Dans certains Etats nigérians, le blasphème peut être puni de mort | photo illustrative © Justice & Empowerment Initiatives/Flickr/CC BY 2.0
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Nigeria: un chanteur condamné à mort pour blasphème

Le musicien nigérian Yahaya Sharif-Aminu a été condamné à mort par un tribunal islamique de la ville de Kano, au nord du pays, pour avoir «blasphémé» contre le prophète Mahomet, rapporte la BBC le 10 août 2020. Dans certains Etats du Nigeria, les loi de la charia (loi islamique) peuvent être appliquées aux musulmans.

La haute Cour de la charia de l’Etat de Kano, à majorité musulmane, a condamné à la mort par pendaison Yahaya Sharif-Aminu, un chanteur âgé de 22 ans. Il a été déclaré coupable d’avoir proféré des paroles blasphématoires dans une chanson qu’il a fait circuler en mars 2020 sur l’application WhatsApp. Le tort du musicien et auteur a été de faire les louanges d’un imam de la confrérie musulmane des Tidjanes, à laquelle il appartient. Ses accusateurs ont considéré qu’il l’avait fait d’une façon qui élevait le dignitaire islamique au-dessus du Prophète.

Le jeune homme, qui a plaidé coupable, a cependant la possibilité de faire appel. Avant son arrestation, en mars, l’affaire avait provoqué des émeutes et des manifestations.

Les Tidjanes ciblés

Certains Etats à majorité musulmane du nord du Nigeria ont établi une justice «double», composée à la fois de tribunaux civils et islamiques, qui fonctionnent selon les principes de la charia. Ces derniers ne s’appliquent toutefois pas aux non-musulmans.

Depuis que ces tribunaux de la charia ont été réintroduits, en 1999, une seule sentence de mort a été exécutée. Elle concernait un homme ayant tué une femme et ses deux enfants et qui a été pendu en 2002.

La dernière condamnation à mort, à Kano, a été prononcée en 2016 contre un cas similaire à celui de Yahaya Sharif-Aminu. Elle a frappé un certain Abdulaziz Inyass, également de la confrérie des Tidjanes, qui avait prétendu publiquement que le fondateur sénégalais de la confrérie, Cheikh Ibrahim Niasse, était «plus grand que Mahomet». La sentence de mort pour blasphème n’a cependant pas été réalisée, le gouverneur de l’Etat ayant refusé de signer les documents nécessaires. Abdulaziz Inyass est toutefois toujours emprisonné. La confrérie Tidjane est très populaire en Afrique de l’Ouest.

Seulement pour les musulmans

De nombreux verdicts dictés par la charia ont été prononcés dans les 12 Etats nigérians où des tribunaux islamiques sont en place. Ils ont principalement touché des femmes ayant eu des relations extraconjugales.

Le système islamique a sa propre cour d’appel. Il prend en charge aussi bien les motifs civils que pénaux. Ses décisions peuvent toutefois être amenées devant les tribunaux civils. Les juges de ces Etats étudient les deux formes de législation. Lorsqu’une affaire implique un musulman et un non-musulman, le non-musulman a la possibilité de choisir son type de tribunal. Une cours islamique ne peut juger un non-musulman qu’avec son assentiment écrit.

Les châtiments selon la charia incluent la flagellation, l’amputation et la mort. (cath.ch/bbc/rz)

Dans certains Etats nigérians, le blasphème peut être puni de mort | photo illustrative © Justice & Empowerment Initiatives/Flickr/CC BY 2.0
12 août 2020 | 15:20
par Raphaël Zbinden
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