L’Eglise est vivante, l’Eglise est jeune, lance le pape
Rome: Messe d’intronisation de Benoît XVI placée sous le signe de Jean Paul II
Rome, 24 avril 2005 (Apic) «L’Eglise est vivante, l’Eglise est jeune», a déclaré le pape Benoît XVI au cours de la messe d’inauguration de son pontificat, le 24 avril devant quelque 350’000 participants. Au cours de son homélie, régulièrement interrompue par les applaudissements des fidèles, le pape n’a pas souhaité «présenter un programme de gouvernement» mais évoquer plutôt les insignes de sa charge, le pallium et l’anneau du pêcheur. Il a longuement évoqué la figure de son prédécesseur, Jean Paul II, invitant les jeunes à ne pas avoir peur et «à ouvrir tout grand les portes au Christ».
«En ce moment, moi-même, fragile serviteur de Dieu, je dois assumer cette charge inouïe, qui dépasse réellement toute capacité humaine», a déclaré le pape Benoît XVI au début de son homélie. «Comment puis-je faire cela? Comment serai-je en mesure de le faire?», s’est-il interrogé. «Combien nous nous sommes-nous sentis abandonnés après le départ de Jean Paul II !», a-t-il alors déclaré. «Pendant plus de 26 ans, ce pape a été notre pasteur et notre guide sur le chemin à travers ce temps», a-t-il souligné sous de forts applaudissements. «Il a franchi le seuil vers l’autre vie, entrant dans le mystère de Dieu». «Mais il n’accomplissait pas ce passage tout seul». «Celui qui croit n’est jamais seul, il ne l’est pas dans la vie, et pas même dans la mort», a-t-il continué. «Nous savons désormais qu’il est parmi les siens et qu’il est vraiment chez lui».
Evoquant alors la litanie des saints entonnée à plusieurs reprises au cours des derniers événements, Benoît XVI a confié avoir ressenti, chaque fois, «pendant cette prière chantée, une grande consolation». «De cette manière, se ravive aussi en moi cette conscience : je ne suis pas seul», a- t-il alors lancé. «Je ne dois pas porter seul ce que, en réalité, je ne pourrais jamais porter seul», a déclaré le nouveau pape, assuré d’être protégé par «la troupe des saints de Dieu». «Et votre prière, chers amis, votre indulgence, votre amour, votre foi et votre espérance m’accompagnent». «En effet, à la communauté des saints n’appartiennent pas seulement les grandes figures qui nous ont précédés et dont nous connaissons les noms», a-t-il continué. «Nous sommes tous la communauté des saints».
Interrompu par de longs applaudissements
«Oui, l’Eglise est vivante», a-t-il lancé alors avec force avant de longs applaudissements. «Telle est la merveilleuse expérience de ces jours- ci». «Au cours des journées tristes de la maladie et de la mort du Pape, précisément, s’est manifesté de manière merveilleuse à nos yeux le fait que l’Église est vivante». «Et l’Eglise est jeune», a-t-il encore souligné. «L’Eglise est vivante et nous le voyons: nous faisons l’expérience de la joie que le Ressuscité a promise aux siens». «Dans la souffrance, présente sur le visage du Saint-Père, au cours des jours de Pâques, nous avons contemplé le mystère de la passion du Christ et nous avons en même temps touché ses plaies», a-t-il encore souligné.
«L’Eglise est vivante», a-t-il encore lancé, saluant alors les cardinaux et évêques, les prêtres, les diacres, les agents pastoraux et catéchistes, les religieux et les religieuses et les fidèles laïcs. Il a aussi salué ceux qui, nouvellement nés par le sacrement du baptême, «ne sont pas encore dans la pleine communion avec nous» et les «chers Frères du peuple juif, auxquels nous sommes liés par un grand patrimoine spirituel commun qui plonge ses racines dans les promesses irrévocables de Dieu», et enfin «tous les hommes de notre temps, croyants et non croyants».
«En ce moment, je n’ai pas besoin de présenter un programme de gouvernement», a ensuite déclaré le souverain pontife, souhaitant évoquer plutôt «certains aspects de ce que je considère comme de ma charge». «Mon véritable programme de gouvernement est de ne pas faire ma volonté», (.) «mais, avec toute l’Eglise, de me mettre à l’écoute de la parole et de la volonté du Seigneur, et de me laisser guider par lui, de manière que ce soit lui-même qui guide l’Eglise en cette heure de notre histoire», a-t-il souligné.
Présentation du pallium et de l’anneau du pêcheur
Benoît XVI a alors exposé «les deux signes qui, sur le plan liturgique, représentent le début du ministère pétrinien»: le pallium et l’anneau du pêcheur. «Le premier signe est le pallium», a-t-il souligné, le soulevant pour le désigner à la foule, «tissu en pure laine, qui est placé sur mes épaules». «Ce signe très ancien, que les évêques de Rome portent depuis la fin du IVe siècle, peut être considéré comme une image du joug du Christ, que l’Evêque de cette ville (.) prend sur ses épaules».
«Connaître ce que Dieu veut, connaître quel est le chemin de la vie, (.) telle est notre joie», a-t-il continué expliquant que la volonté de Dieu n’aliène pas mais purifie. «En réalité, le symbolisme du pallium est encore plus concret: la laine d’agneau entend représenter la brebis perdue». «L’humanité nous tous est la brebis perdue qui, dans le désert, ne trouve plus son chemin».
«Combien de fois désirerions-nous que Dieu se montre plus fort! Qu’il frappe durement, qu’il terrasse le mal et qu’il crée un monde meilleur!», a déclaré le pape. «Toutes les idéologies du pouvoir se justifient ainsi, justifient la destruction de ce qui s’oppose au progrès et à la libération de l’humanité». «Le monde est racheté par la patience de Dieu et détruit par l’impatience des hommes», a-t-il encore lancé. Le souverain pontife s’est dit «prêt à souffrir», avant de déclarer «priez pour moi, pour que j’apprenne toujours plus à aimer le Seigneur». «Priez pour moi, pour que j’apprenne à aimer toujours plus son troupeau, vous tous, la Sainte Eglise, chacun de vous personnellement et vous tous ensemble». «Priez pour moi, afin que je ne me dérobe pas, par peur, devant les loups», a-t-il enfin demandé.
Prendre le large sur l’océan de l’histoire
Puis, il a évoqué le deuxième signe du commencement du ministère pétrinien, la remise de l’anneau du pêcheur. Rappelant l’épisode de l’Evangile au cours duquel Pierre est appelé à devenir pasteur et qui fait suite au récit d’une pêche abondante, Benoît XVI a rappelé combien aujourd’hui encore, «l’Eglise et les successeurs des apôtres sont invités à prendre le large sur l’océan de l’histoire et à jeter les filets, pour conquérir les hommes au Christ à Dieu, au Christ, à la vraie vie».
«Nous, les hommes, nous vivons aliénés, dans les eaux salées de la souffrance et de la mort, dans un océan d’obscurité, sans lumière», a-t-il alors souligné. «Le filet de l’Evangile nous tire hors des eaux de la mort et nous introduit dans la splendeur de la lumière de Dieu, dans la vraie vie». «Il faut tirer les hommes hors de l’océan salé de toutes les aliénations vers la terre de la vie, vers la lumière de Dieu», a-t-il alors continué. «Nous ne sommes pas le produit accidentel et dépourvu de sens de l’évolution», a-t-il encore expliqué, précisant que «chacun de nous est le fruit d’une pensée de Dieu» et que «chacun de nous est voulu, chacun est aimé, chacun est nécessaire».
«Je voudrais encore souligner une chose: de l’image du pasteur et de celle du pêcheur émerge de manière très explicite l’appel à l’unité», a lancé Benoît XVI. «Hélas, (.) aujourd’hui le filet s’est déchiré, aurions- nous envie de dire avec tristesse!» en évoquant le difficile chemin oecuménique. Mais, le pape a demandé de ne «pas être tristes» et de faire «tout ce qui est possible pour parcourir la route vers l’unité». «Ne permets pas que ton filet se déchire et aide-nous à être des serviteurs de l’unité !», a-t-il encore affirmé en s’adressant au Seigneur.
Reprise des paroles de Jean Paul II
Benoît XVI s’est alors rappelé du «22 octobre 1978, quand le pape Jean Paul II commença son ministère ici, sur la Place Saint-Pierre». «Les paroles qu’il prononça alors résonnent encore et continuellement à mes oreilles : ’N’ayez pas peur, au contraire, ouvrez tout grand les portes au Christ’». «Le pape parlait aux forts, aux puissants du monde, qui avaient peur que le Christ les dépossède d’une part de leur pouvoir, s’ils l’avaient laissé entrer et s’ils avaient concédé la liberté à la foi». «Oui, a poursuivi Benoît XVI, il les aurait certainement dépossédés de quelque chose: de la domination de la corruption, du détournement du droit, de l’arbitraire», affirmant que le Seigneur «ne les aurait nullement dépossédés de ce qui appartient à la liberté de l’homme, à sa dignité, à l’édification d’une société juste».
Enfin, au terme de l’homélie, Benoît XVI s’est adressé particulièrement aux jeunes. «Je voudrais, avec une grande force et une grande conviction, à partir d’une longue expérience de vie personnelle, vous dire, à vous les jeunes : n’ayez pas peur du Christ !», leur a-t-il lancé. Il leur a précisé que le Christ «n’enlève rien» et «donne tout», affirmant que «celui qui se donne à lui reçoit le centuple» et concluant : «oui, ouvrez, ouvrez tout grand les portes au Christ, et vous trouverez la vraie vie». MS
Encadré:
Les Eglises orthodoxes représentées en force
De nombreux représentants des Eglises chrétiennes ont participé à la messe d’inauguration du pontificat de Benoît XVI. Comme pour les funérailles de Jean-Paul II, les délégations des Eglises orthodoxes ont été majoritairement représentées.
C’est le métropolite Chrysostome d’Ephèse et le métropolite Alexis de Carthage qui ont représenté respectivement le patriarcat oecuménique et le patriarcat grec-orthodoxe. Le président du département pour les relations extérieures du patriarcat de Moscou, le métropolite Kirill, a aussi été présent. Il avait déjà assisté aux obsèques de Jean Paul II, le 8 avril dernier. Par ailleurs, l’assemblée était également composée de délégations des Eglises orthodoxes d’Ukraine, de Serbie, de Georgie, de Bulgarie, des pays Tchèque et Slovaque, de Chypre, de Grèce et d’Albanie,ainsi que de représentants du patriarcat orthodoxe de Roumanie et de l’Eglise orthodoxe en Amérique. Les antiques Eglises orthodoxes orientales ont envoyé trois délégations: celle du patriarcat copte-orthodoxe d’Egypte, de l’Eglise apostolique arménienne et de l’Eglise arménienne de Cilicie.
L’archevêque de Canterbury, Rowan Williams, a assisté à l’intronisation de Benoît XVI, au nom de la communion anglicane. Les protestants, quant à eux, ont été représentés par des membres de l’Union d’Utrecht, de la Fédération luthérienne mondiale, du Conseil méthodiste mondial, de l’Alliance des Eglises réformées et de l’Eglise pentecôtiste.
Certaines organisations chrétiennes mondiales ont aussi assisté à la célébration, comme le Conseil oecuménique des Eglises et la Conférence des Eglises européennes.
Côté politique, les Etats-Unis sont représentés par le frère du président, le gouverneur de Floride Jeb Bush, l’Allemagne par le président Horst Koehler et le chancelier Gerhard Schroeder ainsi que par une importante délégation bavaroise – région d’origine du cardinal Ratzinger -, la France par le premier ministre Jean-Pierre Raffarin et le ministre des affaires étrangères Michel Barnier, et l’Espagne par le roi Juan Carlos et la reine Sofia.
Des illustrations de la célébration peuvent être commandées à l’agence CIRIC, Bd de Pérolles 36 – 1705 Fribourg. Tél. 026 426 48 38 Fax. 026 426 48 36 Courriel: info@ciric.ch
(apic/imedia/ms/bb)