Paris: La «pop louange» dans l’Hexagone
La rock-évangélisation se paie un joli succès
Jean-Claude Noyé, correspondant de l’agence Apic, Paris
Paris, 22 avril 2004 (Apic) Le groupe de rock «Glorious» proclame haut et fort sur scène et dans ses disques sa foi chrétienne. Succès commercial, bonne présence médiatique et soutien de la hiérarchie catholique sont au rendez-vous. Mais «Glorious» fait figure d’exception. A la différence des Etats Unis, rares en effet sont en France les musiciens rock, funk, ou reggae, de sensibilité chrétienne, qui mettent ainsi en avant leur conviction religieuse.
«Glorious», groupe de » rock chrétien» se paie un beau succès dans les ventes de disques et sur les télés. Succès inattendu car à la différence des Etats-Unis, rares en effet sont en France les musiciens rock, funk, ou reggae, de sensibilité chrétienne, qui mettent ainsi en avant leur conviction religieuse.
La plupart des groupes de pop-louange français cherchent à être d’abord reconnus pour la qualité de leur prestation artistique et ils sont aussi attachés à délivrer un message d’espérance auprès d’un public élargi.
D’emblée, le ton est donné. Sur scène, une grande croix lumineuse se dessine en arrière-fond. «Si vous êtes venus ce soir, ce n’est pas pour nous applaudir, mais pour applaudir le Christ. «Jésus, the best of the world in my life», lance au public Thomas, 20 ans. Déjà les décibels envahissent la salle. Thomas est l’un des trois frères Pouzin qui forment le groupe «Glorious». Un groupe dit de «pop louange», c’est-à-dire un groupe de rock qui revendique expressément sa foi chrétienne et qui la met en scène. Et le succès est au rendez-vous. «Glorious», son premier album, s’est vendu à 20 000 exemplaires. Quant à son deuxième opus, «Libre», sorti à l’automne dernier, il est bien parti avec 10 000 exemplaires déjà vendus. Dans les 15 premiers jours qui ont suivi sa parution, cet album figurait dans les 50 meilleures ventes de la FNAC.
Le groupe bénéficie en outre d’une bonne vitrine médiatique, télévisuelle notamment. On l’a vu dans des émissions grand public comme «Tout le monde en parle», (France 2, Thierry Ardisson), ou «Sept à huit» (TF1, Laurence Ferrari). Enfin son répertoire à la gloire de Dieu et de Jésus n’est pas pour déplaire à la hiérarchie catholique. Le pape lui-même a reçu les trois frère Pouzin en septembre 2002 à Castelgandolfo pour une messe privée et une audience au cours de laquelle il a souhaité que «Dieu bénisse cette oeuvre d’évangélisation». Le cardinal Poupard, président du Conseil pontifical pour la culture, y est allé aussi de ses encouragements, non sans faire valoir «la nécessité de toucher les jeunes là où ils sont, par les outils nouveaux et modernes».
Phénomène musical ou sociologique?
Succès affirmé, et même mini-phénomène médiatique. Selon Gabriel Lefèvre, co-fondateur, avec Eric Long, en 1997, de «Rejoyce», label indépendant qui produit «Glorious «, «les médias s’intéressent à «Glorious» pour ce qu’ils représentent sociologiquement – un groupe qui proclame haut et fort sa foi dans le Christ – et non pas pour ses qualités musicales».
De fait, affirme Gabriel Lefèvre, «nous n’avons pas réussi, avec cette formation, à pénétrer les radios musicales. Son public est, pour l’essentiel, un public de chrétiens convaincus, ce qui est sa force mais aussi sa limite», nuance Gabriel Lefèvre, producteur de «Glorious». Catholique pratiquant, il n’aime guère pourtant l’appellation «rock chrétien» car, dit-il,»elle suppose une dimension de revendication explicite. Ce qui est une réalité aux Etats-Unis – plus de 5000 groupes «chrétiens» se partagent 20 % du marché du disque»- mais ne touche en France qu’une poignée de musiciens, dont le groupe «Glorious».
Volonté d’’être positifs
Les autres groupes rock, pop ou reggae de sensibilité chrétienne préfèrent ne pas mettre en avant leur foi comme un étendard trop voyant. Ils aspirent avant tout à être reconnus pour la qualité de leur performance musicale. Comme des artistes qui diffusent un message d’avenir et de confiance, à rebours d’une certaine culture rock, faite de désespoir et de «No future».
Ce qui distingue les musiciens produits par le label «Rejoyce», c’est cette volonté d’’être positifs et de donner au public le goût de chercher sa joie, ici et malgré tout. Que ce soit Steven Gunnell, ex-star du Boy’s band «Alliage»; Clara Mill, qui lance son nouvel album «Rouge Life», Spear Hit, groupe de reggae ; White Spirit (des protestants alsaciens), ou Paddy Kelly, un Irlandais qui vit en Allemagne, l’un des membres de la Kelly Family, célèbre outre-Rhin.
Producteur Suisse romand
En Suisse romande, Jean-Michel Golay, qui dirige le petit label «Ugly Records», est exactement du même avis que les jeunes dirigeants de «Rejoyce». «Pour certains, l’estampille «rock chrétien» évoque du prosélytisme. Je préfère parler d’un message d’espérance, qui reflète un vécu. Un groupe comme «U2», peu suspect de bigoterie, se réfère fréquemment à sa foi parce que cela fait partie d’eux, c’est tout», déclarait-il à l’hebdomadaire l’Express (1). Fils de pasteur, la trentaine, il produit près de quinze groupes, surtout de sensibilité protestante, comme «Bad Little Duck», «P’tit Déj», «Fish4lunch», etc.
Une constante, chez ces faiseurs de «rock chrétien»: producteurs ou musiciens craignent d’être «ringardisés» avec l’appellation «musique chrétienne» et ils veulent toucher un public plus large que celui de la «famille». JCN
(1) édition du 29/05/2003 (apic/jcn/vb)