«L’endroit où nous sommes maintenant fait résonner en moi un cri de douleur», a affirmé le pape   | © Keystone/AP Photo/Gregorio Borgia
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Pensionnats: le pape François reconnaît une «erreur dévastatrice»

Le pape François a renouvelé «avec honte et clarté» sa demande de pardon «pour le mal commis par de nombreux chrétiens contre les peuples autochtones» lors d’un rassemblement organisé le 25 juillet 2022, dans le cimetière de l’ancien pensionnat de Maskwacis, une localité de 7’600 habitants située à une centaine de kilomètres d’Edmonton.

Le pape s’est exprimé en présence d’anciens élèves et de représentants de toutes les communautés autochtones du Canada. Sa déclaration a suscité de vifs applaudissements de la part des 2000 participants, visiblement très émus de cette marque de reconnaissance de la part du pontife.

En avril dernier, après avoir demandé pardon aux autochtones qu’il recevait dans le Palais apostolique du Vatican, le pape avait annoncé qu’il comptait renouveler ce geste une fois sur le sol canadien dans un des lieux marqués par les souffrances du passé. Première étape du voyage pénitentiel du pape François, l’ancien pensionnat pour autochtones de Maskwacis, «la colline des ours», ouvert entre 1915 et 1973, a été le lieu choisi pour honorer cette promesse.

«L’endroit où nous sommes maintenant fait résonner en moi un cri de douleur», a affirmé le pape devant les membres des communautés Inuites, Métis et des Premières Nations, des survivants et des jeunes autochtones présents. Devant ces derniers et devant plusieurs représentants politiques – notamment le Premier ministre Justin Trudeau et le Gouverneur général Mary Simon – il a reconnu que l’implication de l’Église dans l’administration des écoles résidentielles a été une «erreur dévastatrice, incompatible avec l’Évangile».

Le pape a d’abord déploré la façon dont «de nombreux chrétiens ont soutenu la mentalité colonisatrice des puissances qui ont opprimé les peuples autochtones». Il s’est dit ensuite affligé par la manière dont de nombreux autres «ont coopéré, même à travers l’indifférence, à ces projets de destruction culturelle et d’assimilation forcée des gouvernements de l’époque » que furent les écoles résidentielles.

Pour le pontife, le fait que la «charité chrétienne ait été présente et qu’il y ait eu de nombreux cas exemplaires de dévouement envers les enfants» dans ces écoles résidentielles n’enlève rien aux conséquences «catastrophiques» observées. Il a dénoncé notamment la marginalisation des peuples autochtones, les «abus physiques et verbaux, psychologiques et spirituels» infligés, et le dénigrement et la suppression de leurs langues et cultures. 

Un nouveau point de départ

François a assuré ses interlocuteurs que ces excuses ne constituaient pas «un point final» pour lui mais seulement «la première étape, le point de départ» de leur démarche commune. Il a décrit la suite du processus, demandant «une sérieuse recherche sur la vérité du passé» et appelant à aider les survivants des écoles résidentielles. Le chemin à parcourir est long et demande «du temps et de la patience», a-t-il affirmé, parce qu’il doit «gagner nos cœurs».

Le 266e pape a évoqué l’opportunité manquée, à l’arrivée des colons, «de développer une rencontre fructueuse entre les cultures, les traditions et la spiritualité». Il a demandé aux catholiques du Canada de s’engager aujourd’hui auprès des peuples autochtones et de trouver des « moyens concrets» pour les connaître et les apprécier. 

Il a plus largement exhorté toute la société canadienne à «accueillir et respecter l’identité et l’expérience» des autochtones. «Ma présence ici et l’engagement des évêques canadiens témoignent de la volonté d’avancer sur cette voie», a-t-il insisté.

Un message pour tous les autochtones du Canada

Le pontife s’est excusé de ne pas avoir pu répondre à toutes les invitations qui lui avaient été transmises. Il a rappelé que son voyage s’adressait bien «à toutes les communautés et à tous les autochtones». 

Le pontife a cité le site de l’ancien pensionnat de Kamloops en Colombie-Britannique, premier lieu de découverte de sépultures non marquées en mai 2021. Il a aussi évoqué les nombreux pensionnats des provinces – Manitoba, Saskatchewan, Yukon ou encore Territoires du Nord-Ouest – qu’il ne visitera pas: «Vous êtes tous dans mes pensées et mes prières».

Les tombes, signes d’espérance

Devant les tombes, le pontife a appelé au silence qui «aide à intérioriser la douleur» et à la prière. Il a ensuite rappelé que le tombeau du Christ «devant lequel tous les rêves s’étaient évanouis et où il n’était resté que pleurs» aurait dû constituer une «impasse de l’espérance». 

«Il a fait de ce tombeau le lieu de la renaissance, de la résurrection», a affirmé François, évoquant la possibilité d’«une histoire de vie nouvelle et de réconciliation universelle». Il a conclu son intervention en demandant à Dieu la «grâce» de trouver la sagesse et la tendresse nécessaire pour mener ce chemin de guérison et de réconciliation.

Un geste de réconciliation fort

À l’issue de son discours, le pape François a rendu une paire de mocassins pour enfant que la délégation des Premières Nations avait symboliquement confié au pontife dans l’attente de sa venue au Canada en référence aux souffrances endurées par les enfants autochtones dans les écoles résidentielles. 

«Ces mocassins nous parlent aussi d’un cheminement», a affirmé le pontife, évoquant la possibilité d’un «avenir de justice, de guérison et de réconciliation» au terme de la marche commune entreprise par l’Église catholique et les peuples autochtones. (cath.ch/imedia/cv/bh)

«L’endroit où nous sommes maintenant fait résonner en moi un cri de douleur», a affirmé le pape | © Keystone/AP Photo/Gregorio Borgia
26 juillet 2022 | 08:36
par I.MEDIA
Temps de lecture: env. 4 min.
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