Algérie: Ouvriers arrêtés pour n’avoir pas jeûné

Procès reporté

Alger, 23 septembre 2010 (Apic) L’arrestation de deux personnes dans la région de Tizi-Ouzou, au début du mois de ramadan, le 12 août dernier, pour n’avoir pas observé le jeûne, suscite une mobilisation sans précédent en grande Kabylie.

En Algérie où l’islam est la religion d’Etat, le jeûne pendant le mois de ramadan est obligatoire pour les populations, et ne pas l’observer est un délit, considéré comme une «atteinte aux préceptes de l’islam», sanctionné par l’article 144 bis 2 du code pénal. Il prévoit une peine d’emprisonnement de 3 à 5 ans, et à une amende de 50’000 à 100’000 Dinards (685,19 à 1’370,39 CHF).

Selon le quotidien algérien, «La Tribune», les deux prévenus sont des ouvriers interpellés dans un chantier de bâtiment du centre la ville de Aïn El Hammam, située à une soixantaine de kilomètres au nord-est de Tizi Ouzou. Ils ont par la suite été mis à disposition de la justice qui doit les juger.

L’ouverture de leur procès très médiatisé, a eu lieu mardi 21 septembre. Le procureur a requis trois ans de prison ferme contre eux conformément au code pénal. Le verdict a été renvoyé au 5 octobre prochain.

Ils bénéficient d’une mobilisation populaire «extraordinaire pacifique», composée de plusieurs centaines de personnes anonymes et membres d’organisations politiques, syndicales et des droits de l’Homme. Ils ont déployé devant le tribunal plusieurs banderoles réclamant «la liberté» de culte et de conscience, dénonçant «des pratiques répressives» de la police et de la justice. Ils ont exprimé leur détermination «à accompagner» les deux prévenus, qui ont déclaré assumer «entièrement et publiquement leur acte de ne pas jeûner, dans l’exercice libre de leur culte».

Large soutien populaire

D’autres slogans d’encouragement aux deux prévenus ont été aussi scandés par la foule, rassemblée toute la matinée devant le tribunal pour exprimer «son total soutien et sa solidarité avec Salem Fellak et Hocine Hocini qui n’ont fait de mal à personne, étant victimes d’une cabale politico-judicaire digne des régimes despotiques», selon un militant des droits de l’Homme cité par la Tribune. Les manifestants étaient venus de plusieurs localités de la région de Kabylie et certains étaient prêts à rester sur place jusqu’à l’acquittement des deux «non-jeûneur» et aussi longtemps que leur procès durera.

Cinq avocats expérimentés dans ce genre d’affaires se sont constitués en collectif pour les défendre. Dans leur plaidoirie, ils ont battu en brèche l’argumentaire du représentant du ministère public basé essentiellement sur l’article 144 bis 2 du code pénal. Les deux ouvriers sont en liberté provisoire.

Pendant le Ramadan, cette tendance s’exacerbe avec les dénonciations et les interventions parfois «intempestives» de la police dont l’action s’appuie sur l’article 144 bis 2 du code pénal.

Des blogs d’internautes algériens ont rapporté d’autres cas de personnes interpellées pendant le mois de ramadan pour n’avoir pas observé le jeûne. Ils considèrent ces mesures comme de «l’inquisition contre les non jeûneurs».

«Depuis quelques années, la montée du salafisme aidant, le code pénal est intimement accolé au mois sacré du Ramadan en ce sens qu’il est régulièrement invoqué en soutien juridique au comportement inquisiteur de certains zélés qui ne tolèrent aucune différence», écrit notamment un site de forum algérien : http://forums.bladi-dz.com (apic/ibc/js)

23 septembre 2010 | 15:25
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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