Rome: «Fides et ratio» est un antidote au pessimisme

Briser la muraille de Chine entre foi et raison

Rome, 15 octobre 1998 (APIC) La 13e encyclique de Jean-Paul II, «Foi et raison», constitue un antidote au «pessimisme» de la culture actuelle, déçue par le rationalisme, estiment les théologiens qui ont présenté le texte jeudi à Rome.

Le cardinal Joseph Ratzinger, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, Mgr Jozef Miroslaw Zycinski, archevêque de Lublin, Mgr Rino Fisichella, évêque auxiliaire de Rome, et le Père Georges Cottier, o.p., théologien de la maison pontificale, ont commenté le contenu cette nouvelle encyclique qui se veut une réponse au «doute envahissant» et aux diverses manifestations de «l’irrationnel»

Le projet de cette encyclique, confie le cardinal Ratzinger, était déjà dans l’esprit du pape après sa première encyclique «Redemptor Hominis». En prenant ses fonctions en février 1980, le cardinal a entendu le pape en parler pour la première fois, avec cette constatation, dit-il, que si foi et raison ne peuvent communiquer, c’est «mortel» pour l’une et l’autre. Le pape voyait que «la vérité, la liberté et l’amour ont un lien trinitaire fondamental: la liberté sans vérité se détruit, la vérité sans amour c’est de l’impérialisme. Ce triangle est au coeur de sa pensée, la préoccupation fondamentale de son pontificat».

Un projet vieux de plus de 15 ans !

Le pape a alors désigné un cercle de philosophes pour y travailler. Il y a 12 ans, précise Mgr Ratzinger, la première version a été établie de la main même de Jean Paul II. Par la suite ses collaborateurs y donnèrent leur contribution, et le pape lui-même y fit plusieurs ajouts. Finalement cette encyclique est vraiment de la «plume du pape», conclut-il, en ajoutant que la maturation a conduit à la publication au moment de l’anniversaire des 20 ans d’élection: une coïncidence «providentielle» et «non programmée».

Pour une solidarité intellectuelle

Pour l’archevêque polonais de Lublin, Mgr Zycinski, «un message d’espérance et d’optimisme domine l’encyclique». Se référant à un terme cher aux polonais (»solidarnosc»), elle réclame, dit-il, la «solidarité intellectuelle», une «solidarité dans la recherche du sens de la vie», «une solidarité d’esprit, qui vainc la tentation du découragement et du pessimisme» pour «conserver les valeurs qui ont eu un rôle décisif dans le développement culturel».

L’encyclique est pour lui une réponse à ce qu’il appelle la «pauvreté intellectuelle de notre époque», à la déshumanisation, «l’adaptation à la médiocrité», ou bien encore la «fuite vers une irrationalité facile». Et de citer – ce que le pape ne fait pas dans l’encyclique -: ésotérisme, occultisme, gourous, astrologie, parapsychologie, horoscope, astrologie, New Age, comme des «substituts de la réflexion rationnelle» lorsque l’homme «refuse l’autorité de la raison».

C’est une réponse à une époque où l’homme n’est plus considéré comme un «animal raisonnable» (Aristote) mais comme «l’homo ludens», l’homme «ludique» qui oppose à la réflexion «l’ironie et le happening». Il cite la phrase du philosophe français Michel Foucault, lors d’une conférence au Collège de France. Celui-ci opposait alors la phrase évangélique: «la vérité vous rendra libres», à ce slogan : «la vérité vous rend esclaves». Le pape dénonce cette opposition, dit Zycinski, où la vérité est conçue comme une «limitation de la liberté».

Au contraire surenchérit Mgr Ratzinger, la certitude fondamentale d’une vérité, dit-il, loin d’exclure la recherche, la stimule et la fonde. «L’existence d’une certitude est le point de départ qui suscite la recherche».

Non au doute envahissant

Pour le Père Cottier, ce document répond à la fois aux excès du «rationalisme» et au «doute envahissant qui conduit à la désespoir de la raison».

Pour Mgr Fisichella, le pape manifeste qui il est dans cette encyclique: «le philosophe passionné pour la vérité». Il y parle à partir de «son expérience personnelle de philosophe» tout en exposant «la doctrine de l’Eglise sur une matière décisive pour la foi et l’évangélisation». Le document expose les fondements de «Veritatis splendor» avec laquelle elle forme un diptique encadrant «Redemptor hominis», dit-il.

Selon lui, le pape «réussit à dénoncer avec vigueur, aussi bien le péril que l’inutilité de certaines murailles de Chine construites pour empêcher le rapport réciproque entre la foi et la raison». C’est, dit-il, l’essentiel de ce que le pape affirme dès son introduction: «la foi et la raison sont comme les deux ailes par lesquelles l’esprit humain s’élève vers la contemplation de la vérité». (apic/imed/mp)

27 avril 2001 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
Partagez!