Rome: Les nouveaux ambassadeurs du Burundi et du Rwanda reçus par le pape

Droits de l’homme, exécutions et «affaire Misago» en toile de fond

Rome, 16 décembre 1999 (APIC) Le pape Jean Paul II a lancé jeudi un «appel pressant» aux responsables de la régions des Grands Lacs en Afrique «afin que cesse toute forme de violence contre les populations», en recevant le nouvel ambassadeur du Burundi près le Saint-Siège, Aloys Mbonayo, puis celui du Rwanda, Jacques Bihozagara. Ce dernier et le pape n’ont pas manqué de faire allusion, sans le nommer, à Augustin Misago, évêque rwandais de Gikongoro, actuellement jugé pour sa prétendue participation au génocide. Le problème des droits de l’homme, des exécutions sommaires ont figuré en toile de fonds des entretiens.

«Je souhaite que, a dit le pape à Aloys Mbonayo, à la faveur de la nomination d’un nouveau Médiateur dans la crise que vit votre pays, que les différentes parties en cause se retrouvent rapidement autour de la table des négociations avec le désir sincère de mettre fin aux hostilités et de parvenir à une solution définitive qui, dans le droit et la justice, respecte la dignité des personnes et des peuples ainsi que l’amour qu’ils portent à leur terre».

Insistant en outre sur la nécessité de la «solidarité internationale» vis à vis du Burundi, Jean Paul II a encouragé à oeuvrer pour «la conclusion d’un accord global sur les problèmes qui touchent la région des Grands Lacs», qui respecte «les droits légitimes de chaque nation» et favorise «une coopération fructueuse entre tous les pays de cette partie du continent africain».

Enfin, le pape a vivement condamné les «exécutions sommaires et tous les actes de violence homicides» comme «des atteintes intolérables au respect dû à la vie» qui «compromettent gravement l’avenir de la société». Il est urgent que les droits de la personne et les conventions internationales soient respectés par tous les belligérants, a conclu Jean Paul II, avant de souhaiter que les personnes déplacées à cause des conflits «puissent rejoindre librement leurs collines et leurs maisons en toute sécurité», et que les exilés «reprennent le chemin de leur pays».

Le nouvel ambassadeur a pour sa part rendu hommage à l’oeuvre de l’Eglise catholique en faveur de la réconciliation au Burundi, ainsi qu’à ses actions au service des jeunes, dans le domaine de la santé et du développement. Il a invité le pape à venir dans son pays, dans lequel Jean-Paul II s’est déjà rendu en septembre 1990.

Passe d’»armes» entre le pape et l’ambassadeur du rwanda

Recevant ensuite Jacques Bihozagara, le nouvel ambassadeur du Rwanda près le Saint-Siège, Jean Paul II a demandé aux autorités rwandaises qu’elles fassent en sorte d’assurer à tous les prisonniers «des conditions de vie décentes et la possibilité d’être jugés en toute équité selon les principes du droit, en conformité avec les règles morales fondamentales».

«Je souhaite aussi que la mesure et la qualité des peines infligées aux coupables soient attentivement évaluées et déterminées». Le pape espère que la justice n’en arrive pas à la mesure extrême qui consisterait à «la suppression des personnes».

S’il n’a pas évoqué les accusations de génocide portées à l’égard de l’évêque rwandais, Mgr Augustin Misago, Jean Paul II a insisté sur le fait que «la qualité des relations entre l’Eglise catholique et l’Etat rwandais est certainement l’un des éléments qui peuvent permettre à la société d’avancer sur les chemins d’une espérance nouvelle pour son avenir».

Le 15 avril 1999, au lendemain de l’arrestation de Mgr Misago par les autorités rwandaises, le Saint-Siège avait réagi en parlant d’un acte «d’une gravité extrême», à même de perturber «profondément» les relations entre la République du Rwanda et le Saint-Siège.

Le nouvel ambassadeur du Rwanda a de son côté admis «un malaise dans les relations entre l’Eglise et une certaine opinion publique» au Rwanda, ainsi que certains «problèmes» lors de la traduction en justice des coupables de génocide». «C’est ainsi, a-t-il expliqué, que l’inculpation d’un prêtre, d’une religieuse, voire d’un évêque à titre individuel, est interprétée comme une attaque portée contre l’Eglise catholique».

«Je souhaite que, dans un climat de sérénité et de vérité, une coopération confiante se développe entre la communauté catholique et les responsables du pays», a répondu Jean Paul II. «La justice est un préalable indispensable du pardon et de la réconciliation. C’est un droit essentiel pour toute personne d’être respectée dans sa dignité et pour toute communauté d’être traitée de manière juste». (apic/imed/pr)

16 décembre 1999 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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