernement» et expliquait que «la place du monde traditionaliste» dans son diocèse avait constitué «un des points sensibles». 

En février de l’année suivante, Rome dépêchait Mgr Antoine Hérouard, archevêque de Dijon, pour une visite apostolique, tandis que le sort des ordinations suspendues n’avait toujours pas été décidé. Dans ce diocèse aux vocations florissantes, il est reproché entre autres à Mgr Rey, issu de la Communauté de l’Emmanuel, d’avoir accueilli au séminaire de La Castille certains séminaristes au profil fragile, refusés par d’autres diocèses. Par la suite, après des ordinations souvent nombreuses, un nombre anormal d’abandons du ministère sacerdotal a été observé. Les cas d’abus remontant à Rome ont également affecté l’épiscopat de Mgr Rey. 

Une configuration inédite

«Je sais comme tout le monde que ce diocèse vit une période difficile et douloureuse depuis plusieurs mois», écrit Mgr Touvet dans une lettre aux fidèles du diocèse de Châlons, au moment de sa nomination. Il explique qu’il travaillera «avec les prêtres et les diacres, le séminaire de la Castille et ses 60 séminaristes, et toutes les communautés quel que soit leur statut canonique», et qu’il s’occupera de l’administration du diocèse, c’est-à-dire «les finances, l’immobilier, les ressources humaines». 

Si l’évêque coadjuteur reconnaît que « la nouvelle configuration est vraiment inédite», il salue la réaction «très digne» de Mgr Rey et sa «compréhension» dans un message aux catholiques de Fréjus-Toulon. Il souhaite collaborer afin «d’apporter l’apaisement nécessaire» au diocèse méditerranéen. 

Le cardinal Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille et membre du dicastère pour les Évêques, a œuvré pour trouver une sortie de crise sans perte et fracas pour ce diocèse du Var qui dépend de sa province ecclésiastique. Selon nos informations, le cardinal français a veillé, avec cette solution de compromis, à ne pas humilier Mgr Rey dont il reconnaît certes des erreurs de discernement dans l’accueil et l’accompagnement mais aussi le zèle missionnaire.

Exceptionnellement, étant donné la situation délicate du diocèse, le nonce apostolique en France, Mgr Celestino Migliore, aurait demandé aux trois noms de la terna – les trois noms habituellement proposés à Rome pour le poste dans le plus grand secret et à leur insu – s’ils accepteraient la tâche.

La messe d’accueil de Mgr Touvet comme évêque coadjuteur sera célébrée le dimanche 10 décembre 2023 à 16h en la cathédrale Notre-Dame-de-la-Seds de Toulon, informe la Conférence des évêques de France. (cath.ch/imedia/ak/mp)