Namur (Belgique) : journée des visiteurs de malades francophones (161087)
Namur, 16octobre(APIC/CIP) Ils sont venus des cinq diocèses de Wallonie
et de Bruxelles. Au total, 230 responsables d’équipes de visiteurs de malades. Pour la dizième année consécutive ou leur journée de formation est organisée, c’est le Grand Séminaire de Namur qui les a accueillis le 10 octobre. Ils y ont réfléchi aux attitudes à adopter devant le mal et la
souffrance. Pour les aider, un pretre est venu de Gand, en Flandre orientale : Jean-Pierre Goetghebuer, 42 ans, qui est hémiplégique depuis 28 ans.
C’est à partir de son itinéraire personnel que le pretre gantois s’est
adressé aux visiteurs de malades. Pour attirer leur attention sur la manière dont un malade ou un handicapé percoit et ressent les réactions des
autres devant son mal et sa maladie. En effet, les réactions ont beau etre
animées des meilleures intentions, elles ne témoignent pas toujours d’une
véritable acceptation du malade, ni meme simplement d’un respect élémentaire. Il arrive, par exemple que l’on dise à un malade : «Allons, ne vous
laissez pas abattre… il faut réagir…» certains ajoutent parfois une
comparaison avec Jésus-Christ et sa passion…».
Or, commente Jean-Pierre Goetghebuer, de telles réactions dénient tout
simplement au malade un droit quelconque à la révolte. On fait comme si sa
maladie allait de soi, comme si la souffrance était chose normale.
Une psychiatre d’origine suisse, Elisabeth Kuebler-Ross, a donné l’exemple à suivre. Il y a une vingtaine d’années, amenée à enseigner la psychiatrie aux Etats-Unis, elle s’est mise à écouter et à chercher a
comprendre les réactions personnelles des malades, notamment celles des patients atteints d’un mal incurable, voire ceux dont les jours sont comptés.
D’autres psychologues ont suivi peu à peu son exemple. Leur conclusion est
la meme : aucun malade ne commence par accepter sereinement son état; s’il
y arrive, ce n’est qu’après avoir parcouru d’autres étapes, dont celle de
la révolte.
Permettre au malade d’etre comme il veut
Se référant, entre autres, au livre du rabbin Harold Kuschner, «Quand le
mal frappe les braves gens», l’abbé Goetghebuer a distingué sept étapes par
lesquelles un malade peut passer avant d’en arriver à une acceptation plus
ou moins sereine et jamais définitive de son état. La succession la plus
fréquente des étapes est la suivante : l’ignorance de son état, l’incertitude ou perception hésitante de la maladie, la dénégation de la réalité, la
révolte, l’autoconsolation, la dépression, l’acceptation.
Lorsqu’un malade se révolte ou est déprimé, inutile de lui demander d’en
etre à un autre stade. «Le malade a le droit d’etre comme il veut, quand il
veut», insiste Jean-Pierre Goetghebuer. Autrement dit : il a besoin d’etre
compris, accueilli dans l’état ou il se trouve ici et maintenant.
Il arrive que les visiteurs de malades établissent aussi une comparaison
avec un autre «cas» (parfois leur cas personnel). Comment le malade réagitil ? «C’est comme si on banalisait leur propre situation, comme si on relativisait leur propre souffrance», observe le pretre gantois. «D’ailleurs,
poursuit-il, on en arrive vite à l’absurde. Imaginez qu’on me dise que moi,
hémiplégique, j’ai encore de la chance par rapport à un tétraplégique.
Irez-vous dire à un tétraplégique qu’il a de la chance par rapport… à
quoi, je vous le demande ?»
Approcher chaque malade comme personne unique
Mieux vaut donc approcher chacun comme personne unique, vivant une situation unique. Celui qui souffre a le droit d’éprouver la limite et le mal
que sa maladie ou son handicap représente pour lui. Ce serait bien mal
l’accueillir que de lui proposer en quelque sorte de craner. En revanche,
l’accepter telle qu’elle est peut libérer complètement une personne. Il
n’est pas rare que cette libération déclenche meme une émotion, sinon des
pleurs : un signe qui ne trompe que les visiteurs trop peu attentifs au malade pour lui-meme.
L’écoute, rien que l’écoute
Jean-Pierre Goetghebuer ramène finalement toutes ses observations à une
seule et meme perspective : «L’écoute, toujours l’écoute, rien que l’écoute». Non pas une écoute superficielle, mais une écoute active , qui exige
de la part du visiteur qu’il communique au malade ce que l’écoute lui permet de comprendre, d’accueillir, de respecter sans poser de conditions.
Visiteur de malades : un service qui se développe
Tel est donc l’horizon proposé aux visiteurs de malades en Belgique en
1987. L’organisme qui coordonne leurs équipes a été fondé à Bruxelles en
1975, sous l’impulsion notamment d’un religieux lazariste aujourd’hui pensionné (mais toujours actif), le Père Charles Gielen.
En douze ans, ce service s’est fortement développé. A l’heure actuelle ,
il regroupe quelque 300 équipes en Wallonie et à Bruxelles. Chaque équipe
compte en moyenne une douzaine de membres. L’équipe se réunit deux heures
par mois pour prier, partager les expériences vécues, et poursuivre sa formation avec les autres. Par ces activités, l’équipe entend donner une expression visible à la présence de la communauté paroissiale auprès des
malades.
Les visiteurs s’engagent à rencontrer les malade de manière assidue,
compte tenu des besoins d’un chacun. S’ils respectent les convictions de
tous, les visiteurs ne font cependant pas mystère de leur motivation
chrétienne. Tout en nouant avec les malades des relations fondées sur
l’amitié vraie, ils offrent à ceux qui le souhaitent de les accompagner
dans leur cheminement de foi. (apic/cip/cor)