Neuchâtel: polémique autour du «rebaptême» (300492)
«Inadmissible sur le plan théologique»
Neuchâtel, 30avril(APIC) Hérésie, sacrilège aux yeux des uns, besoin de
réaffirmer tangiblement son identité d’enfant de Dieu pour les autres, la
pratique du «rebaptême» ne laisse pas indifférent, loin de là. L’Eglise réformée évangélique du canton de Neuchâtel (EREN), interpellée par cette
pratique, estime que le phénomène est de faible ampleur et ces «cas» restent rares. L’EREN rappelle que le baptême est unique et la pratique du
«rebaptême» ne peut pas être admise théologiquement.
Pour Jean-Jacques Beljean, président du Conseil synodal de l’EREN, le
baptême, sans contestation possible, est unique. Il équivaut au passage
spirituel de la mort à la vie sur les traces du Christ, il est le geste qui
traduit l’appartenance à l’Eglise, au Christ et à sa communauté. «Psychologiquement, je comprends, sans l’approuver le ’rebaptême’. Mais sur le plan
théologique, je ne peux l’admettre».
Deux moyens sont à son avis des manières de confirmer son baptême et sa
signification: demander l’imposition des mains ou plus simplement participer activement à la Sainte-Cène. La question du «rebaptême» vient selon
lui, d’une conception trop égocentrique de la personne. C’est une façon de
considérer que l’être humain devient le critère de l’action de Dieu. En
quelque sorte celui qui fait cette démarche n’accepte pas ce que Dieu a
fait lors du baptême, mais lui dit : «C’est maintenant que tu peux le faire!» C’est finalement placer l’homme et non plus Dieu au centre, explique
J.-J. Beljean.
La peur de perdre un pouvoir
Alexandre Paris, pasteur de l’EREN à Boudry et membre de l’Union de
prière de Charmes (un petit village de l’Ardèche qui a donné son nom à un
mouvement de prière né dans la mouvance du «Réveil»), estime pour sa part
que les pasteurs ne seraient pas si pointilleux sur la question du «rebaptême» s’ils ne craignaient pas de perdre leur pouvoir. La demande du «rebaptême» est souvent faite après un traumatisme, c’est une façon de tourner
la page sur des événements douloureux, de prendre un nouveau départ qui les
lave de leur passé.
Le baptême des enfants, décidé par les parents, présente, selon Alexandre Paris deux carences: il empêche la prise de conscience personnelle et
est d’autre part trop dissocié du troisième terme de la Trinité, c’est-àdire l’Esprit-Saint. «Dans l’Union de prière, nous offrons une confirmation
consciente du baptême, par l’immersion, et à la sortie des eaux par l’imposition des mains. Cette opération permet de recevoir le Saint-Esprit et les
dons qui lui sont liés.»
Sébastien Rollier, 22 ans, a vécu en septembre dernier un «rebaptême»
dans le lac de Neuchâtel, à Sauges. C’est la lecture de la Bible qui m’a
incité à m’interroger, note-t-il. «Aucun passage ne justifiait le baptême
des bébés. Au contraire, Jésus a toujours prôné un baptême voulu et conscient par immersion. La Bible précise que le baptême s’apparente à un acte
de repentance et de foi, acte qu’un bébé n’est pas à même d’accomplir». «A
14 ans explique-t-il, quand Dieu s’est révélé à moi, c’est comme si je
m’étais fiancé à lui; mon «rebaptême» équivaut symboliquement à un mariage,
à un ancrage plus solide dans ma foi». Sébastien Rollier a été l’objet de
pressions pour tenter de le dissuader: «On m’a même demandé de quitter le
conseil de paroisse de mon village, je n’ai pas cédé.»
Une vocation de baptiseur
Jean-Marc Zwahlen, 39 ans, agriculteur à Fresens (NE), est «ancien
d’église» à la Fraternité chrétienne d’Yverdon. Il s’est fait baptiser par
immersion alors qu’il était encore très jeune. «J’ai reçu une prophétie
dit-il qui me disait que je serais un jour baptiseur. Il n’y a pas besoin
d’être pasteur pour baptiser». Déplorant le fait que les communautés ne
pratiquent pas le baptême par immersion, J.-M. Zwalhen a procédé à deux
«rebaptêmes» en six ans. A son avis le baptême des petits enfants devrait
être considéré comme une «présentation». Mais c’est à l’enfant plus tard
que devrait revenir la décision de se faire baptiser ou non.
«Une certaine dose d’orgueil»
Jean-Pierre Roth, pasteur à Bevaix reste catégorique: «Le baptême est un
sacrement. On ne baptise qu’une fois puisqu’on entre dans l’Eglise qu’une
fois, le baptême n’est pas répétable; il est insertion dans la mort et la
résurrection du Christ». Refaire un baptême, lance J.-P. Roth c’est admettre que Dieu peut se contredire ou «justifier les fourberies et le mensonge
que proposent ceux qui veulent rebaptiser». «Il faut avoir une certaine dose d’orgueil et d’autorité ’déifique’ pour admettre que Dieu s’est trompé
en acccordant, par l’intermédiaire de l’Eglise et de ses pasteurs, le baptême à quelqu’un. Baptême qui n’est pas reconnu par celui qui administre le
’rebaptême’. Autant dire que nous sommes à la limite du péché contre le
Saint-Esprit.» (apic/vpne/mp)