Rome: Le cardinal Bertone confirme la publication du Motu Proprio sur le rite tridentin
«La valeur de la Réforme conciliaire est intacte»
Rome, 1er avril 2007 (Apic) Le cardinal Tarcisio Bertone a confirmé la publication du Motu Proprio sur le rite tridentin. Outre la question liturgique, le secrétaire d’Etat du Saint-Siège, qui s’exprimait dans un entretien avec Le Figaro Magazine paru le 31 mars, est aussi revenu sur les sujets du relativisme et de la baisse des vocations en Occident, de la laïcité et de l’islam ainsi que des relations entre Eglise et médias.
«La valeur de la Réforme conciliaire est intacte. Mais tant pour ne pas perdre le grand patrimoine liturgique donné par saint Pie V (1566-1572) que pour accéder aux souhaits des fidèles qui veulent assister à des messes selon ce rite, dans le cadre du Missel publié en 1962 par le pape Jean XXIII (1958-1963), avec son calendrier propre, il n’y a aucune raison valable de ne pas donner aux prêtres du monde entier le droit de célébrer selon cette forme», a déclaré le cardinal Bertone, interrogé sur la réflexion faite par le pape autour d’un décret élargissant la possibilité de célébrer la messe tridentine. «L’autorisation du souverain pontife laisserait évidemment toute sa validité au rite de Paul VI (1963-1978)», a-t-il précisé.
«La publication du Motu Proprio précisant cette autorisation aura lieu», a poursuivi le secrétaire d’Etat du Saint-Siège, soulignant que «ce sera le pape lui-même «qui expliquera alors «ses motivations et le cadre de sa décision». De source vaticane, elle pourrait avoir lieu en mai prochain. Et le cardinal d’ajouter que Benoît XVI «donnera personnellement sa vision de l’utilisation de l’ancien missel au peuple chrétien, et en particulier aux évêques». Il a en outre précisé que la Réforme liturgique post-conciliaire de Paul VI n’avait «jamais proscrit» l’emploi du latin et du grégorien, mais «bien au contraire», voulait les conserver «à leur juste et grande place».
Interrogé de façon plus générale sur la vision de la liturgie de Benoît XVI, le ’numéro 2 du Saint-Siège’ a affirmé que le pape avait souvent expliqué que la Réforme voulue par le Concile Vatican II (1962-1965) avait pour «véritable objectif de remettre Dieu au centre de la liturgie et de permettre au peuple chrétien de comprendre le sens des grands rites». Mais que l’application des grandes orientations du Concile avait «malheureusement pu connaître des traductions plus ou moins erronées, conduisant à des appauvrissements notables».
Ceux qui ont «interprété à leur propre guise la réforme»
Si pour le cardinal, les fruits de la réforme liturgique sont «considérables», les abus doivent être «combattus», car «une partie du peuple chrétien a pu s’éloigner de l’Eglise en raison de ces errements», liés, non pas aux textes du Concile, mais aux «comportements de ceux qui ont prétendu interpréter à leur propre guise la réforme». Il a aussi condamné «le laisser-aller, totalement inadmissible», qu’il y a eu un temps «dans la promotion des vocations».
S’exprimant par ailleurs au sujet du relativisme, le cardinal Bertone a estimé que la dénonciation de ses ravages constituait «un défi historique pour l’Eglise». Pour lui, «une société qui considère que rien n’a vraiment d’importance et que tout se vaut, ne peut plus reconnaître une valeur absolue, ni même partager des valeurs universelles».
«La foi n’était pas un fait privé»
A propos de la laïcité, le secrétaire d’Etat a expliqué qu’elle consistait en «l’autonomie de la sphère civile et politique par rapport à la sphère religieuse et non par rapport à la morale». Critiquant l’attitude de la France, il a souligné que «la foi n’était pas un fait privé, mais touchait l’ensemble des composantes de la vie de la cité».
Interrogé sur les difficultés rencontrées par le Saint-Siège avec le monde des médias, le cardinal a estimé qu’il était «effectivement confronté à un problème d’une extrême gravité». D’après lui, les messages de l’Eglise sont «soumis à une forme de manipulation et de falsification de la part d’un certain nombre de médias occidentaux». Il a aussi regretté «les fixations» de certains journalistes sur les thèmes moraux comme l’avortement ou les unions sexuelles «qui ne résument absolument pas la pensée et l’oeuvre de l’Eglise». Revenant sur l’exemple de la crise causée par l’interprétation du ’discours de Ratisbonne’, le cardinal Bertone a estimé que les commentateurs qui «isolaient des phrases, dans une extrapolation fallacieuse des choses, se livraient à un exercice malhonnête de leur métier».
Dans son interview de 4 pages, le cardinal Bertone est également intervenu sur les thèmes de la catéchèse face à «l’ignorance religieuse», sur le lien véritable entre foi et raison, sur la confrontation avec l’Islam et su les racines chrétiennes de l’Europe. Il a aussi brossé un portrait rapide de Benoît XVI. (apic/imedia/ar/bb)