Namibie: les derniers colons d’Afrique, de Christine von Garnier (170987)

Lausanne, 17septembre(APIC) Rentrée récemment en Suisse, après vingt ans

passés en Namibie parmi «les derniers colons d’Afrique», Mme Christine von

Garnier est depuis quelques mois secrétaire romande de l’oeuvre d’entraide

protestante Pain pour le Prochain à Lausanne. Elle a publié cette année à

l’Harmattan son troisième ouvrage, «Namibie, les derniers colons d’Afrique». Journaliste et sociologue, Christine von Garnier a quitté la Suisse

en 1967 en compagnie de son mari, un Namibien descendant d’une lignée de

nobles Allemands chassés de Silésie par l’arrivée des Russes en 1944. Son

livre – loin d’etre une étude scientifique austère – est en fait un livretémoignage, la publication de sa correspondance durant vingt ans avec son

frère jumeau resté en Suisse, ce qui lui donne une touche d’authenticité et

de sincérité bouleversante.

Parce qu’il est plein de nuances, parce qu’il est le fait d’une personne

qui connait bien le système d’apartheid de l’intérieur et qui aime profondément ce peuple namibien noir et blanc, ce livre est d’une très grande

force. Il nous fait notamment découvrir la progressive désillusion de l’auteur face à l’éventualité d’une évolution interne du régime d’apartheid imposé à la Namibie par l’occupant sud-africain. Au départ, en effet, elle

croyait à une mue possible de l’Afrique du Sud, pensait meme que le président Pieter Botha n’était pas raciste et que la Namibie serait bientot indépendante, car on ne va pas contre le cours de l’histoire… «Michel,

écrivait-elle en octobre 1975 à son frère, à l’occasion de l’ouverture de

la Conférence de la Turnhalle, la décolonisation de la Namibie a commencé!»

En juillet 77, les choses ont bien changé : «Je te l’avais bien écrit il y

a quelques mois : les nationalistes blancs font tout pour saboter la réussite de la décolonisation de la Namibie. Ils résistent, mentent, tergiversent, font des coups bas par derrière…». En juillet 85, la situation n’a

pas avancé d’un pouce : «En Namibie, nous avançons à reculons, c’est-à-dire

que les concessions faites au peuple namibien noir et métis sont minimes, à

part les dépenses spectaculaires qui impressionnent toujours. C’est ainsi

que nous progressons sur le chemin tortueux de l’indépendance…»

Le livre de Christine von Garnier est surtout utile pour comprendre

l’attitude profonde des colons blancs de Namibie, au-delà de leur discours

sur la défense du «monde libre et de l’Occident chrétien» et de leur role

de «rempart contre le communisme» : «ce sont des hommes durs et je les

crains, car avec eux, naturellement, le dialogue est impossible, écrit-elle

à propos des boers qui controlent la Namibie; ils pensent qu’ils sont la

race supérieure et par conséquent qu’ils ont toujours raison… Toute l’ambiance du pays se ressent de cette domination sud-africaine, non seulement

dans les lois que tu connais et qui séparent méticuleusement les hommes,

mais aussi il règne une sévérité, un manque d’humour et d’imagination…»

Tels sont, vus de l’intérieur, les derniers colons d’Afrique. (apic/be)

17 septembre 1987 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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