Pas de salle à Paris pour Tariq Ramadan

Paris: Débat sur la laïcité: la France de plus en plus sur la défensive

Paris, 23 janvier 2004 (Apic) Le débat français sur les signes religieux «ostentatoires» qu’une loi entend interdire à l’école prend décidément des allures qui semblent échapper de plus en plus aux politiques, avec l’interdiction faite par une mairie de Paris de louer une salle dans laquelle l’intellectuel musulman controversé Tariq Ramadan devait s’exprimer.

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) a condamné vendredi l’annulation par la mairie du XIIe arrondissement de Paris de la location d’une salle municipale pour la conférence-débat de Tariq Ramadan.

La LDH explique dans un communiqué qu’elle «condamne d’autant plus cette attitude qu’elle sera, elle-même, un prétexte pour que, demain, d’autres réunions, d’un contenu identique ou différent, fassent l’objet de la même censure».

La mairie a argué jeudi d’un risque de trouble à l’ordre public provoqué dans le contexte actuel par la venue de Tariq Ramadan, citoyen suisse et petit-fils de Hassan El-Banna, fondateur des Frères musulmans égyptiens. La conférence-débat sur le thème «islamophobie et communautarisme : quels enjeux, quelles alternatives» devait avoir lieu vendredi soir à l’espace Reuilly, un complexe de salles géré par la mairie d’arrondissement.

Loin de la sérénité souhaité

Les membres du gouvernement même sont divisés sur la question de la loi. Dominique de Villepin a souligné jeudi lors d’un séminaire gouvernemental les dangers du projet de loi prohibant les signes religieux à l’école, qui «met la France en porte-à-faux sur le plan de sa politique étrangère», indique l’Agence France presse, citant des sources gouvernementales.

Selon plusieurs participants à cette réunion, le ministre des Affaires étrangères a fait «une longue sortie» contre ce texte voulu par le président Jacques Chirac en expliquant qu’il mettait la France dans «une situation très délicate sur la scène internationale, surtout avec les pays arabes et les Etats-Unis, opposés à toute entrave aux libertés individuelles».

Alors que la France a acquis une certaine aura dans le monde arabo- musulman après sa prise de position très ferme contre une guerre en Irak sans l’aval de l’ONU, Dominique de Villepin a souligné «la position extrêmement difficile» de Paris au regard de ce projet de loi, considéré comme islamophobe par ses alliés arabes traditionnels.

M. de Villepin est intervenu après l’intervention de son collègue Luc Ferry (Education nationale), selon qui il faut désormais interdire turbans, bandanas et autres barbes manifestant ostensiblement une appartenance religieuse. Le ton n’est pas à l’apaisement, relève-t-on du côté de Paris. Et l’interdit qui frappe le très controversé Tariq Ramadan pourrait attiser un débat qui divise de plus en plus, en lieu et place de rassembler, comme le voulait les initiants de cette loi. (apic/ag/fn/pr)

23 janvier 2004 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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