Trois mille gitans attendus place Saint-Pierre

Rome: Première béatification d’un gitan

Rome, 2 mai 1997 (APIC) Le gitan espagnol Ceferino Gimenez Malla, surnommé «El Pele» (1861-1936) sera proclamé martyr et béatifié par Jean-Paul II ce dimanche, avec un autre martyr de la Guerre d’Espagne et trois autres nouveaux bienheureux d’Italie et du Guatemala. Une cause qui n’a pas perdu de temps (3 ans), et le «Pele» est déjà sur Internet !

Les béatifications du «Pele» et d’un autre compatriote porteront à 219 le nombre des martyrs de la Guerre d’Espagne béatifiés jusqu’ici. Surtout, Ceferino Gimenez Malla sera le premier bienheureux gitan de l’histoire, et il est déjà question de sa canonisation.

Le «maire des gitans»

Marié, sans enfant – mais il avait adopté une petite nièce qu’il traita comme sa fille -, Ceferino était marchand de chevaux et allait de foire en foire. Il savait qu’il est difficile «d’être commerçant sans pécher». Mais sa droiture et sa sagesse lui permirent d’être choisi, quoique analphabète, parmi les dix conseillers de la ville de Barbastro, en Aragon. On l’appelait le «maire des Gitans», et l’évêque n’hésitait pas à le consulter.

Devenu tertiaire franciscain en 1926, «El Pele» faisait aussi partie de la Conférence de Saint-Vincent de Paul, attentif aux malades et aux plus pauvres. Parmi ses pairs, il servait de médiateur. A la fin de sa vie, il participait quotidiennement à la messe, était assidu à l’adoration eucharistique le jeudi et, une fois par mois, la nuit. Il faisait la catéchèse aux enfants et avait toujours son chapelet en poche.

C’est ce détail qui, le jour de son arrestation par des miliciens, parce qu’il prenait la défense d’un jeune prêtre, le fit emprisonner. Il refusa de s’en séparer pour retrouver la liberté. Fusillé le même jour que son évêque, il mourut après avoir lancé «Vive le Christ Roi». Son corps, jeté dans la fosse commune, ne fut jamais retrouvé.

Mea culpa

L’évêque de Barbastro aussi sera béatifié, mais le procès du Gitan a été conclu plus vite, l’Eglise donnant la priorité à un peuple qui n’a pas encore de bienheureux, a expliqué vendredi à Rome Mgr Cheli, président du Conseil pontifical pour la pastorale des Migrants et des Itinérants, qui est aussi président d’honneur du Comité pour la canonisation du «Pele». A ses côtés, Don Mario Riboldi, promoteur de la cause et auteur de la biographie officielle du gitan, y a été d’un «mea culpa» des prêtres: en six siècles, les gitans ont été «baptisés», mais pas «évangélisés», a-t-il regretté, sauf quelques tentatives sans lendemain, comme celle de saint Joseph de Calasanz en Espagne.

Les missions n’ont vraiment commencé en Europe qu’au lendemain de la IIe Guerre mondiale, durant laquelle le peuple gitan fut persécuté par les nazis. En 1995, lors d’un congrès du Conseil pontifical pour les migrants, Jean-Paul II avait spécialement fait mémoire du «sort tragique de frères et soeurs Gitans» à Auschwitz-Birkenau.

Une messe gitane

On attend dimanche matin place Saint-Pierre plus de 3.000 gitans venus de toute l’Europe, dont plus d’un millier d’Espagnols. Cinq prêtres gitans concélébreront avec le pape. Seront également présentes deux religieuses contemplatives gitanes venues d’Espagne. Une lecture et une intention de prière seront dites par des gitans, et la procession d’offrande sera accompagnée par deux violonistes.

L’après-midi est prévu à la Salle Paul VI un spectacle ouvert à tous, dû aux meilleurs artistes gitans et andalous de flamenco. Leur spectacle sur la vie du premier gitan béatifié, présenté dans la cathédrale de Séville, a obtenu un énorme succès. Une «messe Gitane» est programmée lundi matin dans la Basilique de Sainte-Marie Majeure. Un campement spécial a été aménagé à Rome pour l’occasion, mais beaucoup de pèlerins gitans sont accueillis dans des maisons religieuses ou des hôtels.

6.000 gitans à Rome

L’événement est pour la Caritas italienne l’occasion de sensibiliser les catholiques de Rome à la présence dans leur ville de plus de six mille gitans. «Pendant une journée, l’une des catégories les plus marginalisée sera au centre de l’attention de la communauté ecclésiale, comme le jour où, en 1965, le pape Paul VI rendit visite aux Gitans d’Europe réunis à Pomezia», rappelle-t-elle. Un tiers de ces 6.000 gitans sont citoyens italiens, les autres venant de Bosnie, de Serbie, de Macédoine, de Croatie et de Roumanie. La proportion dans tout le pays est inversée: des quelque 100.000 gitans vivant en Italie, un quart seulement proviennent de l’ex-Yougoslavie.

Du point de vue religieux, 46 % de Rome sont musulmans. Les chrétiens sont orthodoxes (27 %), catholiques (23 %) et protestants (3 %). Les chiffres diffèrent beaucoup suivant les pays. En France, la moitié des gitans sont aujourd’hui protestants et pentecôtistes.

A Rome, les gitans occupent 62 emplacements, dont 27 sans électricité, 19 sans eau, 13 sans toilettes, 9 sans service de nettoyage municipal. S’ajoutent 11 lieux de séjour non autorisés, 15 camps provisoires (dont 5 seulement autorisés) et 13 communautés ayant une solution de logement «traditionnel» dans des maisons modestes ou des baraquements. (apic/imed/mp)

6 avril 2001 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
Partagez!