Retro 2023: de Zelensky à Stallone, ils ont rencontré le pape

Chaque matin à 9h, les journalistes accrédités près le Saint-Siège, les fameux vaticanistes, scrutent l’agenda prévisionnel de la matinée du pape François. Au menu figurent généralement des audiences avec des groupes variés – membres de communautés, d’associations caritatives, de corporations, de clubs sportifs aussi, et bien d’autres encore.

Sont par ailleurs annoncés les rendez-vous du pape avec les cadres de la Curie romaine ou bien avec les évêques du monde entier, et, enfin, ses rencontres avec les personnalités politiques. Croyants ou non, catholiques ou pas, ces chefs d’État ou de gouvernement viennent rencontrer le souverain du plus petit État du monde, mais dont l’influence est incomparable.

Dans l’après-midi, le pape François, qui a quitté le Palais apostolique, retrouve sa résidence Sainte-Marthe où il continue de recevoir. De ces rendez-vous privés, rien ne filtre, ou presque. Et c’est souvent plus tard, à l’occasion d’une photo apparue sur Twitter ou bien de rencontres diverses que les journalistes arrivent à grappiller quelques éléments de l’emploi du temps laissé caché du pape argentin.

L’entente cordiale entre le pape et Giorgia Meloni

Quelques mois après avoir pris la tête d’un gouvernement d’union des droites en octobre 2022, Giorgia Meloni a été reçue au Vatican en janvier par le pape, donnant lieu à une rencontre cordiale. Plus tard, en mai, le pape et l’Italienne ont participé ensemble aux États généraux de la natalité à Rome, les deux dirigeants dénonçant d’une même voix les dérives d’une société hostile à la famille.

Seul point de désaccord: le pontife a insisté sur l’importance de recourir aussi à l’immigration pour relancer une démographie en berne dans la Botte. En fin d’année, le pape et la présidente du Conseil se retrouveront enfin alignés pour tenter de venir en aide à la petite Indi Gregory, petite fille de huit mois, finalement décédée en Grande-Bretagne des suites d’une grave maladie mitochondriale.

Le pape et Viktor Orbán, une rencontre pour l’Ukraine

Une des rencontres les plus commentées cette année a été celle avec le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, lors du voyage du pape à Budapest du 28 au 30 avril. En désaccord avec la politique migratoire du gouvernement – qui a fermé les frontières de la route des Balkans –, François s’était montré distant avec le Premier ministre par le passé, bien qu’il l’ait salué lors de sa visite de quelques heures à Budapest en 2021. Mais dans le contexte de la guerre en Ukraine, la diplomatie vaticane a trouvé des convergences avec la voix isolée de la Hongrie, qui souhaite une résolution diplomatique du conflit et rechigne à apporter un soutien militaire à Kiev. Le pontife a donc réalisé ce voyage pour exhorter l’Europe à faire des «efforts créatifs pour la paix». Ce qui ne l’a pas empêché d’appeler à la solidarité du Vieux continent face au défi migratoire, et de mettre en garde contre les «populismes auto-référentiels».

Volodymyr Zelensky au Vatican: un malaise palpable

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est venu rencontrer le pape François au Vatican le 13 mai pour la deuxième fois, après une première visite effectuée le 8 février 2020, quelques mois après son élection à la tête de l’Ukraine. Il s’agissait toutefois de sa première visite au Vatican depuis le début de l’offensive russe à grande échelle sur son pays, le 24 février 2022.

Une certaine froideur est ressortie de cet entretien. Au fil des mois, le pape François n’a cessé d’appeler à l’arrêt des combats, suscitant parfois des incompréhensions parmi les Ukrainiens et leurs alliés, inquiets du risque de conditions d’armistice trop favorables à la Russie. Quelques heures après son passage au Vatican, en participant à l’émission populaire Porta a Porta, sur la RAI, le président ukrainien s’est montré peu enthousiaste à l’idée d’une médiation vaticane, soulignant que le plan de paix devait être celui élaboré par les Ukrainiens eux-mêmes, en tant que victimes de l’agression russe.

Deux papes au Vatican avec Tawadros II

Après une rencontre au Vatican en 2013 et une autre en Égypte en 2017, le pape François et le patriarche Tawadros II, pape de l’Église copte orthodoxe, se sont vus pour la troisième fois cette année au Vatican. Durant cette visite du patriarche d’Alexandrie à Rome du 9 au 14 mai, plusieurs gestes symboliques ont été posés. Les deux hommes ont présidé côte à côte l’audience générale du mercredi matin place Saint-Pierre et le pape François a renoncé à sa traditionnelle catéchèse, laissant son hôte s’exprimer devant les fidèles.

Le pontife a également annoncé que les 21 martyrs chrétiens – dont 20 coptes – tués par Daech en 2015 en Libye, seraient inscrits au martyrologe romain. Une initiative historique: il s’agira des premiers saints reconnus par les deux Églises depuis la rupture du Ve siècle.

Avec Lula, le pape François retrouve une vieille connaissance à la tête du Brésil

Le pape François a reçu le 21 juin au Vatican le nouveau président du Brésil, Luiz Inácio Lula da Silva, revenu au pouvoir après l’élection présidentielle de 2022, 20 ans après sa première victoire électorale qui avait ouvert la voie à ses deux premiers mandats (2003-2011). Le leader de gauche, que le pape avait soutenu durant sa détention, s’est entretenu avec lui durant environ 45 minutes.

Ils ont notamment abordé la protection de l’Amazonie, devenue une préoccupation prioritaire du pape et du Saint-Siège depuis le Synode d’octobre 2019 dédié à cette région. Les questions sociales constituent également un point de convergence, le président Lula étant crédité d’avoir fait sortir 30 millions de Brésiliens de la pauvreté durant ses deux premiers mandats, alors marqués par de bons résultats économiques. En quatre ans de mandat, son prédécesseur Jair Bolsonaro n’était jamais venu au Vatican.

Une relation mouvante avec le cardinal chinois Zen

Privé de passeport par la justice chinoise depuis son arrestation en 2022, le cardinal Zen a pu se rendre aux funérailles de Benoît XVI en janvier et a été à cette occasion reçu chaleureusement par le pape François qu’il avait pourtant frontalement critiqué pour sa politique de rapprochement avec le gouvernement chinois. Le cardinal aurait pleuré comme un enfant en voyant que le pape gardait une statue de Notre-Dame de Sheshan qu’il lui avait offerte.

Affaibli et âgé de 91 ans, l’ancien évêque de Hong Kong a ensuite fait un long séjour à l’hôpital. Une fois remis, il a critiqué très durement les réponses du pape aux ‘dubia’ qu’il avait signés concernant le Synode sur l’avenir de l’Église. Et il s’est montré très irrité par le rapprochement avec l’Église officielle chinoise, opéré par son successeur, le cardinal Chow.

Le Sultan Ahmed al-Jaber et le pape François, une rencontre pour le climat

Un peu plus d’un mois avant le début de l’ouverture du sommet international sur le climat de Dubaï, le président de la COP28, le Sultan Ahmed al-Jaber, est venu au Vatican. Si peu de choses ont filtré de la rencontre, l’échange a vraisemblablement porté sur le rôle des religions dans la lutte contre le réchauffement climatique, une conviction souvent rappelée par le pape François au fil de ses grands textes sur l’écologie, dont le dernier, Laudate Deum, a été publié le 4 octobre dans la perspective de la COP28.

C’est justement du déplacement du pape à Dubaï que les deux hommes ont aussi dû discuter. Ce voyage, une première pour un pontife depuis la création des COP, était encore secret au moment de la rencontre. Officialisée quelques jours plus tard, la visite dans le Golfe a finalement été annulée en raison de la santé du pontife. Il aurait dû prendre la parole devant les responsables politiques du monde entier puis inaugurer avec Ahmed al-Jaber et le Grand imam d’Al Azhar le ‘pavillon de la foi’.

Sylvester Stallone mime un combat de boxe avec le pape François

Son nom a suscité étonnement et amusement parmi les vaticanistes: ‘Il Signore Sylvester Stallone’ figurait bien à l’agenda officiel du pape le 8 septembre. Venu saluer François, l’acteur américain de 77 ans, accompagné par sa femme, ses filles et son frère, a eu un bref échange avec le pontife, plein d’humour, allant même jusqu’à mimer avec lui une scène de boxe en référence à la série des ‘Rocky’.

Pourtant peu adepte de la culture nord-américaine, le pape a reçu au long de son pontificat de nombreuses personnalités du monde hollywoodien, notamment le réalisateur Martin Scorsese ou l’actrice Angelina Jolie.

Ces audiences ‘people› ont toutefois été moins nombreuses en 2023. Parmi les personnalités insolites rencontrées cette année figurent aussi l’actrice Whoopi Goldberg, célèbre interprète de Sœur Marie-Clarence dans Sister Act ou bien plusieurs anciens champions du monde de football français de 1998, parmi lesquels Christian Karembeu et Robert Pirès, venus à l’audience générale du 22 mars dans le cadre d’un pèlerinage du Variétés Club de France. (cath.ch/imedia/ak/cd/hl/cv/rz)