400ème anniversaire du bûcher de l’hérétique napolitain

Rome: Pas de réhabilitation pour Giordano Bruno, estime le Père Cottier

Rome, 3 février 2000 (APIC) Il n’y aura pas de réhabilitation pour l’ex-dominicain Giordano Bruno, l’hérétique napolitain brûlé sur un bûcher le 17 février 1600 à Rome, estime le Père Georges Cottier, théologien de la maison pontificale. Le philosophe victime de l’Inquisition fait à nouveau la «une» des médias italiens à la veille du 400ème anniversaire de sa mort tragique.

Colloques, livres, émissions de télévision et pièces de théâtre se multiplient alors que pour l’Eglise, si le bûcher était «une erreur», la doctrine de ’frate Giordano’ ne peut être partagée par les chrétiens. Non seulement condamné par les catholiques mais aussi par les luthériens et les calvinistes, ce «philosophe, hérétique et magicien», comme le définit un article de la revue jésuite «Civiltà Cattolica» à paraître cette semaine, ne sera donc pas réhabilité par l’Eglise.

L’Eglise peut demander pardon pour les moyens utilisés pour défendre la vérité

Interrogé par le quotidien italien «Avvenire» daté du 3 février, le Père Georges Cottier, lui-même dominicain, affirme que Giordano Bruno «ne peut pas être réhabilité comme penseur catholique, tout simplement parce que sa pensée n’a jamais été catholique». Il niait en effet des vérités comme le dogme de la Trinité ou l’unicité de l’âme d’une personne, explique le théologien du Vatican. En revanche, l’Eglise peut demander pardon pour les moyens utilisés pour défendre la vérité. L’Eglise, dit-il, doit toujours soutenir la foi, mais pas à l’aide du «bras séculier». Et d’ajouter que le procès, qui avait duré 7 ans, avait été fait «selon les normes, avec la volonté de sauver l’accusé». Mais le Père Cottier relève que nous savons aujourd’hui que la peine de mort ne doit pas être utilisée contre une personne, même si elle défend des positions anti-chrétiennes.

Pour le Père Cottier, le rôle des historiens est d’étudier plus à fond «l’affaire Giordano» et de «redimensionner» certains mythes qui le définissent comme le symbole de la liberté de pensée des anticléricaux du siècle dernier. Aucun retour en arrière de l’Eglise donc, comme cela a été fait pour Savonarole ou Galilée, même si le IVème centenaire de la mort de Giordano Bruno sera l’occasion, pour certains, de faire pression et de le considérer comme un «martyr de la libre pensée».

Né à Nola, au Sud de Naples, en janvier ou février 1548, Filippo Bruno entra, à l’âge de 17 ans, au couvent napolitain des frères prêcheurs de l’ordre de Saint Dominique en juillet 1565 et fut ordonné prêtre à 24 ans. Très vite, ses supérieurs lui reprochèrent l’hérésie de nier le dogme de la Trinité et la Curie de Naples entama un procès inquisitorial. Il se réfugia à Rome puis quitta l’habit de dominicain. Il commença ensuite un long périple qui le conduisit dans le nord d’Italie et en Europe.

Passage au calvinisme

Après un passage en France, à Lyon, il fut accueilli par une communauté calviniste italienne à Genève en 1552. Ayant renié le catholicisme et adhéré au calvinisme, il fut cependant excommunié par la communauté calviniste en août 1579. Mais il ne mentionna jamais son apostasie, lors de l’Inquisition. Il vécut en France de 1579 à 1583, à Toulouse puis à Paris où il enseignait la philosophie. Il se rendit ensuite à Londres où il fut admis à la Cour de Elisabeth I avant de revenir à Paris en 1585, puis en Allemagne, enfin à Prague en 1588 à la cour de l’Empereur Rodolphe II qui s’entourait de philosophes, artistes et magiciens de toute sorte. Il se rendit à Helmdstedt où il fut rapidement excommunié de la communauté luthérienne, pour des raisons purement personnelles. Ce n’est qu’en mars 1592 qu’il rentra en Italie, où un mécène de Venise l’accueillit. Ce dernier le dénonça cependant à l’Inquisition de Venise, l’accusant d’hérésie. D’abord emprisonné et jugé à Milan, il fut transféré à Rome neuf mois plus tard, en février 1593 où il fut jugé coupable et brûlé vif sur la place ’Campo dei Fiori’ à Rome le 17 février 1600. (apic/imed/be)

3 février 2000 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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