En s’appuyant sur les manuscrits de Qumran
Rome: Benoît XVI précise la date de la passion du Christ, lors de la messe du Jeudi saint
Rome, 6 avril 2007 (Apic) Le pape Benoît XVI s’est appuyé sur les manuscrits de la Mer Morte pour affirmer que Jésus avait célébré la dernière Cène à la veille des fêtes pascales juives, un mardi plutôt qu’un jeudi.
Le pape s’est ainsi exprimé au cours de la messe du Jeudi saint qu’il présidait le 5 avril 2007 en fin d’après-midi dans la basilique romaine de Saint-Jean de Latran. Il a donc officiellement pris position sur les manuscrits de Qumran découvert en 1947.
Benoît XVI a affirmé que «dans les récits des évangélistes, il existe une apparente contradiction entre l’Evangile de Jean d’une part, et ceux que nous communiquent Matthieu, Marc et Luc d’autre part». «Selon Jean, Jésus mourut sur la croix au moment précis où, dans le temple, les agneaux pascals étaient immolés», a-t-il expliqué, ajoutant que «sa mort et le sacrifice des agneaux coïncidaient». «Mais cela signifie qu’il est mort à la veille de Pâques et ne pouvait donc pas célébrer le repas pascal», a continué le pape.
Le pape a aussi souligné que «selon les trois évangiles synoptiques, au contraire, la dernière cène de Jésus fut une cène pascale et dans cette forme traditionnelle il inséra la nouveauté du don de son corps et de son sang». «Cette contradiction semblait insoluble jusqu’à il y a quelques années», a-t-il alors continué, soulignant le fait que «la majorité des exégètes étaient de l’avis que Jean n’avait pas voulu nous communiquer la vraie date historique de la mort de Jésus, mais avait choisi une date symbolique pour rendre ainsi évidente une vérité plus profonde: Jésus est le nouveau et véritable agneau qui a répandu son sang pour nous tous».
«La découverte des manuscrits de Qumran nous a conduit entre temps à une possible solution convaincante qui, si elle n’est pas encore acceptée par tous, possède toutefois un haut degré de probabilité», a enfin affirmé Benoît XVI. Pour le pape, «nous sommes désormais en mesure de dire que ce que Jean a affirmé est historiquement précis». «Jésus a réellement répandu son sang à la veille de Pâques au moment de l’immolation des agneaux», a-t-il continué. «Mais il a célébré la Pâque avec ses disciples probablement selon le calendrier de Qumran, donc au moins un jour avant – il l’a célébré sans agneau, comme la communauté de Qumran».
Pas d’avis officiel de l’Eglise
La messe In Cena Domini a commencé à 17h30 dans la cathédrale de Rome. Après avoir prononcé son homélie, le pape a, selon la tradition, lavé les pieds à douze hommes. Ceux-ci représentaient les organisations laïques du diocèse de Rome. Au cours de la messe, une quête a été réalisée au profit d’un dispensaire en Somalie, puis remise au pape.
A la fin de la première cérémonie du Triduum pascal, le pape a déposé les hosties consacrées dans la chapelle du Saint-Sacrement et s’est agenouillé un moment pour un temps d’adoration silencieuse. Aucune hostie ne sera consacrée jusqu’à Pâques, jour de la Résurrection du Christ.
Les manuscrits de Qumran, connus aussi sous le nom de «Manuscrits de la mer Morte», sont une série de parchemins découverts en 1947 dans cette localité, au nord-ouest de la Mer morte. L’écriture de ces manuscrits pourrait être attribuée à une secte dissidente juive que l’on appelle la communauté des Esséniens. Certains ont évoqué l’appartenance de Jésus ou de Jean-Baptiste à cette communauté.
Interrogé sur le contenu de l’homélie du pape, le cardinal Albert Vanhoye, spécialiste d’exégèse, a affirmé à I.Media qu’il n’y avait «jamais eu d’avis officiel de l’Eglise catholique» sur les manuscrits découverts à Qumran, qu’il considère comme des «documents historiques de grande valeur qui ont renouvelé notre connaissance de l’époque du Christ». Selon ce jésuite, ancien secrétaire de la Commission biblique pontificale, «il n’est pas invraisemblable que Jean-Baptiste (le cousin de Jésus, ndlr) soit allé avec les gens de Qumran».
Il existait probablement deux calendriers concomitants à l’époque du Christ. L’un suivi par les Pharisiens et peut-être aussi par les Sadducéens, et l’autre suivi par les Esséniens, dont il semble que le quartier général se soit trouvé à Qumran. Les Esséniens fêtaient la Pâque un mercredi, les Sadducéens – les grands prêtres du temple – le vendredi. C’est ainsi que la dernière cène du Christ aurait pu se dérouler un mardi, à la veille de la Pâque fêtée par les Esséniens. (apic/imedia/ms/ami/pr)