Le Saint-Siège préoccupé par le sort des missionnaires

Rome: Arrestation du religieux belge Guy Theunis au Rwanda

Rome, 15 septembre 2005 (Apic) Le nonce apostolique au Rwanda voit dans l’arrestation du missionnaire belge Guy Theunis un signe préoccupant pour l’Eglise dans le pays.

Interrogé mercredi à Rome par I.Media, partenaire romain de l’Apic, Mgr Anselmo Guido Pecorari a estimé que le gouvernement belge était le premier concerné par la résolution de cette affaire.

Le père Theunis, des Missionnaires d’Afrique – les ’Pères blancs’ – a été arrêté le 6 septembre 2005 à Kigali, accusé d’incitation au génocide et de négationnisme. Auditionné par un tribunal populaire gacaca, il reste emprisonné, dans l’attente de passer devant la justice nationale.

De passage à Rome, Mgr Pecorari a jugé la situation créée par l’arrestation du père Theunis de «contradictoire». «Le gouvernement rwandais, a ainsi expliqué le diplomate, a toujours dit qu’il veut maintenir des bonnes relations avec le Saint-Siège, mais nous notons certains signes préoccupants». Pour le nonce au Rwanda, «ces signes prémonitoires peuvent faire penser à une volonté d’engager l’Eglise dans les accusations récurrentes et totalement fausses d’avoir soutenue l’idéologie révisionniste et génocidaire».

Le mois dernier, l’archevêque de Kigali lui aussi a été convoqué à un procès gacaca sur la base d’accusations que l’on ne peut croire, a encore expliqué Mgr Pecorari. «Nous ne voudrions pas que ce soit un signal de détérioration de la situation envers les missionnaires, à commencer par les Pères blancs, qui ont été les évangélisateurs du Rwanda, et envers l’Eglise en général», s’est-il inquiété.

Le diplomate du Saint-Siège a confié la «surprise» de la nonciature après l’arrestation du missionnaire, affirmant que «ces dernières années, quelques prêtres ont été accusés d’idéologie révisionniste et génocidaire», que «certains avaient été incarcérés», mais que «tous avaient été libérés». Et de citer l’exemple de Mgr Augustin Misago, évêque de Gikongoro, accusé en avril 1999 d’avoir participé au génocide de 1994 et emprisonné à Kigali. En mai 2000, le Ministère public rwandais avait requis la peine de mort contre lui, peine qu’il avait déclarée «totalement injuste et sans fondement». Il avait finalement été acquitté en juin 2000.

Interrogé sur l’action du Saint-Siège dans l’affaire du Père Theunis, Mgr Pecorari n’a pas souhaité donner de précision. Le nonce apostolique a cependant affirmé que «l’action doit être d’abord menée par le gouvernement belge, car l’accusation n’a pas un caractère religieux». Il a aussi jugé importante «la pression de la communauté internationale, car le Rwanda tient à son image ces temps-ci».

Mgr Anselmo Guido Pecorari a souligné que cinq jours à peine après l’arrestation du missionnaire belge des témoins à charge ont été auditionnés, «sans même prendre en considération ses écrits, qui sont réellement des preuves». Dans les tribunaux gacaca, a encore expliqué le nonce au Rwanda, les prisonniers qui accusent les autres d’avoir participé au génocide peuvent obtenir une réduction ou une remise de leur peine. «Ainsi, a-t-il affirmé, il est très facile de trouver des témoins, même sans preuves».

Le père Guy Theunis, aujourd’hui âgé de 60 ans, a vécu au Rwanda de 1970 à 1994. Il dirigeait à l’époque du génocide la revue catholique Dialogue. En 1992 et 1993, il a également été correspondant à Kigali de l’organisation de défense de la liberté de la presse, Reporters sans frontières (RSF).

Lors de son arrestation à Kigali, le Père Theunis était en transit à l’aéroport, en partance pour Bruxelles.

L’Eglise n’est pas responsable du génocide rwandais, même si certains de ses membres y ont participé, avait déclaré le porte-parole du Saint- Siège, Joaquin Navarro-Valls, le 9 juin 2001, à la suite à la sentence d’un tribunal belge accusant deux religieuses rwandaises de «crime de guerre» pour avoir participé au génocide de 1994. (apic/imedia/ami/pr)

15 septembre 2005 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture: env. 3 min.
Partagez!