Benoît XVI: il a vécu la fraternité universelle au Sahara

Rome: Béatification du bienheureux Charles de Foucauld dimanche au Vatican

Rome, 13 novembre 2005 (Apic) Le Français Charles de Foucauld (1858-1916), l’officier colonial devenu ermite dans le Sahara algérien, a été béatifié dimanche à Rome. Plusieurs milliers de Français, dont des élèves de l’école militaire de Saint-Cyr, avaient fait le déplacement. Deux religieuses italiennes, les soeurs Maria Pia Mastena (1881-1951) et Maria Crocifissa Curcio (1877-1957), ont également été élevées ce dimanche à la gloire des autels.

Le pape Benoît XVI, venu s’incliner devant les reliques des trois nouveaux bienheureux proclamés le 13 novembre 2005 au Vatican, a estimé que Charles de Foucauld avait vécu «la fraternité universelle» au Sahara. Le pape s’est adressé aux quelque 15’000 fidèles, parmi lesquels 5’000 Français, venus participer à la béatification du «frère Charles» et de deux religieuses italiennes.

Dans la matinée du 13 novembre 2005, dans la basilique St-Pierre, c’est le cardinal José Saraiva Martins, préfet de la Congrégation pour les causes des saints, qui a célébré la messe de béatification. Le Père Charles de Foucauld, ermite au Sahara, la soeur italienne Maria Pia Mastena, fondatrice et première supérieure de la Congrégation enseignante et hospitalière des religieuses de la Sainte-Face, ainsi que Maria Crocifissa Curcio, religieuse italienne et fondatrice de la Congrégation des Carmélites missionnaires de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, ont ainsi été proclamés bienheureux.

Au terme de la cérémonie, un peu après 11h30, Benoît XVI a rejoint la basilique vaticane pour brièvement vénérer les reliques des trois bienheureux et s’adresser aux fidèles en français et en italien. «Rendons grâce pour le témoignage donné par Charles de Foucauld», a ainsi affirmé le pape en français, ajoutant que, «par sa vie contemplative et cachée à Nazareth, il a rencontré la vérité de l’humanité de Jésus».

«Il a découvert que Jésus, venu nous rejoindre dans notre humanité, nous invite à la fraternité universelle qu’il a vécue plus tard au Sahara, à l’amour dont le Christ nous a donné l’exemple», a déclaré le pape à propos du «petit frère», assassiné en 1916 par des insoumis Touaregs. Benoît XVI a encore souligné que le père de Foucauld avait «appris beaucoup sur le Seigneur qu’il voulait suivre avec humilité et pauvreté».

Le souverain pontife a aussi affirmé que les trois nouveaux bienheureux, «sous des formes diverses, ont consacré leur existence au Christ et reproposent à chaque chrétien le sublime idéal de la sainteté». Il a estimé que la bienheureuse Maria Pia Mastena avait «assimilé les sentiments de douce attention du Fils de Dieu envers l’humanité défigurée par le péché, en a concrétisé les gestes de compassion». Le pape a aussi jugé qu’une «passion authentique pour les âmes» avait caractérisé l’existence de Maria Crocifissa Curcio.

Charles de Foucauld, une influence notable sur la spiritualité du XXe siècle

Au préalable, au cours de la célébration, dans son homélie, le cardinal José Saraiva Martins a évoqué «l’influence notable» de Charles de Foucauld sur la spiritualité du XXe siècle et estimé qu’il demeurait, «en ce début de troisième millénaire, une référence féconde, une invitation à un style de vie radicalement évangélique. Le préfet de la Congrégation pour les causes des saints a ajouté que ce témoignage allait «au-delà même de ceux qui appartiennent aux différents groupements dont sa famille spirituelle, nombreuse et diversifiée, est formée». Il a aussi affirmé que le nouveau bienheureux avait suivi «un chemin vraiment évangélique».

Au début de la cérémonie, les évêques concernés par la cause des nouveaux bienheureux ont lu, tour à tour, la biographie des trois serviteurs de Dieu: Mgr Claude Rault, évêque de Laghouat (Algérie) pour Charles de Foucauld; le cardinal Camillo Ruini, vicaire de Rome, pour Maria Pia Mastena; Mgr Gino Reali, évêque de Porto-Santa Rufina pour Maria Crocifissa Curcio. Puis, le cardinal Saraiva Martins a lu la Lettre Apostolique de Benoît XVI proclamant bienheureux les trois serviteurs de Dieu avant que ne soient dévoilées, dans la basilique et sur la place St-Pierre, les tapisseries reproduisant leurs portraits. Le cardinal Saraiva Martins a alors annoncé que Charles de Foucauld serait fêté chaque 1er décembre, au jour anniversaire de sa mort à Tamanrasset en 1916. AMI/JB

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Une prière universelle en arabe

Lors de la messe, une intention de prière universelle a été lue en arabe par une petite soeur de Jésus, religieuse de la famille spirituelle du Père de Foucauld. Une autre «petite soeur», originaire d’Afrique, a prié «pour que le désir profond de Charles de Foucauld stimule l’esprit missionnaire de tous les croyants, en particulier de ceux qui suivent le nouveau bienheureux en se mettant au service des petits et de ceux qui sont loin». Ensuite, trois jeunes garçons, membres de la famille de Foucauld, et une «petite soeur» ont participé à la procession des offrandes.

Autour de l’autel de la basilique St-Pierre, outre les évêques et les cardinaux, étaient installés quelques Touaregs algériens vêtus de tenues bleues caractéristiques, mais aussi plusieurs dizaines de St-Cyriens en grand uniforme, des élèves de l’école militaire française effectuée par Charles de Foucauld. Le garde des sceaux et ministre français de la justice, Pascal Clément, guidait la délégation de son pays, accompagné de Marie-Laure de Villepin, épouse du chef du gouvernement. Parmi les quelque 5’000 français venus à Rome, nombreux étaient les proches du Père de Foucauld, dont des prêtres ou religieux, petits neveux de l’ermite du Sahara.

Par ailleurs, plusieurs familles françaises dont un des enfants porte le nom de «Foucauld» avaient aussi fait le déplacement. Aux premiers rangs de la basilique se trouvaient aussi de nombreux religieux et religieuses de la famille spirituelle du prêtre français qui compte aujourd’hui 15’000 membres. JB/AMI

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Le bienheureux Charles de Foucauld : un parcours hors du commun

C’est un parcours hors du commun qui caractérise le Père Charles de Foucauld (1858-1916), prêtre béatifié le 13 novembre 2005 au Vatican. L’officier français né à Strasbourg le 15 septembre 1858, orphelin de père et de mère dès l’âge de six ans, indiscipliné et fortuné avant de devenir ermite au Sahara, est un personnage aux multiples facettes. Explorateur infatigable du Maghreb, scientifique passionné du patrimoine des Touaregs, le vicomte de Foucauld est devenu l’une des plus grandes figures spirituelles du XXe siècle. Mais il est aussi le symbole du dialogue entre chrétiens et musulmans et évoque le souvenir de l’histoire de l’Algérie française.

Rien ne semblait prédisposer cet aristocrate fortuné à troquer un jour son costume d’officier pour une humble robe de moine. Il se détourne de la foi dès l’âge de 16 ans. Formé à St-Cyr, le jeune sous-lieutenant découvre le désert algérien après avoir mené une vie dissolue en garnison. Fasciné par le Maghreb, il démissionne de l’armée pour explorer le Maroc puis le sud de l’Algérie et de la Tunisie (1882-1886). De retour à Paris, il fait la connaissance de l’abbé Huvelin, vicaire à St-Augustin, et se convertit en octobre 1886.

Pèlerin en Terre Sainte (1888-1889), il entre l’année suivante à la Trappe de Notre-Dame des neiges, en Ardèche (France), puis rejoint le monastère de Notre-Dame du Sacré-Coeur à Akbès (Syrie). Il passera, en tout, sept ans dans l’ordre cistercien. Mais sa vocation est ailleurs: dispensé de ses voeux, il se fait domestique des clarisses à Nazareth pendant trois ans (1897-1900), voulant à tout prix imiter l’existence du Christ.

De retour en France, il est enfin ordonné prêtre à l’âge de 43 ans, en 1901. Il part alors pour l’ouest algérien, à Beni-Abbès. En 1905, il pose les bases d’une nouvelle fraternité à Tamanrasset (sud) où son ermitage est ouvert à tous, chrétiens et musulmans. Il consacre une grande partie de son temps à l’étude de la langue et des moeurs des Touaregs dont il partage l’existence. Il soigne les malades, accueille les démunis et lutte contre l’esclavage des colons français.

Il retourne à trois reprises en France, entre 1909 et 1913, pour présenter son projet d’association de laïcs pour la conversion des infidèles, regroupant prêtres, religieux et laïcs. Il meurt en 1916 d’un coup de feu tiré par des Touaregs dissidents, les Senoussites de Libye, venus le capturer. JB/HY/AMI

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La prochaine cérémonie de béatification le 20 novembre 2005 au Mexique

La prochaine cérémonie de béatification aura lieu le 20 novembre 2005 au sanctuaire mexicain de Guadalajara. C’est le cardinal José Saraiva Martins qui présidera la messe de béatification des serviteurs de Dieu Anacleto Gonzales Flores et de ses 8 compagnons, Giuseppe Trinità Rangel, Andrea Solá Molist, Leonardo Pérez et Dario Acosta Zurita. Après ces célébrations, 31 nouveaux bienheureux auront été proclamés depuis le début du pontificat de Benoît XVI. Le 23 octobre 2005, ce dernier a présidé les cinq premières canonisations de son pontificat. (apic/imedia/ami/be)

13 novembre 2005 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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