La guerre contre la drogue du président Duterte aurait déjà fait près de ` morts (Photo:Wikimedia)
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Philippines: l'Eglise manifeste contre la guerre antidrogue de Duterte

Le 5 novembre 2017, l’Eglise catholique a appelé à manifester contre la politique antidrogue du président Duterte sur le boulevard périphérique EDSA, lieu emblématique de Manille. Entre 600 et 3’500 personnes se sont mobilisées.

Début octobre, Mgr Socrates Villegas, président de la Conférence des évêques philippins, avait révélé qu’un nombre indéterminé de policiers auteurs de tueries extrajudiciaires directement commanditées, selon eux, par Rodrigo Duterte, avaient demandé aux paroisses de les cacher, par craintes de représailles. Des couvents accueillent déjà en catimini des proches de victimes de la guerre antidrogue, craignant elles aussi pour leur vie, rapporte le 9 novembre 2017 l’agence d’information catholique Eglises d’Asie (EdA). A la suite de Mgr. Villegas, d’autres évêques avaient à leur tour proposé leur protection aux policiers repentis de la guerre antidrogue. En réaction, des membres du gouvernement ont accusé l’Eglise de complot visant à déstabiliser la présidence du pays.

L’Eglise catholique philippine a également mis en place des programmes de réhabilitation pour les toxicomanes. Le pape François vient d’ailleurs d’apporter son soutien au projet lancé par le cardinal Antonio Luis Tagle, archevêque de Manille, en collaboration avec les autorités locales et mêlant accompagnement spirituel, mais aussi sports et arts. Jusqu’ici, 132 anciens toxicomanes ont pu en bénéficier.

Les évangéliques au créneau

En plus de l’Eglise catholique, les deux principales organisations évangéliques – le Conseil Philippin pour les Eglises Evangéliques et le mouvement «Philippines for Jesus» – ont à leur tour émis des réserves sur l’action présidentielle, après avoir ouvertement soutenu Rodrigo Duterte durant sa campagne électorale en 2016. «Personne n’a le droit de prendre la vie de quelqu’un d’autre», a réaffirmé Frère Eddie Villanueva, fondateur de «Philippines for Jesus» qui revendique plus de cinq millions de membres.

Le 12 septembre, jour de commémoration de la proclamation de la loi martiale par le défunt dictateur Ferdinand Marcos en 1972, des milliers de Philippins étaient déjà descendus dans les rues de la capitale, cette fois-ci à l’appel de diverses franges de l’opposition, pour protester contre les tueries extrajudiciaires de l’actuelle guerre antidrogue.

Une baisse (relative) de la popularité du président Duterte

Le climat semble avoir quelque peu évolué depuis la mort cet été de plusieurs adolescents, victimes de bavures policières. Les derniers sondages révèlent une légère baisse de la cote de popularité présidentielle, qui se maintient néanmoins au-dessus des 70%.

Début 2016, la campagne antidrogue avait déjà été suspendue deux mois durant, après l’enlèvement et le meurtre d’un homme d’affaires sud-coréen au sein même du quartier général national de la police. Le 10 octobre, Rodrigo Duterte a ordonné que seule l’agence gouvernementale des stupéfiants serait désormais habilitée pour la conduite des opérations, destituant de fait la police.

Plus d’un an après l’arrivée au pouvoir de Rodrigo Duterte, les médias locaux et les ONG de défense des droits humains estiment que la guerre antidrogue a tué près de 12’000 personnes. De son côté, la police philippine admet seulement la mort de 3’900 individus durant des opérations «légitimes». Tous les autres cas sont systématiquement classés dans la catégorie «des meurtres non élucidés». (cath.ch/eda/rz)

La guerre contre la drogue du président Duterte aurait déjà fait près de ` morts
10 novembre 2017 | 09:46
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture: env. 2 min.
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