Le pape met en garde contre une culture irresponsable de la terre
Rome: Le Jubilé du monde agricole rassemble de dizaines de milliers d’agriculteurs
Rome, 12 novembre 2000 (APIC) A l’occasion du Jubilé du monde agricole, célébré à Rome les 11 et 12 novembre, Jean Paul II a mis en garde contre une «culture irresponsable» de la terre provoquant des conséquences écologiques dévastatrices. Le pape a invité à les dizaines de milliers d’agriculteurs, ainsi que des responsables d’organisations agricoles internationales, présents sur la Place St-Pierre, à une lutte contre «la culture du gaspillage».
Le pape a abordé à deux reprises les questions liées à production agricole lors de ce jubilé, au cours d’une intervention au Vatican le samedi 11 novembre d’abord, puis lors d’une messe célébrée le lendemain matin sur la place Saint-Pierre en présence de dizaines de milliers d’agriculteurs.
Pour Jean Paul II, l’homme doit «user» et non «abuser» de la terre, et les biotechnologies qui soutiennent la production agricole doivent être soumises à «un rigoureux contrôle scientifique et éthique», pour éviter qu’elles ne provoquent «des désastres pour la santé de l’homme et l’avenir de la terre».
Tout en encourageant les agriculteurs à «s’ouvrir à tous les développement significatifs de l’ère technologique», le pape a souligné les problèmes liées aux conséquences de l’industrialisation, en évoquant notamment le développement «parfois désordonné» des villes, et la pollution causée par les décharges de déchets toxiques et le déboisement des forêts.
Ecologie humaine
Pour Jean Paul II, les techniques nouvelles doivent être utilisées non pas uniquement selon des critères économiques, mais dans le respect d’un «principe d’ordre» de la nature, qui «s’enracine dans le coeur de l’homme». Le pape a évoqué en effet l’existence d’une «écologie humaine», exigeant de l’homme qu’il respecte la «structure naturelle et morale» dont il est doté. C’est là, a-t-il expliqué, la condition première de l’efficacité de toute politique mise en oeuvre pour la sauvegarde de la nature. Pour Jean Paul II, les problèmes du monde agricole sont donc aussi des «problèmes moraux», dans la mesure où leurs solutions exigent que ses responsables sachent «résister aux tentations d’une productivité et d’un gain obtenus sans respect de la nature».
La faim, un scandale intolérable
Dans la même perspective, le pape a abordé la question de la faim dans le monde, en invitant «tous les hommes de bonne volonté» à «conjuguer le profit légitime avec la valeur et la pratique de la solidarité». «C’est un scandale intolérable, au début du nouveau millénaire, que de très nombreuses personnes soient encore réduites à la faim et vivent dans des conditions indignes de l’homme», a lancé Jean Paul II. «Nous ne pouvons plus nous limiter à des réflexions académiques : Il faut enlever cette honte de l’humanité avec des choix politiques et économiques appropriés d’envergure planétaire».
Le pape a rappelé que le jubilé, dans son origine biblique, était lié à une redistribution équitable des biens de la terre. Certes, le droit de propriété est «légitime», a-t-il précisé, mais il faut en préserver la «fonction sociale».
Message au directeur de la FAO
Parmi les participants du jubilé se trouvaient des responsables d’organisations agricoles nationales et internationales, et notamment le directeur de la FAO – l’organisation des Nations-Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture -, Jacques Diouf. Le pape en a profité pour leur lancer un appel en faveur du développement d’une «culture de la solidarité», qui se traduise sur les plans économique et politique par des initiatives au service de ceux qui vivent de l’agriculture dans des régions pauvres, fréquemment frappées par des calamités naturelles ou par des guerres.
Jean Paul II a dénoncé par ailleurs une «culture du gaspillage» dans les pays développés, en parlant d’une utilisation excessive des biens de consommation, et en déplorant que cela devienne un «style de vie répandu». «Il faut combattre cette tendance», a insisté le pape, pour qui il s’agit «d’un véritable défi pédagogique et d’un choix de grande clairvoyance». Cela consiste, a-t-il précisé, à «éduquer à un usage des biens qui n’oublie jamais ni les limites des ressources disponibles, ni la condition de pénurie de tant d’êtres humains, et qui par conséquent plie le style de vie au devoir du partage fraternel».
Dans ses deux discours aux agriculteurs, Jean Paul II les a enfin encouragés à être «fiers» de leur travail, et à promouvoir des «initiatives responsables» pour qu’il soit reconnu, mis en valeur, et soutenu par des aides sociales, leur permettant de faire face à leurs difficultés quotidiennes, dues notamment aux conditions atmosphériques imprévisibles. (apic/imed/bb)