Les précisions de Philippe de Weck, membre du Conseil de surveillance
Rome: La banque du Vatican impliquée dans un scandale de pots-de-vin?
Rome, 20octobre(APIC) Dix ans après l’affaire du Banco Ambrosiano, la
banque du Vatican risque à nouveau d’être impliquée dans un scandale de
pots-de-vin. Le 16 octobre, l’Institut pour les oeuvres de religion (IOR)
publiait un communiqué démentant que ses comptes aient été utilisés par
Raul Gardini pour le payement de pots-de-vin concernant le groupe chimique
Enimont. Dans ce même communiqué le Vatican se déclarait prêt à collaborer
loyalement avec la justice italienne. L’Agence APIC a pu obtenir une prise
de position de Philippe de Weck, ancien président de l’Union de Banques
Suisses, un des cinq membres du Conseil de surveillance de l’IOR.
APIC: Selon la presse, le cardinal Rosalio Castillo Lara, chef de l’administration des biens du Vatican et membre de la commission des cardinaux
chargée du contrôle de l’IOR, aurait dit que les sommes qui ont transité
par l’IOR sont modestes. 70 millions de francs peuvent-ils être qualifiés
de modestes?
Philippe de Weck: Je ne connaîs pas ces articles de presse, mais si cela
est juste, je ne partage pas cet avis. Une somme de 70 millions n’est pas
une bagatelle. Si l’on se réfère cependant à la fortune des personnes impliquées dans cette affaire, je considère cette somme comme proportionnelle.
APIC: Vous pensez en comparaison avec Enimont?
PhW: Oui, en comparaison avec la fortune de la famille Ferruzzi qui possèdait la moitié d’Enimont – l’autre moitié appartenait à l’Etat – ces 70
millions de francs n’étaient pas une très grosse somme.
APIC: Comment se fait-il qu’une telle affaire puisse avoir eu lieu après la
restructuration de l’IOR?
PhW: Il faut savoir que ces faits se sont passés il y a environ deux ans. A
cette époque Enimont passait pour une société honorable. On ne savait rien
des manoeuvres que l’on connaît aujourd’hui. L’affaire avec Enimont a dû se
passer à un moment où la réorganisation de l’IOR n’était pas encore tout à
fait achevée. Car il fallait alors tout faire à neuf: de nouveaux statuts,
un nouveau règlement, de nouvelles directives.
APIC: De telles affaires sont-elles encore possibles aujourd’hui? Quels
sont les mécanismes de contrôle?
PhW: Depuis quelques temps, le règlement est en vigueur. Il reprend les
prescriptions internationales sur le blanchiment d’argent. Pour les grosses
transactions, seul le président de l’IOR, le professeur Angelo Caloia, peut
signer en tant que président du Conseil de surveillance.
APIC: Le cardinal Castillo Lara dit que l’IOR a encaissé des bons du Trésor
numérotés dont on peut retrouver facilement l’origine. La question ne se
posait-elle pas pour une banque de savoir si ces bons venaient d’une source
licite ou pas?.
PhW: Je ne peux pas entrer dans les détails, car je ne les ai pas devant
moi. En général ce sont des transactions très compliquées. Les détails de
ces questions sont aux mains de juges et non pas destinés au public.
APIC: Comment se situe actuellement l’IOR?
PhW: Le bilan actuel de l’IOR se monte à 7,2 milliards de francs. La fortune de l’IOR, c’est-à-dire son capital, se monte environ à 260 millions de
francs et les réserves à environ 500 millions. Par comparaison, l’UBS dont
j’ai été le président, a aujourd’hui un bilan de 300 milliards de francs,
l’IOR est donc une petite banque. Malgré cela il s’agit tout de même de
montants parfois considérables. Nous avons des clients, des organisations
religieuses, qui ont déposé des millions de francs chez nous. Dans l’Eglise, on a aussi besoin d’argent.
APIC: Qu’en est-il du ménage du Vatican? On dit volontiers que les coûts ne
sont pas couverts?
PhW: Le Vatican a publié ses comptes consolidés pour 1992. Ils sont plus ou
moins couverts. Principalement parce que des gains on été obtenus grâce à
la dévaluation de la lire italienne et aussi parce qu’une partie de la
fortune est en papiers-valeurs étrangers qui ont également augmenté de valeur lors de la dévaluation. Le denier de St-Pierre 1992 n’a été utilisé
qu’en partie pour le ménage du Vatican, le reste a pu être donné à des
oeuvres, notamment missionnaires.
APIC: Pour cette année, s’attend-on à un gros déficit?
PhW: Je pense que cette année il y aura un déficit, mais il sera couvert
par le denier de St-Pierre. Je ne connais cependant pas les détails. (apicoe/mp)